Il faut qu'on parle - [LEMON] [Céleste & Olympe]

Ah tiens, elle se lance dans l'humour grivois. C'est nouveau, j'avoue être positivement surprise, ça m'embarasse plus que ça me fait rire quand même, mais j'apprécie. Pas d'être comparée à une peluche, non, qu'elle s'ouvre encore un peu.

Je la vois inverser les rôles, recréer une scène gravée dans ma mémoire. Je la vois se hisser, me surplomber, poser son regard désireux et moqueur sur ma pauvre âme. Les lignes entre la masquarade et les vrais désirs se brouillent, je me perds dans ses mots, ses attentes. Elle me singe et m'imite, je sais que c'est une invitation. Alors, j'agis.

Je me redresse un instant, lui saisit le dos, les omoplates, la tire pour l'embrasser passionnément. j'en retourne au sol, me piège entre son poids et la roche en la serrant comme si elle était ma dernière ancre à ce monde. Elle voulait de l'action, en voilà, je laisse mes mains trembler sur ses vêtements. Quand enfin je la relâche partiellement, je lui souffle à l'oreille, une braise dans les poumons:

"Alors je te trouve beaucoup trop habillée, et je crois qu'on devrait rentrer se trouver un hôtel sympa. Là, tout de suite."

L'histoire se répète, toujours, se répétera encore. Je la libère vraiment, caresse sa joue de la main, laisse courir mon index sur ses lèvres, sans raison. Je pourrai rester des heures, à la regarder, juste la regarder, à lire les traits de son visage encore et encore. Mais j'ai besoin de plus, un feu dévorant revient me consumer, demander son tribut d'indicibles offrandes.

C'est quelle me taquine, la diablesse. Manifestement, je suis pas la seule à avoir ces petites envies coupables, ces pulsions inadmissibles. Hélas, je dois quand même la recadrer, je crois qu'elle perd le nord.

"Je peux arranger ça, oui, mais ça attendra, sauf si tu veux traverser la ville les seins à l'air."

Je pense pas que l'idée l'enchante. J'en suis certaine même, puisque rien ou presque ne l'enchante vraiment. Sauf moi, c'est flatteur. Et elle me cherche encore, me taquine, je commence à sourir, parce qu'elle risque de me trouver. Elle m'a toujours pas laissé m'enfuir, mais je me sens déjà capable de la renverser. Elle sait pas ce qu'elle risque.

"Et pour ta gouverne, je sais me tenir."

À peu près. Enfin, c'est pas parfait. Surtout qu'elle vient encore caresser mes lèvres, comme pour me charmer. Mais je serais forte, c'est quand même ni le lieu ni le moment. Il fait froid. Et je crois qu'elle se rend pas compte d'à quel point le caillou est inconfortable. Je lui fais signe de se relever, mais je lui retourne sa malice.

"Mais si tu continues à me chercher, je risque de devoir te plaquer contre un arbre sur le chemin..."

C'est ce qu'elle veut, elle attend que ça, je commence à me dire. Oh, si elle est si pressée, Céleste va me trouver, elle sait comment faire.  Mais pas en pleine montagne, on est pas des sauvages.

À la première occasion, elle exagère quand même. Je vais quand même pas nier avoir une libido, mais elle grossit le trait cruellement. Puis vaut mieux ça qu'être un glaçon, voilà. Je vais quand même pas l'oraliser, mais j'en pense pas moins, non mais.

Et à mon grand dam, elle me cerne que trop bien. Je sais pas si elle a fouillé ma chambre pour déterrer ma littérature romantique ou l'a deviné, mais en tout cas elle pointe mes inspirations. Ou alors elle lit les mêmes choses que moi... Oh, petite coquine, va.

"Non, ce sera pas joli, ce que je veux te faire."

Quoi, elle fait que me titiller, j'ai quand même le droit de me défendre. Avec un peu d'espoir, j'arriverais à la faire rougir un jour. Peut-être dans cent ans, mais un jour néanmoins. Elle pique ma curiosité, la succube, je lève un sourcil et souffle entre mes dents.

"Et ce serait quoi, ma récompense?"

C'est pas que j'aime pas les surprises, mais j'ai vraiment envie de savoir. De l'entendre le dire, le verbaliser, me faire des promesses. Surtout qu'elle manque pas d'imagination, l'abeille.

Je rassemble mes affaires, range tout, en attendant sa réponse. C'est mignon qu'elle s'inquiète pour mes jambes. Pas infondé non plus, au fond je suis redevenue légèrement maladroite avec, mais elles me sont fidèles et tiennent l'effort. Et puis, descendre sera jamais pire que grimper. Je l'invite à passer devant en courbant l'échine et présentant ma main devant le sentier. Quitte à devoir lui fondre dessus, autant l'attaquer de dos.

"T'en fais pas pour mes jambes, ça ira. Je suis construite pour durer."

Ou alors le travail m'a rendue robuste avec le temps. C'est vraiment une affaire d'œuf ou de poule.

D'accord, c'est bon, j'ai compris. Elle veut juste pas l'admettre, mais elle me cherche, et très proactivement. Je sais pas vraiment à quel jeu elle joue, mais forcée de constater qu'elle va toujours gagner. À provoquer, encore et encore, inlassablement, elle me fera toujours réagir comme elle le souhaite, je suis juste à sa merci. Et le pire, c'est que ça me plaît.

"Si tu me dis pas ce que t'as en tête, je dirais rien non plus."

J'aurais presque envie de lui tirer la langue comme elle sait le faire, mais je suis civilisée, moi. Le pire, c'est que je reste convaincue qu'elle a des grands plans d'une complexité rare de prévus, dont je ne peux soupçonner l'ampleur. La réalité est décevante, mais ô joie: je ne connais que le mensonge. La différence, c'est qu'à chaque instant, une voix lascive me susurre de passer à l'acte, alors qu'elle reste maître de ses émotions.

C'est quand elle ose, ose remettre en question ma vaillance que je me décide enfin. Au diable la surprise, j'ai ma fierté. Je prétend pas être une force de la nature ni une athlète, mais à l'entendre parler je suis un chaton. Je l'aime, ma Céleste, elle connait tous mes leviers.

"Ah tiens, on peut couper par là, je crois."

Je désigne une sorte de sentier naturel dans la vallée, ni creusé par l'humain ni par la faune, un chemin tracé au rythme de la nature. Discret, sombre et couvert par la canopée, sensiblement moins en pente que le reste. Des ronces traînent ici et là, et probablement des bestioles avec des canines aussi, mais ça ira. Avant qu'on m'accuse de cacher mon jeu: oui, j'ai menti. Je sais pas du tout ou ça mène, ça a juste l'air plus reculé et inaccessible que la route connue. C'est parfait.

"Tu veux que je passe devant?"

Y'a aucune bonne réponse à la question, vraiment. Dans tous les cas, j'ai posé mon piège. J'imagine qu'elle doit s'en douter, j'aurais tenté de dire le tout naturellement comme si ça n'avait aucun rapport, mais bon. Mentir c'est pas mon fort.

Elle lit en moi comme dans un livre ouvert. C'est humiliant et réconfortant à la fois, elle me connait, mais trop. Quoi qu'au fond, mes intentions sont particulièrement claires, surtout qu'elle me fait des appels du pied depuis cinq minutes. Tant pis, j'accepte d'être prévisible et transparente, au moins ça évite les mauvaises surprises, j'imagine.

Et croyez-le ou non, je devinais aussi qu'elle allait me laisser "passer devant". Maline comme elle est, je me doute qu'elle lit entre les lignes, mais ça veut pas dire que je peux pas la prendre de court. Ni une ni deux, je l'enserre au niveau de la taille et je la soulève quelques centimètres au dessus du sol, en ricanant. Le genre de chose que je peux pas tellement faire sans jambes fonctionnelles, alors j'en profite. Bon, la vérité soit dite, je la pensais plus légère que ça, mais c'est pas grave.

"Viens par là, toi."

C'est pas tellement la peine de demander, je l'emporte bon gré mal gré jusqu'à un vieux chêne, la repose seulement pour lui saisir la tête des deux mains et y planter un baiser profond. À se moquer de ma force, vraiment, on récolte ce qu'on sème. Quoi qu'elle aie planté volontairement les graines, voyez.

Je fais obstacle de mon corps, m'amuse de ne l'avoir rien qu'à moi, perdues loin de toute civilisation. Les arbres et les oiseaux pour témoins, la tranquilité sereine de la nature pour complice. Je laisse courir le bout de mes doigts le long du tissu qui protège son corps, suit ses lignes et les accompagne, prend un air supérieur. Je sais qu'elle se fait plus vulnérable qu'elle ne l'est, qu'elle se laisse faire, mais ça m'enivre tout autant.

"Peut-être que si tu demandes pardon, pardon d'avoir douté de ma puissance et de ma vigueur, je serai clémente et je te laisserai t'enfuir. Sinon..."

Je pose une main sur sa hanche, une autre derrière, plus loin. l'avertissement est clair, au moins. J'ai plus vraiment envie d'attendre une surprise, franchement.