You know that if it hides, it doesn't go away ft. Céleste

« C'est poétique. »

Le visage de Wynn s’illumine très légèrement. C’est faiblard, mais perceptible quand même. Lui qui aime tellement sa langue maternelle, il se radoucis facilement dès qu’on la complimente. Et que ça soit sincère, ironique ou autre lui passe au-dessus ; il n’est pas très doué pour comprendre ce genre de subtilités. Surtout venant de personne comme Céleste.

« Ce n’est pas tant au-dessus de mon épaule que c'est devant moi, au milieu de l'écran.

Je n’ai quand même pas souvenir que ça puisse te laisser un passe-droit pour lire ce qui y est affiché. Je vais mettre ça sur le compte d’un œil qui traîne un peu trop. »

Une façon plus ou moins polie de lui faire comprendre qu’il ne lui en tient pas rigueur … Pour cette fois. Wynn n’est pas spécifiquement de bonne humeur, mais la réflexion de Céleste et son aide ont suffit à calmer totalement sa colère montante et à le forcer à se sentir … Au minimum redevable de ne pas lui infliger la mauvaise humeur habituelle du vampire. Ça ne lui ressemble pas, de prendre autant sur lui pour quelqu’un d’autre mais après tout, tout le monde évolue.

« Ça n'est pas comme si je peux faire grand-chose de cette information.

Et si tu pouvais en faire quoi que ce soit, qu’est-ce que tu en ferais ? »

Bon. Peut-être que cette phrase sonne un peu plus accusatrice déjà. Difficile de savoir s’il est réellement curieux -un peu, ou si simplement c’est sa manière de réprimander Céleste sans le montrer -un peu aussi. Il ne connaît pas beaucoup Céleste mais les bruits de couloir et l’avoir fréquenté quelques temps ont suffit à faire comprendre à Wynn qu’il vaut mieux, effectivement, ne pas laisser traîner la moindre information trop sensible en sa présence.

« La boolice me paye, elle. »

Wynn roule discrètement des yeux. Il est bien payé par la Camarilla, alors il ne comprend pas ce qu’elle sous-entend par là. Peut-être qu’elle est mieux payée par la Boolice ; ça n’intéresse pas beaucoup Wynn. Il n’est pas forcément très proche ni très ami avec eux après sa période de travaux d’intérêt généraux. Alors il soupire, et fini par réduire ce qui est ouvert sur ton PC avant de se tourner définitivement vers Céleste, laissant juste le bureau et son fond d’écran affiché.

« Blague à part, je coopère souvent avec l'association. C'est simplement gérer de manière plus officielle.

Je comprends mieux pourquoi il m’arrive de te voir encore dans les couloirs de la Camarilla. Ce n’est pas … Compliqué, de devoir gérer deux emplois ? »

Serait-ce encore de la curiosité de la part de Wynn ? En tout cas, ce n’est sûrement pas une tentative de sociabiliser ou même de se rapprocher de Céleste ; il a déjà assez à gérer comme ça avec ses collègues pour s’en rajouter.

« J'ai lu ce qu'il y avait à l'écran pour t'aider, ni plus ni moins. C'est difficile d'aider une personne sans aucune donnée, tu sais ? »

Il n’a pas envie de répondre ; pas besoin d’être doué socialement pour comprendre que Céleste ne fera que répondre par questions. Wynn se contente de hausser les épaules. Encore une fois ; s’il n’a rien à dire il ne dira rien. Mais étrangement, sa jambe s’agite légèrement. Est-ce qu’il se sent stressé ? Pas vraiment. Il n’arrive pas à mettre le doigt dessus mais il se sent subitement un peu trop « enfermé » avec Céleste et, de manière compréhensible, ça ne lui plaît pas beaucoup.

« Rien, comme je disais.

Mmh. »

Le silence s’installe de nouveau avant qu’il soit brisé par leurs voix respectives. Wynn semble subitement comme se détacher, toujours assis dans son fauteuil les mains croisés et la jambe qui s’agite. Est-ce qu’il lui demande de partir ? Peut-être que ce n’est pas très poli. Mais en même temps il ne sait plus quoi lui dire sans risquer de déclencher une énième dispute ou accrochage.

« Pourquoi ce serait complexe ? Ça n'est pas comme si je le cache.

Alors. Pour le coup je pensais plus … En termes d’emploi du temps. Deux emplois c’est deux fois plus de travail … Et deux fois plus de problèmes, aussi. »

Il soupire. Il repense à son poste actuel et il se dit que s’il devait en plus de ça travailler pour quelqu’un d’autre comme la Boolice, il ne tiendrait pas le coup. Oh bien sûr, il est loin d’être aussi épuisé que quand il travaillait dans les mines … Ou en tout cas il pense que c’est moins épuisant. Les souvenirs de cette époque sont flous après tout. Il se racle la gorge ; pourquoi il s’intéresse à ce qu’elle fait et à son emploi du temps ? Peut-être qu’au fond, il est simplement ... curieux. Curieux de savoir comment ça se passe là-bas. Même s’il n’est pas très ami avec la Boolice, il sait qu’il finira bien par les recroiser un jour dans le cadre du travail.

« Il y a rarement des conflits d'intérêts entre les deux. Parfois je ramène un vampire à la Cama pour qu'il explique deux ou trois choses, avant de l'emmener au poste.

Ah, c’est donc ça. »

Il se rappelle d’avoir vu récemment Céleste dans les couloirs avec un vampire … Avant de ne plus avoir revu le dit vampire en question. Et ça ne l’étonne qu’à moitié ; quand il est passé devant la justice il n’y avait pas encore Céleste. Alors il s’était porté lui-même à la Camarilla avant de terminer derrière les barreaux. Il n’aime pas se rappeler de cette époque, celle où il était encore … Instable. Plus qu’aujourd’hui, en tout cas. Sans s’en rendre compte, il se met à jouer avec son stylo alors que sa jambe tremblote plus que jamais.

« Dans tous les cas, je t'assure que tu veux rester discret dans le monde des vivants. Je n'ai pas envie de passer derrière une connaissance.

Si je peux t’assurer de quelque chose en retour, c’est que je n’ai pas prévu de revoir la Boolice pour ce genre de situation. Alors je doute que tu ais à passer derrière moi un jour. »

Peut-être que c’est le stress, l’inconfort ou bien le malaise mais Wynn ne semble pas se rendre compte de ce qu’il vient de dire et de l’info qu’il vient de lâcher malgré lui.

« C'est là ou tu te trompes : ça n'est pas un deuxième emploi. J'assiste parfois, mais c'est plus en tant que freelance, d'une certaine manière. »

Pour Wynn cela revient au même. Freelance ou pas, ça reste un deuxième travail et donc deux fois plus de problèmes. Et de collègues potentiels. Il faut croire que là-dessus, Céleste et lui ne partage pas du tout la même vision de la chose ; comme sur beaucoup d’autre sujets d’ailleurs. Il n’a pas envie de débattre surtout qu’il sait d’avance que ça ne changera rien. Peut-être qu’il peut paraître défaitiste et lâche, il voit plus ça comme accepter que Céleste … Restera Céleste.

« Excellente nouvelle.

Pour une fois le sentiment est partagé. »

C’est rare, mais ça arrive. Apparemment.

« Et tu peux toujours venir me voir si tu as une question.

Je note. »

Il se lève de son siège, sans dire un mot de plus. Car la première pensée qui lui a traversé l’esprit lorsque Céleste lui a dit ça, c’est qu’il préfère mourir une deuxième fois. Mais il se retient, par politesse et par sympathie puisqu’elle l’a aidé. Pas de bon cœur, clairement, mais ça ne change pas grand-chose au geste en lui-même. Sa phrase sonne aussi comme un début de départ, ce qui arrange le vampire.

« Est-ce que tu as encore besoin de moi, ou tout est bon pour l'instant ?

Ça ira. Tu peux y aller. »

Il a épuisé son quota de « merci » pour la journée. Il s’avance, passant à côté d’elle avec une marge raisonnable et lui ouvrant la porte. Il la regarde sortir et pas un seul autre mot ne sera échangé. Tant mieux, car il se sent pas mal épuisé après tout ça. Il referme la porte derrière elle avant de soupirer longuement. Pourquoi est-ce qu’il attire aussi facilement des gens aussi agaçants ?

Au moins, son problème de la journée est réglé. Pour l’instant.