Cet enfant semble étrange.
Presque fou allié.
Alors qu'assis sur ce qui ressemble vaguement à un canapé, il s'épanche. Sur sa demande. Sur ce qu'elle veut dire. Répondant aisément à tes questions. Il s'explique sans rechigner. Sans pour autant donner un simple nom pour te dire que c'est cette personne. Sans se détourner. Mais sans te dire ce qu'il en est. Du pourquoi. Du comment. Vouloir tuer quelqu'un signifie beaucoup. Lorsque l'on n'a pas déjà de sang sur les mains. En as-t-il ? Cette nouvelle question germe. À mesure que ses mots dépassent peut être sa pensée. Il te paraît fou. Presque désordonné dans ce qu'il raconte. Et pourtant, une histoire se dessine. Malgré le capharnaüm de son récit. Elle se dessine et tu l'entrevois. Comme une scène qui se déroulait juste sous tes yeux.
Tu pourrais aisément ne pas le croire.
Mais pourtant.
Il y a ce sentiment de malaise profond qui s'échappe. Qui se traduit dans chacune de ses interventions. Un malaise proche d'une rage. Que tu finis par découvrir. Il sait de quoi il parle. Il sait ce qu'il veut. Tu le crois. Il n'est visiblement pas assez naïf pour te demander un mort sans y avoir longuement songé. Cela le ronge. Et si tu le sais, Siska, c'est parce que tu comprends bien ce sentiment. Laissant l'idée qu'il ne comprend pas, de côté. Laissant l'idée qu'il est fou, s'éteindre. Il est conscient. Même si ses traits trahissent son manque de sommeil. Il pourrait être entrain de divaguer, tout simplement. Mais tu ne crois pas. Est-ce que tu fais bien, ça c'est une autre question. Plus il parle, plus tu as envie de rencontrer cette personne dont il parle. Quand bien même c'est un homme qui te demande de tuer, tu as envie d'accéder à sa demande. Pour soulager sa rancœur. Pour taire ses souffrances. Comme tu as eu la chance de pouvoir le faire. Lui, il ne l'a plus.
« Dis-moi qui est cette personne. Son nom. Où il habitait la dernière fois que tu l'as vu. Avec qui il pourrait être encore en contact aujourd'hui selon toi. Où il traînait également si tu le sais. Donne moi les infos qui peuvent m'aider et surtout ce que tu veux que je lui fasse subir avant d’atterrir ici. » on le sent.
Cette envie sombre.
De lui mettre la main dessus.
Tu es en colère. Étrangement. Sans comprendre le fondement de cela. Ce n'est pas une femme battue que tu as devant toi. Mais il te fait le même effet que l'injustice qu'elles peuvent subir. Parce que c'est qu'il a subit. Tu le vois. Tu l'entends. Tu n'es pas assez fermée pour l'ignorer. Quand bien même tu sembles de marbre et froide, il n'en reste pas moins que le ton de ta voix te trahit, Siska.
« Je te demande cela uniquement au cas où il n'arriverait pas jusqu'ici. Dans ce cas, je ferais au moins en sorte de respecter tes souhaits à la lettre pour sa mort. Dis-moi, je ne suis pas assez prude pour m'offenser. Et puis... J'imagine que tu as dû entendre parler un peu de ce que j'ai pu faire avant pour arriver jusqu'à ma porte d'entrée, donc ne te gêne pas, je t'en prie. J'aurai vu ou entendu pire. » il y a presque un brin de nonchalance. Comme si la mort. Le sang. Les pires atrocités n'avaient plus le moindre effet sur toi. Mais tu as vu tant de choses, Siska. Tu en as endurée tellement, toi aussi. Qu'il n'y a plus rien qui semble pouvoir te heurter. Qu'il n'y a plus rien qui semble pouvoir ne serait-ce que te faire hésiter.
Le goût du sang, tu le connais.
Assez pour t'en rappeler comme si c'était hier. Il semble avoir tant à dire, que tu vas écouter. Avant de décider. Parce qu'à cet instant, il n'a rien qui puisse encore t'intéresser. Mais tu sais que tu le feras. Au fond de toi, tu le sais déjà. Parce qu'il te fait l'effet d'un enfant injustement condamné. Bizarrement. Est-ce ton intuition vaguement vivant bien qu'il soit émoussé. Ou bien un instinct. Tu ne saurais dire, mais tu le sens.
Tu vas l'aider.
Quitte à oublier.
La compensation demandée.« Je te préviens cependant... cela peut prendre du temps. Je ne sais pas depuis quand tu es ici, mais il se peut que tes informations ne me soient d'aucune utilités en premier lieu. Et n'oublie pas... j'attends de toi quelque chose en retour. Donc pense à ce que tu pourrais m'offrir. » comme une vaine piqûre de rappel.