Autour d'un verre (Alarick Blum)

“Oui je sais tu es contente Zak, je sais. Mais tiens toi tranquille j’essaie de mettre le harnais!” En voyant l’animal ainsi agité il était assez difficile de savoir qui des deux était le plus excité concernant la soirée de ce soir. Alarick frotta doucement son doux compagnon derrière l’oreille gauche avant de venir se redresser. Ses genoux craquent, comme une personne toute singulière et il zieute la potion vide qu’il a abandonnée sur le bar. Il a préféré en prendre une autre, se mettre en sécurité avant de sortir le soir même. Aucune envie de redevenir le vieux tas de déchets devant Clément.

“Allez mon grand, on bouge.” Il attrape son téléphone, zieute l’heure sur ce dernier. Impressionnant, Alarick n’est pas entièrement en retard. Bon, il n’a pas une avance considérable sur ce qu’il désirait faire mais il ne se retrouvait pas obligé de prendre la voiture, il pouvait toujours se permettre d’utiliser les transports. Rick claque un bisou à Jules, lui promet de faire attention, lui promet de passer une bonne soirée et le voilà parti.

Pas friand des transports en commun, l’animal reste allongé entre ses jambes jusqu’à ce qu’Alarick le pousse doucement du pied pour lui signaler qu’ils arrivent à destination. Il saute hors de la rame et dans un magasin de fleur pour y récupérer un assortiment de pensées qu’il aime particulièrement, qu’il souhaite offrir à Clément. Son téléphone vibre dans sa poche arrière et il attrape aussi bien qu’il peut avec ses mains pleines.

Un sourire s'agrandit sur ses lèvres tandis qu’Alarick fredonne un petit air, ne prenant pas la peine de répondre sachant qu’il ne doit pas être à plus de 5 minutes de marche. Zakzak le tire avec autant de volonté qu’un homme pressé de voir sa dulcinée et Rick serait presque jaloux de la joie qu’éprouve l'animal d'en voir un autre. Peut-être est-ce dû à toutes les friandises qu’il lui file en douce… La cause à effet.

Il ne lui faut pas longtemps pour voir le jeune homme, jeune- un grand sourire s’étire sur les lèvres d’Alarick et il a du mal à contenir son sautillement de joie en voyant son ami. Il secoue la main jusqu’à arriver à ce dernier où il lui fourre les fleurs dans les mains. “C’est pour toi!” Encore une norme sociale défaillante. Il aurait pu attendre un court instant avant de le lui offrir! “Heu, coucou Clément! Comment tu vas?” Il souhaite le prendre dans ses bras mais maintenant qu’il vient d’y déposer le bouquet la place y est prise. Zakzak frotte affectueusement sa tête contre la jambe de leur ami commun et l’image fait sourire Alarick. “J’en connais un qui était tout aussi excité à l’idée de ce soir que ma personne!”

C’est incroyablement gratifiant d’avoir quelqu’un comme Clément dans son entourage. Il est doux, il a tout pour plaire et en autant d’années dans cet espace, il a toujours envie de donner à son prochain. Alaric est bien jouasse d’être le prochain de Clément, oubliant parfois qu’ils ont tant d’années d’écart. Il considère les gens en oubliant leurs âges, la notion n’a pas de sens dans leur nouveau monde, la société qui coule et découle.

Alarick sourit, regarde son ami interagir avec son animal, lui offre tant d’amour que le cœur de blondinet se fissure un peu plus et il apprécie que les gens aiment autant le soutien qu’est l’animal qui le suit en permanence. Il sourit, passe un doigt dans le collier. “Allez mon grand, laisse le un peu respirer.” Et comme à son habitude, boule de poils se calme pour permettre à Clément de retrouver sa posture. Alarick est maintenant celui qui a du mal à contenir sa joie, parce qu’il est presque aussi heureux que l’animal, grand gamin a qui l’on vient promettre la lune.


Il secoue cependant la tête, vient cacher nerveusement le rouge qui pointe sur ses joues. “Arrête, tu n’as pas besoin de m’offrir des fleurs pour exprimer tes sentiments! J’ai juste.. eu envie. Elles me faisaient penser à toi.” Il ne saurait dire pourquoi mais elles ont ce petit quelque chose de radieux, tout ce qui pourrait convenir à Clément et il est content d’avoir pu lui offrir quelque chose de si beau. Alarick lui ne saurait pas quoi faire de fleurs, il n’est pas bon pour garder quelque chose en vie, friand de les regarder disparaître. Enfin, friand, il aime à dire que du coup il le fait exprès mais il est juste totalement mauvais.

Il cligne des yeux, hoche la tête une fois, deux fois et une troisième en écoutant les questions de l’autre. Il ouvre la bouche pour y répondre avant de rigoler, de passer la porte du bar tout en grattant doucement la tête de l’animal. Il zieute l’entrée, zieute que personne ne lui demande de laisser l’animal dehors mais personne ne semble lui chercher un problème dans l’immédiat et il soupire doucement, descend la puissance de ses appareils avant de pointer une table du doigt et de s’y rendre.


Il se débarrasse rapidement de sa veste, se débarrasse de ce qui pourrait le gêner avant de demander doucement à un serveur s’il serait possible qu’ils aient un grand verre pour y mettre le bouquet. Il attend la validation de l’homme avant de venir poser son menton sur sa main, regardant Clément avec un petit sourire sur les lèvres. “C’est quand même incroyable d’avoir réussi à trouver un moment pour se capter. Jules est jalouse d'ailleurs. Elle dit qu’elle est un meilleur pilier de bar que ma personne.” Il rigole à ça, c’est certainement vrai. Mais Jules sait aussi le lien qui unit les deux hommes, elle a juste voulu l’embêter un peu. “Mais elle m’a dit de te dire bonjour. Et de te dire de prendre soin de toi. Quelque chose comme quoi tu prendrais pas assez soin de toi… J’ai été choqué d’apprendre que je n’étais pas la seule personne à penser ça.”

Il fronce faussement les sourcils, surprise simulée parce que si une personne devrait prendre bien plus soin de sa personne, c’est bien Clément.

Il n’est absolument pas rare dans la vie comme dans la mort d’Alarick d’avoir cru, espérer, considérer, des personnes comme des amis alors qu’ils n’étaient rien de plus que des ombres sur sa vie. Des rêves de mauvaises personnes et il en a vécu, bien des nombreux, à espérer, à voir, encore et encore, des rêves plein la tête. Dans le creux de sa tête, maintenant, chaque connaissance est un potentiel menteur, un de ceux qui désire le quitter dès que l'occasion se présentera. Et pourtant Alarick ne peut s’empêcher de croire, d'espérer et tout simplement de se donner entièrement dans chaque relation qu’il entreprend. L’idée manque de sens, tombe dans une idée qui n’a rien de logique et pourtant, certains pourraient peut-être la comprendre.



Parfois il a peur que Clément fasse partie de cette catégorie, une peur sans sens parce qu’il sait que ce n’est pas le cas. Lorsqu’il le voit interagir avec son animal, lorsqu’il prend du temps pour le voir. Toutes ces pensées vagabondes qui sont désagréables alors que l’homme essaie, agréable et doucereux.

Quatre. “Ce serait avec plaisir j’en suis sûr.” Si elle n’est pas encore en train d’essayer de draguer la veuve et l’orphelin. L’amour qu’elle porte aux autres la perdra. “Yep, ça marche!” Il rigole doucement à l’idée qu’elle hoche la tête comme pour dire qu’elle sait que Clément n’écoutera pas les conseils.

Alarick cligne des yeux cependant. Rigolo, il a un mode de vie tellement plus évolué que sa propre personne, tout est si bien cadré alors que la vie de l’allemand part dans tous les sens en permanence. Pour être honnête, il est habitué à ce que tout ce qu’il entreprend passe par mille situations possibles et les retournements de situations soient son activité principale mais il ne s’attendait pas à ce que celle de son ami soit si bien rangée. “Wow, okay. Un peu ironique que le conseil vienne de ma part du coup vu que tout semble si bien réguler chez toi.” Il penche la tête pour appuyer son point parce que pour dire la vérité, le rythme de sommeil d’Alarick est un peu quelque chose qui manque de sens.

“Jules ça va! Tu la connais, elle est assez comme toi, bien qu’elle s'enfouit sous le travail, elle est capable de faire une pause.” Il sourit, un grand sourire qui se veut innocent mais il zieute derrière Clément, avec l'espoir que le serveur arrive rapidement. “Pour ma part ça va aussi! J’essaie d’avoir un rythme de sommeil régulier…” Il ment, bien évidemment. Ces derniers temps ses nuits sont compliquées. “Le café est un super substitut alimentaire… En plus j’ai des supers dents regarde!” Il sourit de nouveau, comme pour montrer au dentiste son incroyable dentition.

Le serveur est finalement de retour et Alarick enfonce le verre contre sa bouche pour ne plus avoir à répondre aux quelques questions concernant sa santé qu’il laisse en permanence de côté.

Le geste le prend de court. Une vision qui lui fait froncer les sourcils. Il y a quelque chose de si bon chez Clément, quelque chose de si pur qu’il n’arrivera certainement à ne jamais revoir ailleurs. Les vieilles personnes sont supposément celles qui sont les plus sages et pourtant. Parfois Alarick pense, dans un instant comme celui-ci, où la poigne un peu rêche autour de son poignet est un rappel d’une gentillesse si pure- parfois Rick se demande pourquoi Clément perd du temps avec sa personne. Il devrait être ailleurs, avec tous ceux qui sont importants parce qu’il est tellement mieux que lui. Ce n’est pas une réalisation humiliante, il a accepté le fait si rapidement. Mais il n’ose le formuler, parce qu’il sait que l’autre ne voit pas la chose de cette façon.

Alarick repose doucement le verre, plaque un sourire un peu amer sur son visage avant de faire glisser son bras entre ses jambes, comme une peur d’être encore retenu. “C’est vrai.” Nerveux. “Tu as raison.” Il n’est pas loin de s’excuser, comme un gamin encore pris la main dans le sac. Il connaît ses torts, fervent défenseur de ces derniers.

Ses yeux suivent son geste et Alarick saisit la bouteille lorsqu’elle est posée devant lui. Une habitude un peu ennuyante, tandis qu’il zieute l’étiquette, qu’il vient nerveusement déchirer cette dernière pour la glisser entre ses lèvres. Le geste est une habitude, un terrible ennui mais il ne s’en rend presque pas compte. Souvent Jules tend la main, un petit recrache et seulement à ce moment il se rend compte de ce qu’il vient de faire. Un petit rire s’échappe de ses lèvres, comme s’il souhaitait se débarrasser de la sensation mais avant qu’il puisse dire quelque chose, Clément est déjà en train de continuer.

Son visage flétrit pendant les quelques longues secondes, son visage s’éternise et zieute. Clément sait pourtant. Les mots, qui sonnent presque comme des reproches sur la langue de ce dernier, il ne le vit pas comme il le souhaite. Le visage d’Alarick se ferme et quelque chose comme de la colère essaie de faire surface à l’intérieur de son corps. De la colère, peut-être beaucoup de honte. Ses dents sont serrées et il n’a pas l’habitude de ressentir ce genre de sensation mais quelque chose de si faux résonne à l’intérieur de lui et aux longs monologues de Clément, Alarick n’a que trop peu à lui répondre.

“Ce corps n’est pas le mien Clément, le mien tombe déjà en lambeaux.” Le sien n’est qu’un ramassis de choses qui ne tiennent plus, une mâchoire au sol et des oreilles distordues. Il n’est rien sans des potions de toute façon. Peut-être qu’il prend tout ça à la légère, peut-être qu’il sait qu’il ne lui reste plus si longtemps et il accepte l’idée aussi ironique soit-elle. “Je- j’ai besoin d’une minute.”

Il repousse la chaise, se lève bien trop rapidement, un regard envers Zak, il pointe le sol. “Reste avec Clément, mon grand.”  Il zieute une dernière fois son ami avant de se diriger vers les toilettes. Alarick pousse la porte avec un soupir, les yeux plantés sur son propre visage. Est-ce qu’il a l’air aussi fatigué que ça? Peut-être, peut-être qu’il n’a pas l’air d’être aussi incroyable qu’il le pensait.

Un soupir échappe encore ses lèvres et il lui faut un moment pour passer son visage sous l’eau, pour essayer de retrouver un semblant de conscience. Clément est son ami. Son ami proche, est-ce pour cela que ça fait si mal? Il faut retourner à la table. Il faudrait.