« Moi aussi... »T’essayes d’arrêter de serrer, de lâcher prise. Mais c’est dur pour toi, trop dur. Pourtant tu devrais avoir l’habitude maintenant de te retrouver dans ce genre de situations, de voir les gens mourir. Ou disparaître. T’as eu ton compte mais tu peux encore encaisser, tu le sais parfaitement.
Alors pourquoi ça fait tellement mal cette fois-ci ?
Tu inspires longuement, les yeux fermés et légèrement humides, caressant du bout de ton pouce le revers de sa main. Est-ce qu’elle a toujours été aussi fine, aussi fragile ? C’est fou à quel point on oublie ce genre de détail jusqu’à ce que ça saute à la gueule et souvent
pour les pires raisons. Tu sens chaque ligne dure que ses os dessinent et pourtant sous ta peau irritée et abîmés la sienne paraît presque douce. Sûrement une idée que tu te fais pour te consoler, pour taire ce qui tord tes entrailles en silence. T’espères que personne ne peut l’entendre ; surtout pas lui.
« Tinnef.
Mmh. »Quand tu rouvres les yeux, tes larmes se sont calmées -un peu. Suffisamment pour que tu le vois se redresser et te faire signe. T’amorces un geste pour l’aider avant de t’arrêter, secouer légèrement la tête en te disant que
t’es vraiment con, avant de t’avancer sans te faire prier. Incapable de le lâcher, incapable de résister. C’est pas comme si t’en avais vraiment envie de toute façon, n’est-ce pas Constantine ? Sa main sur ta peau, sur ta barbe de plusieurs jours qui te donne sûrement une vilaine gueule, ça t’apaise. Peut-être parce qu’elle est froide. Ça doit être ça, ça peut être que ça de toute façon. T’appuie un peu ta joue contre, doucement, avant d’y frotter la peau de ta joue un peu trop rêche. Des mouvements lents, légers et à peine perceptible, digne d’un chat un peu capricieux. Juste un peu.
Ta respiration est lente alors qu’il finit par atteindre tes cheveux. Tu continues à passer ta main dans les siens, lentement, d’un geste qui peut sembler monotone alors qu’il n’en est rien. Tu sens qu’il presse et tu te laisses faire, tu te laisses diriger
comme un peu trop souvent. Tu délaisses sa chevelure mais tu gardes une prise ferme sur sa main, resserrant encore un peu plus tes doigts comme si t’essayais de les faire fusionner. L’oreille contre sa poitrine, tu t’abandonnes à ses battements de cœur. Ça te rassure. Ça fait du bien de l’entendre. Il est chiant à savoir comment te rassurer là où toi, t’as tant de mal à retrouver ton rôle. Celui qui protège, celui qui s’occupe, celui qui cache, celui qui prend soin.
L’idiot qui se sacrifie pour les autres.
Tu l’écoutes. Tu dois te reprendre, là, maintenant. Pas plus tard,
maintenant. La tête posée contre son torse, t’as peur de l’écraser. T’es lourd, tellement plus lourd que lui. Des fois t’aimerais être plus petit, juste un peu, pour ne pas avoir l’impression de faire mal même involontairement dans ce genre de moment.
« Je suis là, pitou. »Tu te répètes et pourtant le ton est plus le même. Ta voix a arrêté de trembler et les larmes ne coulent plus. T’auras tout le temps de t’inquiéter et te laisser noyer plus tard, seul,
dans ton coin. Tu peux pas cacher ce qui est flagrant, ce qui se dégage de chaque syllabes qui quittent tes lèvres, mais tu peux au moins retrouver un peu de contenance. Pour lui.
Et pour toi, aussi.
Tu resteras. Tu le lâcheras pas, plus jamais.Tu restes un moment sans bouger. Tu finis par te relever juste pour déposer un baiser qui semble bien chaste sur son front avant d’y coller le tien quelques instants.
« Je t’ai entendu. Je t’entends.* »Qu’il parle, s’il en a envie. Qu’il se taise, si c’est trop dur.
Quoi qu’il choisisse, tu l’écouteras.
Résumé
648 mots
*en français
je vais péter mon crâne i swear