Watanabe Masami (type O)
2-chrōme-4-10 Minamiōtsuka
Toshima-shi, Tōkyō-to 170-0005
Il roule en boule le papier et la photo qui l’accompagnait dans la poche de son manteau. A 22h, la rue était déserte et Shôta avait décidé d’attendre dans l’ombre portée par le garage situé à côté de l’entrée. Il avait rejoint le complexe d’appartements, proche du Tokyo Metropolitan Otsuka Hospital, en 20 min depuis la station Tokyo.
A cette heure-ci, la ligne Marunōchi était encore bondée, ce qui rendait difficile le contrôle de sa faim devant tant de corps vivants. Mais ce soir, il avait un contrat, et ce combat interne contre sa bouche salivante derrière son masque chirurgical serait grassement récompensée.
Mission arrivée la veille de son départ, il n’avait pas questionné le mobile du meurtre, et à vrai dire, il s’en foutait. Il faisait le boulot, prenait la photo de la preuve, restait faire quelques loisirs ou un nouveau contrat, et revenait récolter la fin du ou des paiements. C’était l’avantage d’être un vampire, et d’avoir un estomac sans fond. Cette fois, il n’avait eu qu’une adresse. Il aura donc tout le loisir de choisir les victimes suivantes.
Pour l’instant, il s’ennuie comme un rat mort, il ne peut même pas surfer sur le net ni écouter de la musique, et il avait déjà terminé deux fois le Shōnen Jump acheté au 7-eleven sur la route.
Watanabe est un animal visiblement nocturne et le vampire poireaute depuis une bonne heure dans le froid avec la dalle au ventre quand il entend enfin des pas à l’approche. Il sort la photo de sa poche et jette un coup d’œil discret. La concordance est bonne et c’est avec une impatience contrôlée qu’il attend que la porte d’entrée commence se rabattre après le passage de sa prochaine victime. Chance devenue habitude, il accourt et coince le bout de ses Doc Martens juste avant le clic de fermeture.
Figé, attentif aux pas qui s'éloignent, il attend une bonne minute, tête cachée sous sa capuche et luttant contre son envie de sauter sur la personne dans les escaliers. C’est à la porte de l’appartement 307 qu’il attend encore pour s’assurer que personne ne viendrait l’accoster, puis, il toque.
Cœur à 180 bpm – toujours pareil même après 80 ans – il se prépare. La méthode est simple : filer un coup de Jump sur la tête puis faire le nécessaire pour remplir sa part du contrat sans éveiller la curiosité des voisin.es. Cela signifiait donc trainer un corps adulte jusqu’à la pièce principale où il aurait tout le “loisir” de se restaurer.
Choses qu’il n’a aucune difficulté à faire si la victime, bousculée vers l’arrière par Shôta dans son intrusion brusque, ne s’était pas assommée par un coup à l’arrière de la tête sur la petite marche de l’entrée.
Il regarde son exploit. Easy mode, pour une fois, c’est presque décevant, mais il ne crachait, dans ce cas, pas sur la facilité. Il n’avait plus qu’à trainer le corps inconscient, l’attacher à la chaise de bureau et le bâillonner avec du scotch de déménageur.
Sa respiration est rapide, chaude et humide dans son masque. Il a faim. Tellement faim. Ce corps évanouit est si obnubilant, si appétissant, qu’il oublie momentanément son environnement et la porte d’entrée qu’il a oublié de verrouiller. Son pas est lent, la semelle lourde sur le parquet. Il retire son manteau et son masque, dévoilant ses canines toujours sorties prêtes à croquer dans cette peau toujours chaude.
Il a si faim.
Il se fout des dégâts qu’il fera au décor. Le vampire préférait largement enfiler les vêtements de rechange stockés en boule dans son sac à dos que d’éponger le sang qui se sera échappé. Flemme.
De toute façon, il n’y a personne pour le déranger. Tout ça sera vite terminé. Attente si longue dans le froid pour quelques minutes de plaisir, mais cela valait tellement le coup qu’il voulait bien pardonner.
Mais il lui restait encore une obligation avant de manger. Il sort un deuxième bout de papier de sa poche. Un message du client à faire passer. Il n’a plus qu’à réveiller Watanabe. Un verre d’eau glacée fait bien l’affaire pour lui faire reprendre connaissance. Un grognement désorienté pas assez rapide au goût de Shôta qui y en ajoute un deuxième, puis un troisième pour être certain d’avoir pleine attention.
Bien. Maintenant il allait enfin pouvoir en finir.