Le temps est absolu.
Il n’attend personne et ne s’arrête jamais.
Vivant à son propre rythme sans aucun maître.
Et le temps s’en est allé, Siska. Laissant tes pensées vagabonder. Errer. Et ne trouver aucune solution. Aucun repère. Laissant un sentiment amer te vriller les tympans. Depuis des jours à présent. Des semaines et des mois, elles ne cessent de te le montrer. De revenir à lui. Ressassant cet instant, ce moment. Sa voix résonne avant que tu ne puisses l’ignorer. Te rappelant à tes actions. A tes mots. Viktor te hante alors qu’il a avoué t’aimer. Toi et nulle autre. Avec détermination et force.
Avec droiture et dignité.
Avec tout ce que tu aimes chez un homme.
Et tu es partie sans te retourner. Amère et vexée comme à ton ordinaire. Parce qu’il a eu un mot de travers. Comprenant la manière dont il te voyait, finalement. Heurtée qu’il puisse te rabaisser de la sorte. Tu devrais le détester. Le maudire même et tu y as pensé. Sous couvert de ta colère, tu y as pensé, mais tu n’as rien fait. Parce qu’il est exceptionnel dans ton monde. Parce qu’il a réussi ou tout autre à échoué. Il t’a donné envie de croire.
Dans ses bras.
Errant alors dans ce trouble qu’il laisse derrière lui. Après des mots interdits. Ne cessant de t’agacer. De te tourmenter. Et de te donner envie de le retrouver. Mais ce n’est pas à toi de le faire, c’est ce que tu croyais. Laissant un mois s’écouler avec cette seule idée. Que c’était à lui de venir te chercher, mais ce n’est jamais arrivé. Ancrant plus encore ce sentiment amer dans tes songes. Te dévorant de l’intérieur. Comment oses-t-il t’ignorer. De ne pas revenir s’échouer à tes pieds. Pour se faire pardonner. Comment peut-il se comporter si mal avec sa déesse. C’est inadmissible. Rongeant tes sangs pendant des jours. Des heures. Manquant de t’arracher ta propre tête pour ne plus être en colère.
Un second mois s’est écoulé alors. Las et blessé. Tu as fini par croire qu’il n’était pas assez fort pour te confronter. Tu as senti la déception pointer le bout de son nez. La résignation quant à ce désir ardent de le voir revenir près de toi. Déçue de comprendre que tu n’étais pas assez pour qu’il vienne te chercher. La fierté en ayant pris un coup. Le narcissisme mis à mal. Tu te pensais bien plus irrésistible que cela, mais force est de constaté que ce n’était pas le cas.
Seulement comment l’accepter.
Sans se battre.
Cherchant des excuses pour lui donner raison.
Car cela est plus facile à encaisser.
Il n’osait pas. Timide simplement. Ne souhaitant pas t’énerver de sa présence. Il y a tant d’excuses que tu lui as trouvé pour ne pas être venu à toi pendant si longtemps. Tant qui ont réussi à apaiser ton malaise. Mais c’est assez.
Alors que le troisième mois s’éveille.
C’est assez.
Tu ne veux plus l’attendre. Tu ne peux plus. Comment peut-il te laisser seule si longtemps. Alors qu’il avait fait un serment dans cette forêt. Celui d’être à tes côtés, toujours. Comment peut-il le briser si simplement. Ce n’est pas digne de lui. Ce n’est pas digne de sa droiture et quelque part, tu refuses de croire qu’il le fait. Viktor a forcément une bonne raison et tu dois la voir. Tu dois l’entendre.
Vêtue de ta plus belle robe, on te croirait reine. Fendue jusqu’au milieu du ventre, jusqu’en haut de ta cuisse gauche, la noirceur habille ta pâleur avec élégance et sensualité. Ajoutant de la hauteur à tes jambes en te perchant sur des talons renversants. Tu ne comptes pas lui laisser de répit. Tu ne comptes pas l’épargner. Qu’il sache ce qu’il est en train de perdre à te faire attendre.
Et tu sais où le trouver. Tu sais où il va en journée. C’est évident qu’un forgeron se tiendra près du métal et de la chaleur. Entendant déjà les tintements de sa force pour le dompter. Pour le plier. Pour le sublimer. Tintant en désaccord pour t’annoncer. Tu ne tarde pas à te tenir face à lui. Observant sa véritable apparence aujourd’hui.
Elle est laide, mais elle n’enta che pas sa carrure.
Glissant ton regard sur ses muscles, reflet de sa bravoure passée et de sa force brute. Tu affiches un air méprisant pour tromper le monde, mais il te plaît de le voir ainsi. Tu ne peux le nier.
“ Comment se fait-il… que ce soit moi qui soit ici aujourd’hui ? Et comment se fait-il que trois mois se soient déjà écoulés ? Je vois que tes belles paroles n’ont pas d’actes pour les justifier…”
Le projet sur lequel il semble travailler.
Est-ce l’armure qu’il te promettait ?