néant total ,.
rien et puis c’est tout
cinq minutes
Elle l'observe alors que le temps glisse sous leurs yeux. Silencieuse, ses iris ambrées cherchent celles chocolat du jeune homme. Elle ne répond pas tout de suite, fait durer le moment -- ça donne plus d'importance à ses propos, ça marque ses mots ; voilà, c'est dit. C'est avoué, c'est acté --
je n'aurais pas du partir, j'aurais même du rester. Encore aujourd'hui, cet instant reste flou dans ses souvenirs, comme si la scène n'avait pas vraiment eu lieu. C'était si lâche, si faible -- c'était si Susanoo. Est-ce qu'il était différent avant ? Est-ce qu'à un moment dans sa vie, il n'a pas fui ? Il ne sait plus, il ne s'en rappelle plus.
Ah; quel connard tu es.
quatre minutes
Il lit dans son regard qu'une tristesse infinie se cache derrière ce sourire si doux, si rassurant. Il faudrait être con pour ne pas percevoir la mélancolie dans ses expressions -- évidemment, connard -- évidemment, qu'elle est affectée puisque tu as tout quitté, en une seconde. Pourtant, il a toujours fait comme ça ; il est là et puis, il n'est plus là. Et surtout, il ne revient pas.
c'est comme une
étoile
filante
elle ne passe
qu'une fois
trois minutes
▬
Mais tu es réapparu.(mais d'habitude, ce n'est pas le cas, Etsu)
(c'est ça, la particularité de cette relation que je ne cerne même pas)
(d'habitude, je ne reviens pas)
(mais là -- si)
deux minutes
▬
Tu peux partir. Ce n'est pas grave. Si tu reviens après.(et si je ne reviens pas, Etsu ?)
(est-ce que tu masqueras toujours ta peine derrière ce sourire ?)
(est-ce que tu m'en voudras ?)
parce que ce gamin
est
incapable
d'anticiper sa peur
de s'attacher
Elle lui sourit et il reste silencieux. Les secondes qui leur restent semblent défiler à la vitesse de la lumière mais il ne sait pas quoi dire. Il ne sait pas comment le formuler, plus exactement -- il ne peut rien promettre, Susanoo ne promet jamais rien car ses promesses, il ne les tient pas -- jamais, jamais, jamais. Oh! être si cruel, si dépourvu de la moindre attache envers le genre humain et encore plus envers le genre féminin. Comment l'a-t-il larguée la précédente ? C'était horrible (pas pour lui mais pour elle). Il est parti, sans jamais revenir.
Comme à chaque fois.
Mais Etsu n'est pas la normalité.
Etsu n'est pas comme les autres.
une minute
Il esquisse un sourire.
C'est marrant parce que ça pourrait être niais mais étrangement, il ne le ressent pas comme ça -- c'est juste rassurant, c'est ce cocon qu'il n'a pas trouvé avant.
▬
J'ai jamais dit que j'reviendrai pas, finit-il par répondre et il sait, il sait pertinemment qu'il n'a pas besoin d'en dire plus pour qu'elle comprenne --
je reviendrai toujours, je le sais, j'ai compris à présent --
De nouveau, un grésillement se fait entendre dans l'ascenseur et les deux astres sont interrompus dans leur danse émotionnelle ; ils dansent, ils apprennent entre le conscient et l'inconscient à se connaître, à percevoir des sentiments et des ressentis jusque là bien enfouis. La voix du gardien revient, presque blasée (sérieusement, mec ?)
ok, on va éteindre l'ascenseur et le rallumer, ça devrait être bon -- la lumière s'éteint brusquement.
Il n'y a plus un bruit.
Il n'y a plus rien, excepté la nuit.
Et brusquement --
▬
En décembre, il y a la journée porte ouverte du club d'escalade, tu viens ?Il a dit ça d'une traite.
Sur un ton nonchalant mais ses mains tremblent -- pauvre gamin.
Pauvre con, t'es un peu ridicule.
Mais c'est pas de sa faute.
Etsu lui fait un peu perdre ses moyens.
La lumière revient, l'ascenseur se rallume.
Tout redémarre.
Tout semble redevenu comme avant.
mais les deux astres se sont encore rapprochés de quelques étoiles —