Soirée à la coule - [Céleste & Olympe]

Olympe ne peut pas vraiment savoir si Céleste la juge dangereuse pour la petite farce qu'elle lui a joué quelques minutes plus tôt, ou au contraire précise que seulement certaines chimères le sont pour lui faire comprendre qu'elle est aussi innoffensive qu'une fleur. Mystère mystère. Dans le doute, elle prefère ne rien dire et ne pas demander.

Et malgré les injonctions de la vampire, l'heure n'est plus aux railleries. Quoiqu'elle aurait pu continuer un temps, mais ça devenait lassant. Elle se rapproche quand même, histoire de rassurer sa pauvre comparse. Qui atteint presque son but, mais pas tout à fait.

"Maintenant, faudrait lâcher l'échelle. Tu vas finir par la briser."

"Et c'est pas impossible que ce soit à moi de la réparer" lui vient à l'esprit, mais assez d'humour pour ce soir. Surtout que Céleste fait face à une grande épreuve. Enfin, en théorie. Ça reste un peu obscur pour la chimère. Finalement, elle est assez satisfaite de n'avoir aucune vraie peur dévorante. Ça a l'air contraignant.

"Et je sais pas moi, marche un peu sur le fond, ça risque rien."

Bon, Céleste vient vraiment de confirmer qu'elle est en tel état de panique que la raison a fui son esprit. Déjà, elle admet vouloir endommager la propriété de la piscine, ce qui est très questionnable moralement, mais en plus elle a l'air de croire pouvoir le faire. Inutile de préciser que c'est questionnable physiquement.

Aussi discrètement que le permet sa nage, elle s'infiltre derrière Céleste, serpente dans son dos pour lui couvrir les doigts et les détacher un à un, avec étonnament peu de résistance de sa part. Il fallait décidément la pousser pour avancer, c'était pour son bien.

"Mais oui, tu risques de boire la tasse et je devrai te faire du bouche à bouche..."

Allez savoir qui lui a donné l'idée, vraiment, mais quelque part à sonne comme une menace. Elle se ferait même un malin plaisir de laisser un joli goût d'encre dans son palais pour la dégoûter à vie.

Quand le dernier doigt lâche enfin, la chimère a au moins l'amabilité de reste proche pour rassurer la pauvre boolicière, mais au fond elle préférerait continuer de nager jusqu'à l'épuisement. Reste qu'elle est là pour aider une amie, quand même, faut bien s'y faire.

"Tu vois, t'as pied...

Enfin, elle devait déjà le savoir, mais le rappeler peut pas faire de mal.

L'image qui vient à l'esprit d'Olympe, dans l'instant, c'est une vidéo de chat qu'elle avait vu récemment, qui faisait tout pour s'accrocher à son environnement et fuir le bain. Sauf que le chat avait 50 ans et une bouée, et s'accrochait à elle. Croyez bien que ç'aurait été mignon si Céleste ronronnait ou faisait vingt centimètres de long, mais là, ça lui donne pas immédiatement l'envie de la réconforter.

Surtout si près du but, c'était quand même malheureux. Prise d'une patience immense, elle lui explique calmement, rationnellement.

"Céleste, je suis moi-même en train de me tenir debout, là."

Finalement, la voir réduite à de tels extrêmes, ça peut avoir son côté attendrissant. On aurait presque envie de lui masser les épaules en lui disant que tout ira bien. Mais voilà, empoignée comme elle est par la vampire, la grecque a d'autres idées. Surtout qu'elle-même n'est pas faite de ferraille, et qu'elle risque d'avoir des marques à force.

"Tu sais que je vais tranquillement t'amener du côté le plus profond du bassin si tu t'obstines à me coller?"

Non pas qu'elle soit vraiment plus en danger là-bas qu'ici, avec sa bouée et une chimère pour la surveiller, mais Olympe savait que la peur irrationelle prend le dessus sur la raison. Surtout qu'elle a déjà un minimum d'expérience avec une colocataire un peu réfractaire à l'idée de se mouiller également.

Un cri du coeur, un vrai, un de ceux qui ne se font pas par tromperie ni mensonge. Un poil puéril et enfantin, mais là encore, devant des peurs existentielles, nous sommes tous vulnérables.

Alors elle dérive. Lentement, inexorablement, vraiment très lentement. Au loin, au large, lentement. Vers l'infini. À sa perte, sa ruine, ses terreurs insondables. Lentement.

Olympe ne sait pas trop quoi faire de l'information, se contente de nager à ses côtés pour prévenir un éventuel désastre, tente un peu de deviner ce qu'il se passe dans son esprit. Bon, pour le moment, elle n'a pas l'air de paniquer et s'agiter dans tous les sens, alors ça doit aller. Pas vrai? Non, elle en sait rien, elle en mène pas large, mais en sa qualité d'amie indéfectible, elle veille.

Enfin, comprenez, elle veille tout en faisant milles pirouettes à glisser dans un sens puis l'autre, à jouir d'une liberté parfaite dans son élément, comme pour montrer l'exemple. Comme pour inviter Céleste à la rejoindre, comme sirène appelle marin.

Elle ne remarque pas tout de suite que la vampire glisse de plus en plus hors de sa seule salvation, mais pas d'inquiétudes, ça viendra assez vite. Dès qu'il manquera quelqu'un dans la bouée, en fait. Ou quand ce quelqu'un commencera à paniquer.

J'ai dit qu'Olympe veille, mais comprenez bien qu'elle surveille plutôt, un peu de loin, un peu distraitement. Il lui faut même quelques instants pour remarquer que la bouée est vide, une petite seconde pour comprendre pourquoi, mais pas plus pour se hâter de tirer Céleste hors de l'eau avant que ses poumons ne fassent qu'un avec la piscine.

Bon, le sauvetage ressemble pas vraiment à ceux des films, la grecque se prend un revers dans la pommette dans le procédé, mais c'est certainement pas intentionel, elle lui en tiendra pas rigueur. Par chance pour Céleste, elle est indéniablement une grande nageuse, lui passe les bras sous les aisselles et lui tire au moins la tête hors de l'eau rapidement.

Avant de se permettre quelconque blague quand même, elle amène Céleste au bassin peu profond. Qui sait, peut-être qu'à force de gesticuler, elle découvrira qu'elle a pied. Elle ne la lâche pas même à l'arrêt, par contre, pour la rassurer. C'est clairement ce dont elle a besoin dans l'instant.

Ça, et de l'humour maladroit.

"Vraiment, je te laisse flotter deux secondes, tu parviens à tomber dans l'eau. C'est pas une phobie, Céleste, c'est une malédiction, t'as enervé des sorcières."

Riez s'il vous plaît, sinon elle se sentira seule. Enfin, jusqu'à ce que Céleste finisse de cracher l'eau qu'elle a avidement avalé pour lui répondre.