Abraham est endormi. Profondément assurément, probablement parce qu’il n’a que trop peu dormi la nuit passée. Perdu au milieu de ses notes et de ses écrits, dans l’écriture de sa quatrième thèse de recherche, de ses ouvrages personnels ou empruntés. Il n’a vu ni l’heure ni la nuit défiler, une nuit qui fut finalement bien trop courte, même pour lui.
Il sent que l’on cogne son fauteuil.
Sans réaction de sa part.
Il s’en réveille, légèrement, momentanément, avant de replonger tout aussi rapidement dans le sommeil. Contorsionniste qu’il est, il s’est trouvé une position confortable dans ce fauteuil - le sien, puisqu’il prend toujours le même, sans exception. Dans ses mains, un
Recueil des contes populaires russes, notamment utilisé par les étudiant.es en littérature, mais voilà quelques heures qu’il ne le lit plus désormais, quelques heures que l’ouvrage est simplement là, dans ses mains, devant ses yeux fermés et sa tête tombée sur le torse. Dans ses oreilles, son casque pulse de la musique rock des années 80, alors Abe est parfaitement isolé de ce monde extérieur.
Parfaitement isolé de la bibliothèque qui se ferme.
Et parfaitement isolé de toi, qui cherches désespérément à le réveiller.
Il entend son prénom, au lointain. Pourtant, il ne fait que vaguement résonner dans son rêve, il tente bien d’ouvrir les yeux mais tout son corps refuse, tout enfoncé qu’il est dans ce sommeil nécessaire.
Pourtant, tes tentatives finissent par payer, lorsque la luminosité change, comme il le sent derrière ses paupières closes. Alors il les ouvre difficilement, reste bloqué encore quelques secondes dans cette position, comme s’il dormait les yeux ouverts, bercé par la pluie battante. Avant qu’il ne finisse par capter les lumières éteintes, les tables vides, l’absence d’usagers et surtout - toi, en face de lui, qui pourrait presque taper du pied au sol pour qu’il s’en aille, pour qu’il suive bien gentiment la foule.
Il cligne des yeux, retire son casque.
On entend la musique qui pulse au travers, étouffée.
“... Désolé. Je m’en vais.”Il ramasse et range ses affaires, regarde l’heure sur son téléphone. Constatant l’heure tardive, il déglutit, mal à l’aise.
“J’ai loupé mon bus.” A cinq minutes près, c’est d’autant plus frustrant.
“Le prochain est dans. Une heure. Et quart.”Il va devoir attendre alors. Sous la pluie probablement.
Résumé
381 mots
Abe tape sa meilleur sieste à la BU, sans capter qu'il faut partir là monsieur, on ferme. Au final, il loupe son bus ce couillon