[FB 1983] What a surprise | Ginny & Louis

Il secoue sa main, éteint l’allumette dont la flamme allait doucement lui brûler les doigts. Il inspire alors lentement, sur cette pipe en bois fumante, nouvellement allumée - et un souffle, par le nez.

Les retours sont toujours un peu difficiles.
Ailleurs. Il n’aime pas vraiment s’empoisonner avec l’air extérieur.

Une poignée de main pour remercier son collègue du moment, qui l’aura accompagné lors de cette dernière sortie, avant de se séparer. William est membre de la Camarilla, il retourne alors dans les bureaux de l’association, faire un drôle de rapport - qui a été mordu par les deux vampires, afin de voir s’il est possible de les retrouver avant que ces personnes ne se perdent dans les rues de Tokyo, sans savoir quoi faire ni où aller. Louis le laisse bien à ces vagabondages. Non, lui préfère rentrer, passer sans procès à l’horlogerie.

Camille l’y attend, son regard bleu planté dans une montre ouverte.
Sans plus le déranger, Louis lui offre un baiser sur le haut de la tempe.

“Cette sortie ?”
“Hm, classique. Deux morsures, je me suis loupé sur le premier.”

Camille lui lance un sourire et un regard moqueur, derrière ses verres grossissants, et une petite tape sur la main. Une moue vexée sur le visage, Louis pose le menton sur la tête de son amant, observant par la même la montre et ses engrenages, aux bons soins des doigts habiles de l’horloger en chef. Ah, il le sait, il va probablement rester ici cette nuit.


Le voilà le lendemain, début d'après-midi, à repasser par les locaux de la Camarilla - prévoir sa prochaine sortie, afin de lui éviter la soif trop tenace des vampires, dans quelques trois à quatre mois. En compagnie peut-être de William, si ce dernier n’a pas de jeunes à amener avec lui pour leurs premières sorties. Il hausse les épaules à cette annonce, Louis - il apprécie ses sorties avec William, néanmoins il est parfaitement capable de sortir seul depuis maintenant quelques années.

Il en ressort, allume sa pipe.
Et la fumée bleutée qui s’échappe dans l’air.

“Oh.”

Oh, car il te voit et c’est une surprise à ne pas mentir. Louis a pris l’habitude de ne jamais croiser de nouveaux ses victimes - iels se perdent dans la ville avant qu’il ne rentre, et tout est tellement grand qu’il n’en entend plus jamais parler. Mais là et maintenant, c’est toi, le premier sur lequel il s’est loupé.

Tu étais mourant, n’allais probablement pas t’en sortir.
Tu leur a demandé de t’aider - et c’est ce que Louis a fait alors.

Il ignore si tu te rappelles de lui, dans le fond il préférerait peut-être que ce ne soit pas le cas. En vérité, c’est une sensation étrange que de se retrouver face à ses propres victimes. Quand bien même il ait la sensation d’avoir agi par bonté d’âme. Un meurtre reste un meurtre. Et tu ne l’as même pas nourri, Louis est allé planter ses crocs dans la gorge d’un cancéreux, peu de temps après.

“Eh bien, quelle drôle de surprise.”

“Oh… Mon meurtrier.”
“Ah… Vous n’y allez pas avec le dos de la cuillère, n’est-ce pas ?”

Car il est vrai que si le terme était véridique, il est toujours un peu difficile à entendre. Du moins à ses yeux, à ses oreilles. Considère-t-il la vampire qui l’a mordu comme sa meurtrière ? Allez savoir, il n’a jamais réfléchi à la question. En vérité, il évite même d’y songer. Une relation bien trop complexe.

Elle l’a probablement sauvé de la chaise électrique, ce faisant.

“Vous inquiétez pas, je suis pas venu ici pour me venger, en fait je savais pas que vous étiez dans cet endroit. Et puis je serai mort avec ou sans vous. De toute façon, ce n’est pas si mal ici.”
“Hm en effet, vu votre état lors de notre… rencontre, vous seriez probablement mort dans tous les cas. Quant à venir par ici, la question est ouverte, je ne vais faire d’hypothèse sur votre vie.”

Il tire sur sa pipe, et la fumée bleutée qui s’élève dans le ciel.
Il t’observe du coin de l’œil, tu sembles t’être remis de cette mésaventure - si on peut qualifier sa propre mort ainsi, il va de soi. Il souffle sa fumée par le nez, après une nouvelle bouffée.

“Hm, laissez-moi deviner. Le Roi n’a de nouveau pas fait son travail correctement, et il vous envoie par ici. C’est bien cela ?”

Il dit cela avec un air de dédain, et l’expression que va avec, une grimace légèrement remontée dans le nez, avant que ses traits ne retrouvent leur ton habituel. On sent, un instant seulement, un agacement rare chez le vampire.

“La Camarilla l'arrange bien, il faut avouer. C’est triste qu’il faille une organisation à part pour s’occuper de toute une partie de la communauté des morts, mais que voulez-vous...? Oh, j’espère qu’ils vous ont au moins mis au courant.”

Mordu par un vampire, tu deviendras toi-même vampire.

“Vous aimez pas le bon roi des morts? C’est typiquement Punk ça, on passait des heures à vomir Lizzie et le prince Philippe.”
“Hm, peut-être… Ça semble surtout être typiquement anglais.”
“Vous êtes peut-être un punk dans l’âme. Au fait, vous savez ce qu’est un punk ? Faut dire que ça a émergé en 78, je sais pas quand vous êtes mort.”
“1951.”

Le couronnement d’Elisabeth II n’aura lieu que deux ans plus tard, et les premières lois sur les droits civiques des afro-américains trois ans après. Il a raté de peu les conséquences réelles d’une lutte pour laquelle il se sera battu toute sa vie. Pas de chance, diraient certains. Louis, de son côté, n’est pas vraiment sûr que son exécution aurait pu s’en trouver empêchée.

Mais qu’importe.
Il préfère ne pas ressasser le passé.

“On m’a dit que je deviendrai vampire, on m’a aussi dit que les vampires étaient les seuls à pouvoir se rendre chez les vivants. Je suppose que c’est cool, je pourrai toujours aller voir The Clash en concert.”
“Hm en effet, si les dates tombent bien, ce ne serait pas impossible. Ou attendre qu’ils meurent, si jamais ils atterrissent par ici. Mais la probabilité reste faible.”
“Mais là tout de suite, j’ai envie de me venger de Liam, j’ai envie de le retrouver et de le tuer pour qu’il comprenne ce qu’il m’a fait subir.”

Il lève un sourcil, en inspirant sa pipe. Pour dire vrai, Louis ne s’en préoccupe pas vraiment. Car le monde des vivants ne l’intéresse plus tant, si ce n’est pour se nourrir. Et puis il ignore bien les conséquences d’un meurtre chez les vivants, autre que pour se nourrir - il faut dire qu’il ignore beaucoup des lois, peu de communication y est faite, beaucoup d’incertitudes demeurent. Et après tout, en tant que vampire, tu devrais sans mal aucun réussir à retrouver cette personne.

“Eh bien, un drôle de programme. La Camarilla devrait pouvoir vous renseigner - du moins pour sortir. Pour ce qui est du meurtre… eh bien, nous en sommes comme qui dirait spécialistes : nous tuons pour nous nourrir, la plupart d’entre nous tout du moins.”

Pas tout le monde, sous-entendu.

“Néanmoins, le meurtre colle à la peau. Tout le monde n’est pas fait pour une telle vie.”