I try counting sheep, but there's one I always miss
ft. @Louis WilsonEt hop.
Te voilà, perché sur le rebord de la fenêtre. Tu regardes cette dernière, comme admirant l’extérieur, alors que tu sais très bien que ce n’est qu’un écran. Ça t’arracherait presque un petit rire face à l’absurdité de la situation … Si tu n’étais pas aussi fatigué.
Si fatigué. Et ça se voit. Les cernes, la barbe mal rasée -habituelle, mais qui te donne étrangement un air plus négligé qu’à l’habitude, les vêtements froissés, les cheveux en bataille … Tu fais plus vieux. Plus usé. Dans ce genre de moment tu te compares souvent à ces vieilles chaussettes qu’on retrouve dans un fond de tiroir, usées mais encore utilisables. C’est bizarre comme comparaison, non ? Peut-être. Mais pour toi ça fait sens. Tu soupires, te frottant la barbe avant de laisser ton bras retomber un peu mollement. Tu balances tes pieds dans le vide en réfléchissant, les yeux balayant l’appartement de la coloc’. C’est silencieux, calme … Ça t’apaise. Et en même temps c’est normal, en plein milieu de la nuit. Tu jures entendre au loin le léger bruit d’un ronflement paisible et ça te tire un sourire un peu triste ; toi aussi, tu aimerais pouvoir dormir aussi paisiblement.
Sauf que non. Tu es bien réveillé, rongé par une énième nuit d’insomnie. Ça fait la combientième ce mois-ci ? Tu sais plus trop. T’as du mal à garder le compte avec la fatigue, le boulot, les patient·e·s, ta vie perso, tes tracas, tes regrets … Car pour une fois, tu sais pourquoi tu n’arrives pas à dormir. Le poids des regrets, ça fait du dégâts -et tu en payes les frais. Pourtant ça partait bien : tu es rentré un peu épuisé, mais pas suffisamment pour t’effondrer directement dans ton lit. Tu as discuté avec quelqu’un·e·s de tes colocs, tu as même préparé un petit truc à manger pour le lendemain. Tu as rangé tes affaires, tu avais prévu de te prendre un moment le lendemain matin pour t’occuper de toi et de ta barbe. Mais une fois la tête sur l’oreiller, tout dérape. Tu n’arrives pas à dormir, les images défilant sur tes paupières fermées contre ta volonté, et la frustration monte. Puis la culpabilité. La colère. Le dégoût. Et enfin, les regrets arrivent. Tu connais si bien cette situation, que tu as vécu, que tu vis et que tu vivras encore. En bref, ça te ronge.
Tu craques un peu sous la pression et te voilà à enchaîner les clopes -encore. Pourtant dans la coloc’, tu évites. T’as pas envie de gêner avec l’odeur et puis y’a des plus jeunes. Dans ce genre de moment, tu oublies qu’iels sont déjà mort·e·s et que c’est pas comme si c’était
réellement dangereux pour iels. Mais c’est ton côté vieux tonton, c’est un réflexe. La clope encore allumée, tu entends un bruit qui te sort de tes pensées. Ça te surprend, d’entendre du bruit à cette heure-ci. Et puis tu reconnais les pas, le petit « clac » et du coin de l’œil tu le vois monter. Tu laisses s’échapper un sourire.
« Tiens, toi aussi tu dors pas ? »Tu poses la question presque par politesse ; non, plutôt par réflexe. Évidemment que s’il est là, c’est qu’il ne dort pas. Tu commences à le connaître assez bien pour le savoir.
« Je pensais pas te croiser ce soir. Tiens, j’te fais une p’tite place. »Résumé
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La Tantine fait de l'insomnie parce que ça va pas fort, mais il est un peu "content" de voir son ami Louis débarquer