C’est son tour, cette fois-ci et bien
malheureusement. Être d’astreinte est généralement une promenade de santé après tout qui irait s’introduire dans une bibliothèque de nuit pour, mettons, voler quelques livres ? C’est beaucoup d’efforts pour un résultat plutôt ridicule. Risible, même. Et cela vient d’une personne passionnée de livres et qui en a écrit un certain nombre. Comme à son habitude, Guillaume avait gardé son téléphone allumé pour la nuit, chose qu’il ne fait que quand il est de garde -ou bien lorsqu’il attend quelque chose en lien avec son autre travail. Il n’aime pas être dérangé pendant son sommeil et avec les siècles qu’il commence à accumuler il a besoin de ses huit heures pour ne pas être grognon. Ou pour ne pas gâcher ses entraînements et finir rouillé, aussi. Mais la vie a parfois un drôle de sens de l’humour et il s’est retrouvé à être réveillé en pleine nuit par un appel.
L’alarme a sonné.
La question d’envoyer ou non quelqu’un pour vérifier sur place.
Il a soupiré, se frottant le visage, avant de confirmer qu’il y allait. Peu de choses lui font réellement peur et il se sent suffisamment sûr de lui-même pour gérer un·e intru·e. Ou deux. Voir trois, quatre si besoin. Lampe de poche dans un sac, il s’est rendu rapidement sur place -merci la vie nocturne tokyoïte et ses transports qui ne semblent jamais s’arrêter. Il est plutôt sûr que si quelqu’un s’est introduit il y est toujours. C’est l’avantage des alarmes silencieuses qui envoient des signaux sans alerter quiconque serait assez bête pour s’infiltrer de la sorte. Il rentre par l’entrée par commodité, désactive le panel de l’alarme avant d’avancer dans la bibliothèque. Il fait sombre et même avec ses lunettes il n’est pas tout à fait sûr d’y voir suffisamment mais il s’en contentera.
Il n’a pas à chercher longtemps. Un bruit l’alerte rapidement ; ses yeux sont peut-être fatigués mais son ouïe est toujours aussi fine. Il avance prudemment mais sans être discret, la lampe torche dans la main, éclairant ce qui se trouve devant lui. Il s’attendait à y trouver un voleur, ou quelqu’un qui se réfugie du froid, mais ce qui l’accueille est bien plus étonnant. Deux grands yeux, terrifiés, surpris.
Ceux d’Huia.
Une des jeunes vacataires de la bibliothèque. Le voilà qui souffle en baissant la lampe torche pour éviter de lui éblouir les yeux plus longtemps que nécessaire.
« Oh, euh, bonsoir Guillaume.
Bonsoir Huia. »Il se frotte le dessus du nez, juste entre ses deux yeux qui transpirent la fatigue, celle d’un homme qui a dû se réveiller en pleine nuit. Et qui aurait préféré rester au chaud sous les couvertures, de loin.
« Je fais des heures sup.
C’est fort aimable de ta part, jeune demoiselle. »Le ton n’est pas forcément désagréable mais il est moralisateur ; les années -non, les décennies d’expérience en tant que père s’entendent dans la voix de Guillaume. Il soupire de nouveau avant de s’asseoir et se poser en tailleur près d’Huia, gardant cependant une distance acceptable. Si elle essaye de fuir, elle n’est qu’à une portée de main et la retenir sera bien trop facile -malheureusement pour elle. Il pose ensuite la lampe au sol, ce qui éclaire suffisamment pour qu’il puisse voir son visage et inversement. Un petit coup d’œil en direction de la couette.
« Je vois que tu as l’air bien installée. J’aurais bien aimé pouvoir rester aussi sous la couette. Tu es au courant qu’il y a une alarme ici, n’est-ce pas ? »Petit silence.
« Une alarme silencieuse. Mais une alarme quand même. Alors dis-moi, Huia, qu’est-ce qui a bien pu te passionner à ce point pour que tu veuilles faire des "heures supplémentaires" comme tu l’as si bien dit ? Mmh ? »Résumé
635 mots
Guillaume débarque parce qu'il est d'astreinte et il est ravi (non) de voir Huia bien installée qui bouquine en pleine nuit