tw; blessureT'as l'habitude de faire la demeurée -
d'être demeurée, à ce stade. Tu es une plaie, ou un insecte qu'on se tue à arracher de sa peau. Tu te propages dans les rues de Tokyo telle une maladie, tu choisis tes prochaines victimes, tu décides de ton propre destin, tout simplement.
Eh bien le destin, parfois, il te la met à l'envers.
Résumons la situation : tu as découvert ce petit coin, récemment, qu'on appelle un skate park. Un endroit que tu aurais détesté de ton vivant - tous ces jeunes tellement plus populaires et doués que toi, qui font leurs intéressants, le genre de personne à se moquer de toi dans les couloirs du lycée. De les fuir, tu es passée à essayer d'avoir leur attention. Non, bien plus que ça : tu as cherché à les impressionner, c'est vrai.
La bande sur laquelle tu t'étais jetée comme un vampire affamé s'est révélé être bien plus sympathique que prévu. Certains étaient très jeunes - de si petits fantômes, ça te pince toujours le coeur quand tu te rappelles qu'en fait, tout le monde est mort, ici.
Alors ouais, t'as, comme qui dirait, traîné avec eux cet après-midi. Tu n'irais pas jusqu'à dire que tu t'es amusée (parce que tu es une menteuse). Ils t'ont appris des tricks sur leurs skates, et tu aimes penser que tu t'es bien débrouillée.
Mais tu ne peux pas oublier cette douleur aigüe, brûlante même, qui transperce ta cheville gauche. C'est rien, c'est normal d'avoir mal après la méchante chute que tu as faite devant tout le groupe et qui te rend rouge de honte rien qu'à y repenser.
C'est rien. Ca va partir. Le temps de retourner chez toi, maintenant que la nuit est tombée, tout ça sera oublié. C'est anecdotique. C'est-
Tu t'écroules. Bordel, qui a décidé qu'une si petite partie de ton corps pouvait faire si mal ?
En position foetale, tu cherches une solution. Tu douilles trop pour te relever, c'est que ça doit être grave, mais tu essaies de ne pas y penser, ou tu vas vite angoisser. Tu détestes l'admettre, mais il te faut quelqu'un. Un héros qui volerait à ta rescousse.
A défaut d'avoir le numéro de Spiderman, tu appelles la seule personne que tu ne t'en voudrais pas de déranger. Cet homme... original, qui a déjà sauvé ta peau une fois, quand les associations d'aide aux nouveaux morts étaient à tes trousses. Le genre d'adulte tellement doux que ça te fait les détester. Son sourire niais, quand il t'a donné son numéro en t'assurant que tu pouvais l'appeler au moindre problème... Ca te fait grincer les dents, mais t'as pas beaucoup de choix.
Ca sonne. Miracle, ça décroche.
HAZEL —
J'ai déconné. Tu peux venir me chercher ? J'suis au skate park.
Et depuis, affalée contre un banc, tu attends ton sauveur.