Quête potagère : Des carottes pour les lapins - Ft. Célestin

La clochette tintinnabula à l’ouverture de la porte, aussitôt suivi de joyeux jappements et du vif bruit de cavalcade de griffes sur le sol dur. La nouvelle arrivante, notre jeune chimère à la mine souriante et débordant de joie devant les boules de poids qui couraient à sa rencontre, s’accroupit pour offrir moultes caresses à ses amis canins. Elle les salua et les félicita de son habituelle voix suraigüe qui leur était réservée. Les poilus se pressaient contre elle à qui mieux mieux, accaparant son attention, en quête de gratouilles et caresses qu’elle distribuait toujours sans compter.

Mais aujourd’hui, ce qui la menait au refuge, ce n’était point les multiples animaux à promener ou à s’occuper ; Aujourd’hui, sa mission était d’ordre potagère. Pour l’occasion, elle avait d’ailleurs revêtu une salopette en jean clair usée et d’ores et déjà tâchée d’herbe, un pull à rayures noir et jaune et des bottes en plastique jaune - une tenue clichée lui donnant un air de bourdon, mais efficace pour aller gambader dans un jardin et planter des semis. Et le temps frais et ensoleillé s’y prêtait à merveille. Maya était ravie de cette journée qui se dessinait, prête à immerger ses mains dans la terre avec Célestin, à profiter de ses nombreux conseils et son expérience incroyable sur le sujet.

Enfin, si ses amis à quatre pattes se décidaient à lui laisser de l’espace - et pour l’instant, ce n’était pas gagné. C’est donc en riant que Maya repoussa le berger australien qui essayait de grimper sur son dos, pour se relever et s’épousseter, faisant danser et voler les poils dans les rayons de soleil qui filtraient à travers la fenêtre. Elle retoucha légèrement sa coiffure en saluant cette fois-ci les bipèdes du refuge, d’un “Bonjour !” joyeux et dynamique.

- Comment ça va ? Est-ce que Célestin est dans les parages ?

Elle fit la conversation quelques minutes avec les humains présents, s’enquérant des nouvelles et de la santé de chacun, tout en offrant des caresses distraites aux canidés qui ne s’étaient pas encore découragés et continuaient à lui tourner autour en réclamant de l’attention. Après une ultime papouille et un bisou léger sur une truffe humide, elle se redressa et s’enfonça dans un couloir, adressant un sourire et quelques paroles à tout être qui croisait son chemin - adorable quadrupède ou sympathique bipède confondus, avec peut-être quand même une affection plus débordante et tactile pour les premiers, ses amours de toujours.

Il était arrivé avec ses outils de jardinage, sa bêche et ses gants, râteaux et plantoirs, une pelle et de quoi travailler la terre. Le refuge n’a que peu d'outils de jardin, et Célestin préfère quoi qu’il en soit utiliser les siens : il a ses petites habitudes, comme tous les vieux spectres qui vivent ici. Ça avait pris de la place dans la voiture, comptez en plus Roquette, adoptée voilà quelque temps mais toujours ravie de retrouver ses copains du refuge, ou de s’en faire de nouveaux. Et c’est qu’elle prend de la place, la chienne, bien qu’elle dorme calmement il est vrai sur la banquette arrière.

Il arrive dans un déluge d’outils en tout genre et de poils de chiens, d’aboiements et queues secouées. Il fait quelques gratouilles, sous le regard jaloux de Roquette mais qui oublie bien vite en allant renifler des truffes nouvelles.

Les beaux-jours reviennent, alors au programme : un potager, pour permettre au refuge de nourrir lui-même les lapins et autres hamsters qui y vivent. Comptez de la salade, des carottes et autres pissenlits pour satisfaire un grand nombre de bouches, mais aussi de l’herbe à chat et pourquoi pas de la cataire ? Célestin a de grands projets concernant ce jardin.

Lorsqu’il arrive dans la zone où sera réhabiliter le potager, tu es déjà présente, entourée d’un grand nombre de canidés auxquels Roquette va se joindre avec enthousiasme, tout en boitillant légèrement.

“Aah Maya ! Ravi de te voir !”

Il dépose non loin toutes ses affaires, un peu trop nombreuses il est vrai. Il s’est également habillé en conséquence, bien que la différence entre sa tenue habituelle et celle du jour ne semble pas se remarquer. Elle ne tient en vérité qu’à un détail : Célestin n’est pas maquillé.

A son arrivée, quelques chiens détournent leur attention pour se diriger vers le nouveau-venu. Il essaye tant bien que mal de les contenter, d’éviter que l’un ne se prenne un coup, ou que celle-ci ne fasse tomber le râteau sur ses pattes. Mission compliquée s’il en est.

“Comment vas-tu ? Prête à faire ce jardin ?”

Maya profitait de l’air printanier avec plaisir, attendant un Célestin qui ne tarda pas à se manifester. Elle se retourna vers lui à son arrivée, un grand sourire étirant les commissures de ses lèvres.

— Célestin ! Roqueeette !!

Elle vint à sa rencontre et l’aida à entreposer toutes ses affaires et outils non loin du parterre prévu, avant de se tourner pour ensevelir la chienne au nom de salade sous un déluge de caresses et de compliments. A la question de Célestin, elle se redressa avec un grand sourire.

— Prête ! Affirma-t-elle d’un air décidé.

Elle remonta ses manches et releva son avant-bras comme pour montrer ses biceps - d’une circonférence assurément plus grassouillette que musclée. Puis elle désigna du menton un endroit dans l’herbe, un peu plus loin, où quelques vieux outils de jardinage abandonnés attendaient d’être utilisés.

— J’ai ramené les outils que j’ai pu trouver dans le refuge au cas où t’en ai pas suffisamment à me prêter, mais ils sont un peu vieillots.

Elle rêvait d’avoir également, un jour, ses propres outils de jardinage. En attendant, elle se débrouillait avec ce qu’elle pouvait emprunter et s’en sortait sans trop de difficultés. Ce qui était irremplaçable et qui lui manquait encore cruellement, c’étaient les connaissances en la matière, car elle n’était encore qu’une novice en terme de jardinage. Une débutante sur le chemin de l’apprentissage agricole. Mais ça, Célestin le savait bien ; Et Maya était, de son côté, grandement admirative de son expérience en la matière.

Elle se détourna des outils et se planta devant Célestin, les mains sur les hanches.

— Alors, par quoi on commence ?

“Prête !”

Un large sourire vient illuminer le visage rondelet de Célestin. Il est ravi - ravi de voir que tu es si enthousiaste à l’idée de mettre les mains à la pâte et surtout dans la terre. Et quand bien même tu es encore novice dans le domaine agricole, Célestin a de bon espoir que tu apprennes vite.

En tout cas, tu en démontres l’envie.
Et ça fait plaisir.

“J’ai ramené les outils que j’ai pu trouver dans le refuge au cas où t’en ai pas suffisamment à me prêter, mais ils sont un peu vieillots.”
“Tu as bien fait, les miens sont… - il désigne ses outils - là, mais pas nombreux non plus. Roquette prend beaucoup de place sur la banquette arrière.”

Une caresse, comme pour lui dire qu’il plaisante, qu’il ne lui en veut pas le moins du monde et que ça ne changera rien à l’amour qu’il éprouve pour elle. Elle est heureuse, et c’est l’essentiel. Elle retourne d’ailleurs jouer avec quelques vieux amis canins, son collier étant la seule distinction qu’elle possède par rapport aux animaux encore non-adoptés.

Célestin aurait voulu les prendre tous.
Mais il n’a ni la place, ni les moyens.

“Alors, par quoi on commence ?”
“Délimiter l’espace ! Avec des pieux et des cordes. Pour ça, il faut savoir ce qu’on veut planter, en quelle quantité, si ce sont des espèces qui se supportent les unes les autres ou s’il faudra les séparer.”

Ces connaissances, Célestin les possède - c’est littéralement son travail. Mais ça se trouve facilement dans des bouquins de jardinage, que l’on peut emprunter à la bibliothèque. Ou sur Internet, même si Célestin préfère les livres. C’est un vieux de la vieille, que voulez-vous ?

“Pour les lapins et les autres rongeurs, tu pensais partir sur quoi ?”

Il a des idées, et tu en auras probablement d’autres.
C’est complémentaire, et c’est ce qui est bien.

Un petit rire secoua la chimère quand Célestin avoua que Roquette prenait toute la place sur la banquette arrière. C'était déjà formidable tout ce qu'il parvenait à caser dans la voiture, avec Roquette en plus.

L'écoutant avec attention, Maya hocha vigoureusement la tête à ses conseils quant à la première étape nécessaire à l’installation du potager. Lorsqu’il l’interrogea sur les plantes à cultiver, elle porta la main à son menton, pensive, rassemblant les connaissances qu’elle avait assimilé en farfouillant le net en vue de ce projet.

— Mmmh, du pissenlit me paraît primordial, c’est comestible par tous les rongeurs. Du souci, les fleurs sont très appréciées. Au niveau des légumes, je pensais à des carottes et des navets, de la salade - par exemple de la batavia et de la chicorée ? Mmm… Du céleri-branche aussi. Et des herbes aromatiques pour les cochons d’inde et les lapins : du persil, du basilic… Peut-être quelques radis ?

Maya releva les yeux vers Célestin, pensive. Elle avait énuméré les plantes auxquelles elle avait songé, mais savait qu'on ne pourrait les mettre pêle-mêle comme ça les unes à côté des autres ; Et si elle savait que certaines plantes ne s'appréciaient pas entre elles, ses connaissances sur le sujet étaient encore bien superficielles par rapport à celles de Célestin.

— Enfin, ça dépend de la place qu’on a et des quantités ; là-dessus, je ne me rends pas bien compte, ajouta-t-elle, concluant sa réflexion. Et je ne sais pas si ces espèces s'entendent très bien. Ceci dit, tu as peut-être d’autres légumes en tête ?

La jeune femme s'apprêtait à enregistrer précautionneusement dans un coin de son cerveau toutes les informations et directives de Célestin.

— Sachant qu’en fonction des légumes qu’on plantera, je ferai une fiche récapitulative - un tableau de quel rongeur mange quoi et en quelle quantité, donc on peut se permettre de planter plein de choses différentes, je noterai tout. Quelle taille de potager tu penses qu'on devrait faire, avec ton oeil de professionnel ?

Nul doute que Maya était prête à se fier à son jugement en la matière.

Tu as beaucoup d’idées, et des bonnes par-dessus le marché. Célestin fouille dans ses lots de graines, et sort ce que tu cites - salades, carottes, aromatiques, céleri-branche, navet, radis. Il sort quelques échantillons supplémentaires tout de même.

“Ceci dit, tu as peut-être d’autres légumes en tête ?”
“D’autres aromatiques, comme de l’aneth ou de la coriandre. Chou-kale, endives, poireaux et épinards également… Et j’avais pensé à de l’herbe à chat de la cataire pour fournir la chatterie. Ils adorent la menthe aussi.”

Il se frotte le menton. Ça semble pas mal.

“Sachant qu’en fonction des légumes qu’on plantera, je ferai une fiche récapitulative - un tableau de quel rongeur mange quoi et en quelle quantité, donc on peut se permettre de planter plein de choses différentes, je noterai tout.”
“C’est une bonne idée. Je ferai une fiche par plante pour ma part - de quoi il s’agit, comment l’entretenir. On n’est pas présents tous les jours…”
“Quelle taille de potager tu penses qu'on devrait faire, avec ton oeil de professionnel ?”
“Grand ahah !”

Vous avez de l’ambition, à ne pas mentir.
Ça sera un sacré travail - mais enthousiasmant, il l’espère.

“Séparons déjà les aromatiques des légumes. Dans le lot, beaucoup de racines.”

Célestin sort une feuille et des crayons, note tout ce que vous avez listé, les sépare en plusieurs catégories : aromatiques, plantes rapides, et lentes. Puis il ajoute des flèches - “ceux qui vont bien ensemble”, t’explique-t-il. Des carottes avec la laitue, le chou-kale et les radis ; poireaux avec les épinards et le cresson ; sépare les radis du navet, mais aussi la salade du céleri ; et cetera…

“Hm… Si on met les aromatiques à part - et que l’on plante en ligne, avec la quantité de bestiaux dans le refuge et ce que l’on veut planter… Mettons un carré de 1m sur 1m pour les aromatiques, et 8m sur 6m pour le reste ?”

Il te tend son plan sommaire. Pour visualiser, rien de plus.
Et il retourne fouiller dans ses plants.

“J’ai des œillets d’Inde aussi, pour éloigner les pucerons.”

Devant le futur potager du refuge, Maya écoutait Célestin avec attention, les mains sur les hanches, hochant vigoureusement la tête à chacune de ses paroles.

– Ah effectivement, c’est une bonne idée, la cataire, s'exclama-t-elle avec des yeux brillants. Je n’y avais pas pensé, alors que c’est quand même la base pour les matous. Ils vont être ravis !

Un sourire émergea sur son visage à la pensée des chats se frottant contre les herbes et ronronnant de tout leur soûl.

Elle remonta davantage ses manches lorsque Célestin annonça les prémices de la préparation du potager. L’écoutant attentivement et regardant régulièrement ses notes, elle sépara les aromatiques et les légumes comme il le proposait, pour ensuite répartir en petit groupe les différents légumes qui iraient bien ensemble. Se faisant, elle mémorisait ses instructions et les différents assemblages de légumes, enregistrant avec plaisir les connaissances de Célestin dans sa propre mémoire.

Après avoir fini de séparer les différents sachets de graines, Maya attrapa le plan que lui tendait Célestin pour regarder le schéma qu’il avait tracé sur la feuille. Tendant les mains pour superposer le plan au terrain où s’inscrirait le futur potager, elle essaya d’estimer la taille de celui-ci. Tandis que Célestin retournait fouiller dans ses plants, certainement pour en sortir le reste, Maya attrapa plusieurs outils et entreprit de délimiter le terrain nécessaire à leur labeur. Avec de grands pas qu’elle estimait correspondre à un mètre, elle forma un carré correspondant aux aromates et un rectangle pour les légumes, plantant un outil à chaque coin. Elle dû d'ailleurs gronder l’un des chiens qui pensait pouvoir jouer avec le manche d’un transplantoir, avant de le replanter à son emplacement.

Elle prit du recul pour observer son oeuvre. Effectivement, cela faisait un beau potager. Sachant que, de ce qu'elle avait lu dans les livres de jardinage et de permaculture, le mélange et l'association des plantes permettait de mettre davantage de pousses sur une zone que les monocultures rectilignes et espacées. Satisfaite de cet espace qui lui paraissait correspondre aux schéma de Célestin, elle se retourna vers lui afin de s'enquérir de son aval.

– J’ai essayé de délimiter le potager, qu'en penses-tu ? L’emplacement me paraît pas mal. Elle réfléchit quelques secondes. J’ai fait de l’à peu près, peut-être que tu avais pris un mètre pour mesurer précisément ?

Elle revint vers lui pour lui apporter éventuellement son aide dans la recherche des plants ou refaire une délimitation plus précise de la zone de culture si besoin, attentive à ses remarques.

Puis, avisant les outils qu’il avait amené, elle y chercha une grelinette ou une fourche pour bêcher et retourner la terre. Elle se saisit également au passage de la vieille fourche usée et légèrement rouillée qu’elle avait pu trouver dans les vieux outils du refuge, puis se tourna vers Célestin, prête.

– On arrive au moment sportif du jardinage, n'est-ce pas ? lança-t-elle avec un sourire, outils en main.

Il te suit alors que tu délimites à grands pas l’espace nécessaire au futur potager. La technique du doigt mouillé marche plutôt bien dans ce cas-là, vous n’êtes pas là pour établir un plan d’architecte après tout. Il plante alors les piquets avec des cordes à intervalles réguliers, puis une fois fini, il s’éloigne de quelques pas pour observer, poings sur les hanches, votre œuvre.

“J’ai fait de l’à peu près, peut-être que tu avais pris un mètre pour mesurer précisément ?”
“Nan, c’est très bien, c’est très bien. De l’à peu près suffira largement.”

Il s’en va retourner dans ses plantes et ses outils.
A ta suite, il se saisit d’une houe.

“On arrive au moment sportif du jardinage, n'est-ce pas ?”
“C’est ça ! Je te laisse retourner la terre et je te suis pour délimiter les zones.”

Et c’est parti alors, pour la partie la plus sportive. Célestin, à ne pas mentir, en a l’habitude désormais. C’est un travail qu’il réalise à chaque saison nouvelle, et en grand chaque début de nouvelle année. Il t’indique comment utiliser tes outils, te monte, te laisse faire, te corrige au besoin. Et il suit de son côté pour fignoler, établir des zones plus précises.

C’est un travail harassant, à ne pas mentir.
Au bout d’un temps - indéterminé - il s’arrête et fait craquer son dos.

“Ah… Ça va ? J’ai apporté des boissons si tu veux.”

De l’eau, bien évidemment, mais aussi du thé et des petites choses plus sucrées au cas-où une baisse de glycémie se fait ressentir.

Mélodie rythmée, le choc des outils dans la terre les accompagnait dans leur labeur. Les soupirs des chiens se dorant au soleil printanier, les gazouillis des oiseaux et les grognements d’effort suivaient leur progression. Le pull de Maya avait tôt fait de rejoindre les outils de jardinage sur un coin d’herbe devant l’échauffement suscité par l’effort réalisé. Un travail certes harassant, mais qui apportait son lot de douceur ; Un instant de quiétude où seul le travail physique parlait, où l’esprit se calmait pour laisser place à un néant de pensées, un abysse de silence joliment reposant.

La chimère suivait les instructions de son aîné avec application, concentrée sur sa tâche et ne rechignant pas à l’effort. Malgré le plaisir procuré par leur travail, un élan de satisfaction la gagna quand Célestin étira son dos et lui proposa une boisson, sonnant l’heure bienvenue de la pause. Elle posa ses outils et étira ses muscles endoloris d’un labeur dont elle n’avait pas l’habitude.

Elle se planta devant la parcelle qu’ils avaient entamé, observant d’un oeil appréciateur les résultats de leurs efforts. Les prémices de leur projet prenaient forme, et la satisfaction de voir s’ébaucher le jardin emplissait Maya. Un sourire bienheureux s’affichait sur son visage ravi. Il restait encore un long chemin à parcourir pour que ce bout de terre devienne un potager digne de ce nom et des efforts à fournir, mais là, Célestin et Maya avaient tous deux bien mérité un peu de repos.

— Tu proposes quoi, comme boisson ?Demanda-t-elle en se tournant vers Célestin, curieuse et soudainement assoiffée. J’ai ramené un en-cas d'ailleurs, au cas où.

La chimère, qui sortait rarement sans des petites douceurs faites maison à offrir, alla récupérer dans son sac la petite boîte en fer dans laquelle dormaient des cookies au beurre de cacahuète.

— J’avoue ne pas avoir pensé aux boissons - Mais le sucré, je n’oublie jamais !

Elle ouvrit la petite boîte en fer et la tendit à Célestin, l’invitant à prendre un cookie.

De l’attrait du travail physique, c’est qu’il épuise et empêche de trop avoir à penser. C’est particulièrement reposant, paradoxalement, mais Célestin adore ce qu’il fait. Il se dit qu’il aurait pu adorer également de son vivant, si son paternel n’avait pas constamment été derrière son dos. Il voulait de la productivité, de la rentabilité. Ça leur a permis d’avoir un train de vie certes confortable - autant que l’on puisse l’être aux alentours de l’an 1700 - mais son fils n’en fut jamais pleinement satisfait.

Il manquait quelque chose, quelque chose qu’il retrouve maintenant. Quand bien même il n’a jamais l’impression d’être parfaitement complet.

“Tu proposes quoi, comme boisson ?”
“Eau, thé glacé ou en thermos, et citronnade.”
“J’ai ramené un en-cas d'ailleurs, au cas où.”

Il lève le pouce.
Les boissons sorties.

Il s’installe sur un banc avec des tasses du Routard, tandis que Roquette vient réclamer sa dose de caresses. Il lui offre de bon cœur, un sourire sur les lèvres.

“J’avoue ne pas avoir pensé aux boissons - Mais le sucré, je n’oublie jamais !”
“Oh la boîte en fer !”

Il s’exclame comme un enfant. De son temps, de son vivant, ça n’existait pas, mais il a appris à l’apprécier depuis lors, lors de ses récents passages en France. Il en a toujours une chez-lui, remplie de bric et de broc.

“La mienne est remplie de matériel de couture, on imagine pas comment les enfants peuvent s’écorcher les genoux… Enfin, j’avais fini par oublier pour ma part.”

Il prend un cookie de bon cœur, en te tendant les boissons si jamais tu veux te servir. Il s’est pour sa part penché sur la citronnade.