L'essentiel :
Vocabulaire :- Vie alternative = fractale
- Personne réelle hors de sa fractale = hôte
- Version de l'hôte dans la fractale = alter (ego)
Caractéristiques :- Une fractale ne peut avoir lieu que durant le sommeil ou au cours d'un état de transe.
- Il est impossible de se rappeler de l'entièreté d'une fractale, au même titre que l'on ne retient pas tout de sa propre vie.
- Comme un rêveur qui n'a pas conscience qu'il rêve, un hôte n'a pas conscience de devenir un alter au moment où il plonge dans une fractale. Il n'y a pas de notion de "lucidité".
- Le temps dans une fractale est accéléré.
Conversions du temps :- 2 secondes réelles = environ un jour entier ressenti.
- 1 minute réelle = environ un mois ressenti.
- 12 minutes réelles = pratiquement un an ressenti.
- 1 heure réelle = presque 5 ans ressentis.
Avantages (pour Basil) :- Excellente mémoire sémantique
- Boost de la mémoire procédurale
- Possibilité de conserver des connaissances acquises dans une fractale
- Probabilité via une fractale d'apprendre à connaître par avance une personne présente dans la réalité
Contrecoups passifs (pour Basil) :- Troubles de la mémoire épisodique
- Troubles du sommeil
- Déréalisation, dépersonnalisation
- Confrontations multiples au deuil
- Sensations rémanentes temporaires (bijou constamment porté, douleur du membre fantôme...)
- Surcharges sensorielles
- Absences
Contrecoups d'excès d'usage volontaire (pour Basil) :- Migraines (+ 4 fois/semaine), avec aura s'il y a persistance à utiliser le pouvoir (+ 2 fois en ayant déjà une migraine)
- Épuisement mental pouvant conduire à la perte de conscience (+1h30 ininterrompu si en pleine forme, +10 min si très fatigué.)
- Favorisation du développement d'un syndrome confusionnel (usage durant un épuisement ininterrompu depuis +3 jours)
- Risque accru voire inévitable de contracter le Suppresseur (usage durant phase d'épuisement +/- constant sur +7 jours)
Avantages pour un hôte (sur autrui) :- Acquérir rapidement des connaissances
- Vivre une réalité jusqu'alors fantasmée
- Expérimenter un choix de vie différent
- ...
Risques classiques en cas d'abus pour un hôte (sur autrui) :Risques en cas d'erreur de la part de Basil (sur autrui) :- Endommagement superficiel du tissu cérébral
- Déclenchement d'une crise d'épilepsie
Basil est en mesure d'incarner une infinité - a priori - de versions alternatives de lui-même, durant son sommeil paradoxal comme durant ses rêves éveillés. Cool, un nouvel
isekai tous les soirs ! Voici ce que crierait un
otaku naïf. La vérité, c'est qu'un seul cerveau pour traiter plusieurs siècles d'informations mémorielles issus de centaines, peut-être de milliers de "Basil" ayant eu le temps de conter leur histoire chaque nuit, c'est une véritable purge.
Pour simplifier ses explications quand il doit parler à un
client, Basil appelle une vie parallèle ou un fragment de vie parallèle une "fractale", ledit client un "hôte", et sa version alternative évoluant dans la fractale un "alter ego" ou "alter", tout simplement. Par conséquent, autant utiliser ces termes à partir de maintenant.
Il n’est pas possible de garder conscience du fait d’être dans une fractale tant que celle-ci est vécue. L’incarnation de l’alter est complète, la coupure avec la réalité extérieure demeure nette jusqu’au réveil, après lequel il sera impossible de conserver une mémoire absolue de ce qui s’est passé. Les souvenirs qui resteront ancrés vont généralement être ceux relatifs aux connaissances durablement acquises, aux liens tissés, et ceux qui ont marqué émotionnellement l’alter. Les souvenirs effacés sont quant à eux, sans surprise, relatifs à la naissance et à la petite enfance, aux événements anodins du quotidien, et parfois aussi ceux qui ont été dégradés par un traumatisme ou une maladie contractée dans la fractale. En somme, c’est l’expérience d’une nouvelle vie, et son bilan incomplet est donc normal.
Le temps dans une fractale est extrêmement accéléré, car il s’appuie sur la vitesse de pensée. Basil peut fermer les yeux pour rêvasser cinq minutes, et les rouvrir après avoir passé presque un semestre dans la peau d’un alter plus ou moins schizo enseignant la littérature anglaise dans une fac sur une île paumée qui n’existe même pas réellement. Alors quand il s’accorde une pleine nuit de sommeil… Il a le temps de naître, de grandir, de vieillir, de mourir. D’ailleurs, cet évènement le réveille obligatoirement. Comme si la mort marquait une fin inéluctable, ha ! elle est bien bonne celle-là.
Mais en y réfléchissant, c’est assez vrai. La moitié d’un millénaire n’a pas suffi à ce qu’il puisse incarner plus d’une fois un même alter. Y compris s’il n’a pas eu le temps de parcourir l’intégralité de la fractale de ce dernier. Ça arrive s’il est réveillé de force dans sa réalité. Bien sûr, il a épluché tout un catalogue de variants parfois tellement similaires les uns aux autres que la différence entre eux se résume à un choix de cravate pour un entretien d’embauche. Qui n’aura aucune incidence par la suite. Ou bien qui, à l’inverse, remettra l’intégralité de son existence en perspective. Car c’était la
cravate magique. Quoi que cela veuille dire.
Il ne faut pas forcément s’attarder sur la logique après coup. Certaines fractales répondront à des lois de la physique identiques à ceux que Basil connaît de sa réalité. D’autres, plus rarement, renverseront jusqu’aux règles les plus élémentaires. Il ne faut pas non plus y chercher des prémonitions, car le principe des parallèles, c’est de ne jamais se croiser. La seule constance, c’est la présence de l’alter, qui lui ne devrait pas questionner la cohérence de son monde. Le reste, c’est au petit bonheur la chance.
Il note cependant que côtoyer certaines personnes augmente la probabilité de les recroiser dans ses autres vies, avec un physique et un caractère similaire la majorité du temps, à quelques exceptions près. Par conséquent, il lui arrive de connaître ses clients et ses employés d'une manière qui lui est propre, en ayant fréquenté de nombreuses versions alternatives de ces derniers. S'il te dévisage au point que tu te demandes si tu as de la salade entre les dents, ou pire, s'il te traite de manière familière et qu'il paraît carrément capable d'anticiper certaines de tes réactions alors que c'est votre premier échange, c'est qu'il t'a déjà
rencontré.
Ok, alors… Outre ce dernier point qui pourrait tout aussi bien être du mentalisme inconscient, en gros il rêve, en fait. Pas la peine d’utiliser des termes spéciaux, tout le monde rêve, non ? Certes, sauf que le principe d’un rêve, c’est qu’à moins d’être particulièrement marquant, il finit par être évacué de la mémoire, n’ayant a priori aucun rôle à jouer en dehors de la phase de sommeil paradoxal. Il n’est pas censé être traité comme on le ferait pour de véritables souvenirs, vécus dans la chair et dans les os, n’est-ce pas ?
Ce concept de séparation des réalités, les fractales s’en carrent. D’ailleurs, l’alter, il peut rêver, lui aussi. C’est une parodie d’Inception le bazar. Basil n’a encore jamais rencontré l’un d’eux manifestant les mêmes facultés que lui, or si cela devait arriver, le nom qu’il donne déjà à son pouvoir n’en serait que plus approprié. Il n’est toutefois pas convaincu que la blague resterait drôle bien longtemps avant qu’il n’en pâtisse.
Son identité est déjà pleine de fissures. Quand bien même, rationnellement, Basil sait qu’une vision de lui âgé de 74 ans, vétéran des deux Guerres Mondiales, fêtant ses noces d’or sur une gondole à Venise, ne peut s’inscrire dans la réalité qu’il expérimente, les sentiments qui ressurgissent quand il y repense sont tangibles. Son cœur se serre à nouveau, étreint par la tristesse d’un amour perdu, qui tenait sa main dans la sienne pour atténuer les tremblements de la vieillesse, embrassant ses paupières closes… jusqu’à ce qu’il rouvre des yeux humides sur le plafond de sa chambre, avec pour seule compagnie la sensation rémanente d’une alliance qu’il n’a jamais portée.
Les
vrais faux souvenirs sont des bris qui s’accumulent, qui ne peuvent être recollés ensemble car ils ne se correspondent pas. Les temporalités des différentes fractales se superposent, anachroniques ; les rencontres qu’il a faites sont tant d'incidents morcelés entre les réalités qu’il ne sait pas toujours lesquels sont canoniques. Il en vient à penser qu’aucun des regards que peuvent lui renvoyer deux miroirs l’un face à l’autre ne sont le sien. Ses alter sont tous là, même les prochains dont il devra faire le deuil. Il n’est pas juste un fantôme : il est son propre cimetière. Sa mémoire épisodique en souffre, et son esprit tombera sûrement en poussière avant son corps.
Malgré tout, son cerveau s’adapte comme il peut ; ce qu’il perd en mémoire autobiographique, il en gagne en mémoire sémantique. Le savoir encyclopédique qu’il engrange à travers les fractales, il a des facilités à le retenir par la suite, puisqu’il a vécu leur apprentissage. De plus, apparemment, la fréquence du surplus d’activité électrique généré par l’activation de son pouvoir au cours de la nuit est bénéfique pour sa mémoire procédurale. Ça n’est clairement pas suffisant pour apprendre la lyre dans son sommeil via une fractale où il était barde. Mais ça l’aide sans aucun doute à rester doué dans la pratique des instruments qu’il connaît déjà, et à intégrer plus rapidement les bons gestes pour préparer ses potions… ce qui pallie les piètres performances de sa mémoire de travail.
Alors peut-être bien qu’à terme il ne sera même plus capable de se souvenir d’aucun voyage, d’aucun proche, ni même de son propre prénom. Mais à la place, il pourrait retenir via ses alters toutes les langues qui se parlent et s’écrivent sur Terre. Histoire d’être capable de jouer du violon dans n’importe quel pays où il se sera perdu faute de se rappeler d’où il vient, contre un petit Øssement pour le remercier du spectacle. Hourra.
Mais toutes cette charge mentale et le mal-être qu'il couve, il ne l'évoque guère aux premiers venus, un œil extérieur ne les verra pas. Il suffit même que cet œil soit celui d'un opportuniste pour qu'il soit aveuglé par la perspective de profiter d'un trip en haute définition, de défier l'adage "on n'a qu'une vie" encore et encore, le tout sans bouger d'un fauteuil pendant quelques minutes. C'est une idée qui peut séduire également quelques curieux ayant trop regardé Le Monde de Narnia. Et ce n'est pas Basil qui va les contredire si ça lui permet de mélanger expériences douteuses et business. Parce qu'au fond, il garde ce besoin avide de
comprendre, de trouver un
sens. Quitte à explorer les limites de sa pauvre psyché fractionnée, et disséminer quelques traumatismes dans celle d'imprudents cobayes.
Quand il utilise son pouvoir sur quelqu’un d’autre, il doit se focaliser tout entier sur l’opération afin de maîtriser au maximum la vitesse à laquelle le temps s’écoule pour l’hôte, car le réseau synaptique de ce dernier n’est pas habitué à une telle activité électrique et ne peut la réguler de façon autonome. Celle-ci est initiée par le contact de la paume de Basil directement sur la tête du
client, pendant que celui-ci est soit endormi, soit en transe. Pendant toute la durée de l'usage de son pouvoir, il garde les paupières closes, n'observant qu'un silence religieux. Il arrive à stabiliser cette vitesse du temps qui passe à environ douze heures ressenties par seconde réelle, soit un mois comprimé en l'espace d'une minute.
Basil refuse de dépasser le quart d'heure d’usage d’affilée sans le soutien d’un rituel de concentration. Et dans tous les cas, il n’excédera jamais les soixante minutes, même d’une seule seconde. Ce n’est pas que ça lui est impossible : en théorie, il pourrait pousser l’expérience plus loin. En pratique, il estime que c’est la limite "saine" à imposer, tant pour lui qui soutient un effort mental épuisant, que pour le cerveau de l’hôte qui pourrait bien d’une certaine façon griller sous l’intensité prolongée de l’exercice, en particulier si le praticien se loupe et relâche son attention. Parce que bon, oui, le rituel, tout ça. Mais si la fatigue lui fait perdre connaissance dans le cercle, Poltergeist pour l'assister ou pas, y a plus de concentration qui tienne, hein. Il suffit que la main de Basil reste au contact de l’hôte une seconde de trop alors que le contrôle est perdu pour que ça vire en barbecue de neurones.
Que viennent vraiment chercher ceux qui sont prêts à laisser leur encéphale en pâture à cet huluberlu notoire, alors qu'il pourrait juste le faire frire s'il est distrait par le vibreur de son téléphone ? Pour leur défense, ils ne sont pas tout à fait au courant du risque. La politique du bonhomme, c'est "pas d'accident ? Pas de problème". Et puis, l'offre est enjolivée et partiellement laissée à interprétation personnelle. Les impatients sont séduits par l'occasion de développer bien plus facilement une compétence qui normalement prend des années à s'affiner, les anxieux souffrant de FOMO y voient l'espoir de rattraper ce qu'ils pensent avoir manqué, un mari infidèle se conforte dans l'idée qu'avoir une aventure de cette façon, ce n'est pas vraiment tromper...
Basil leur promet de trouver la fractale la plus proche de leurs désirs, ce qui n'est pas une mince affaire puisqu'il n'a encore trouvé aucun moyen d'être témoin de ce qu'il déclenche. Il s'aide d'une documentation toute personnelle de tout un tas d'aliments à consommer, d'environnement à privilégier, de type de fréquentations à avoir ou de comportements à adopter avant de dormir/de méditer pour obtenir des expériences de vie particulières. Mais ce qui a pu marcher pour lui ne fonctionnera parfois pas pour d'autres, sûrement parce que chaque individu est intrinsèquement différent.
Et en cas d'échec ou d'insatisfaction, eh bien... D'ordinaire, ça arrive pendant l'essai gratuit ; si ça n'a rien coûté monétairement, il ne s'embêtera pas à faire le service après-vente. Comment ça, c'est malhonnête ? Au moins il ne transforme personne en zombie. Il offre même une alternative
censément moins nocive. Du moins, tant qu'il n'est pas possible d'associer formellement son pouvoir à l'induction une dépendance chez certains profils, lesquels constituent pour beaucoup le fond de ce commerce en marge de son activité principale. Comme s'ils ne pouvaient plus se contenter de revenir à leur routine.
En règle générale, il se restreint à une utilisation de son pouvoir sur autrui par semaine, pendant maximum quinze minutes. Si jamais il accorde davantage à un hôte et qu’il fait donc appel à un Poltergeist, – sans dépasser une heure –, il s’accordera ensuite une quinzaine de jours de repos minimum, sans réitérer la moindre expérience volontaire. Cette limite est inférieure à son endurance réelle, justement pour ne pas tirer sur la corde. Les céphalées classiques voire les migraines avec aura, ce n'est pas franchement marrant, et il se maudit déjà bien assez quand il oublie de refuser un client à la demande énergivore, alors que la pleine lune est en approche.
Cette astre exerce une influence qu'il juge pénible sur sa capacité à récupérer en dormant, ainsi que la puissance et la maîtrise de son pouvoir. Il en perd fréquemment le contrôle durant les treizième, quatorzième et quinzième jours du mois lunaire, des visions furtives de fractales incomplètes se multipliant en journée dès que son esprit s'évade un peu. Le reste du temps, s'il prend certaines précautions, voire s'impose un protocole avant de se coucher, il peut passer des nuits normales, et prévenir les somnolences problématiques.