we could be so much more · ft. rin

deuxième chance

ft. @Rory L. Gallagher  

Après une semaine de dur labeur, le week-end avait enfin débuté. Dès la fin de ton service, tu n’avais déjà qu’une chose en tête : dépenser sans compter en faisant la fête du soir au matin.

T’avais envoyé un message à deux-trois potes, l’une d’entre elle avait accepté de te suivre à l'Ectoplasm. Alors tu t’étais pressée de rentrer chez toi pour une douche revigorante, un bon repas et un changement de tenue pour une robe bien plus flatteuse que tes joggings habituels.


Et là, c’est le drame : alors que tu faisais gentiment la queue, ton téléphone sonne.



… Et merde. Ce ton pleurnichard ne te dit rien de bon.


Apparemment, le compagnon de madame avait décidé de lui faire une jolie surprise en venant toquer à sa porte sans prévenir.
Trois mois qu’il était parti en voyage. Trois mois, et il fallait qu’il revienne ce soir.

Et toi, bonne poire, tu la rassures gentiment. “T’inquiète, une prochaine fois”, tu dis. “Profitez bien, les amoureux”, tu dis.
Les potes en couple, c’est vraiment les pires. T’es bien contente d’être libre comme l’air, toi.

Puis justement, tiens : tu t’es fait toute belle, t’es seule, et ça te donne l’occasion de peut-être rentrer avec une conquête au bras. Oui, soit ça, soit on te virera à grands coups de pieds au derrière de la part du videur qui essaye désespérément de fermer la boîte.
Tu jubiles rien que d’y penser.


Une fois que t’as fini de ficeler ton joli plan de soirée, tu passes enfin les portes et te diriges machinalement vers le bar.

Enfin, t’essayes, vu comme l’endroit est blindé de monde. Quitte à venir en solitaire, si t’avais su, tu serais arrivée plus tôt…
Tu fends la foule à grands coups de jeux d’épaule polis et d’excuses criardes, et lorsque tu tournes nonchalamment le regard, t’en croises un qui semble te reconnaître.


La lumière de l’endroit est d’abord trop faible pour distinguer ses traits, mais lorsqu’il s’approche, tu regagnes ton joli sourire.


Évidemment, tu plaisantes, comme en témoigne l’air joueur peint sur ton visage. Il faut dire que tu le croises beaucoup, ce jeune homme : à la soirée désastreuse d’Halloween, tu l’avais vu se faire inlassablement malmener par une force supérieure semblant vouloir le punir pour une bonne raison, passant de la brûlure à la noyade en un claquement de doigts.
Sur le retour, t’avais espéré qu’il soit rentré chez lui sain et sauf après toutes ces épreuves, et le destin avait répondu à tes interrogations plus d’une fois. En soirée, au bar ou même dans la rue, tu n’avais cessé de tomber sur lui depuis, et visiblement, il s’en était bien remis.

Vous aviez depuis pris l’habitude de vous échanger un simple geste de la main, comme pour secrètement vous saluer et vous rappeler de cette aventure mémorable.

Mais ce soir, c'est la première fois qu’il vient directement te parler, et t’as de la veine : cette fois, t’es pas déguisée en banane.


Après t’avoir fait rire avec une référence à votre première rencontre, il finit par te demander si tu es accompagnée.


Tu forces un peu les yeux doux en espérant lui décrocher un rictus.

Déjà, il te propose un verre, et tu t’amuses encore de sa remarque. Sa bonne humeur est contagieuse, ça lui fait déjà gagner un bon point.


Ouais, tu te sens encore un peu mal d’avoir flippé dans l’eau des égouts… Circonstances atténuantes, hein.


Ni d’une, ni deux, vous vous frayez un chemin vers le bar, où tu décides de prendre le même cocktail fruité que lui. Vous avez les mêmes goûts, deuxième bon point.

Et lorsqu’une petite place se libère pour te laisser t’accouder au bar en attendant votre commande, tu fais volte-face pour recroiser son regard en souriant :


En espérant qu’il ait lui aussi oublié ton prénom. T’aurais pas l’air bête, sinon.

deuxième chance

ft. @Rory L. Gallagher  

Bon, il a pas l’air de t’en vouloir pour ta lâcheté dans les égouts, c’est déjà ça…

Et lorsqu’il se présente, tu finis enfin par connecter deux neurones : Rory, ça te revient.
Son accent ne t’échappe pas non plus, alors tu décides de continuer la discussion dans la langue natale que vous semblez partager, comme pour rajouter à la liste de vos points communs.


Vous trinquez, vous blablatez, jusqu’à ce que le roux finisse sa tirade par une bombe :


Celle-là, tu l’avais pas venir. Impossible de retenir un éclat de rire.


Toi, tu crois pas trop en ces choses-là.

Pas trop.

Tu te dis naturellement qu’il exagère, qu’il force un peu pour te décrocher un rictus de plus. Et, pour le coup, il se débrouille très bien.


C’est ton tour de forcer, ‘faut croire.
En même temps, un peu de bonne compagnie te ferait pas de mal. Surtout lorsqu’elle porte les traits de Rory que tu te mets à analyser sans trop t’en cacher, camouflant un léger sourire derrière la bordure de ton verre alors que tu te perds dans ses yeux le cours d’un instant.

Oui, tout compte fait, t’as pas perdu au change, ce soir.



Sa question te fait sortir de ta bulle tandis que ton regard se tourne naturellement vers la piste de danse blindée. Il l’avait dit lui-même, si vous êtes là, c’est que vous aimez tous les deux festoyer.
Et tu comptes bien lui prouver à quel point il a eu raison.

Sans un mot, tu vires la paille colorée de ton cocktail pour le finir d’une traite avant de reposer les yeux sur lui d’un air amusé. T’avais déjà bien assez savouré la boisson fruitée pendant votre échange, maintenant, il te fallait juste un petit coup de boost avant d’aller te défouler.

Tu lui laisses à peine le temps de te suivre que tu attrapes déjà sa main pour le traîner dans la foule en évitant de te prendre un coup de coude au passage. Ton enjouement te donnerait presque des airs de gamine ayant un peu trop forcé sur les vitamines, mais tu t’en fiches : t’es venue pour ça, après tout.


En espérant qu’il fasse ses preuves en réussissant à tenir le rythme.

deuxième chance

ft. @Rory L. Gallagher  

Il t’est facile de constater que ton cavalier n’a pas deux pieds gauches, ça te rassure.

Les musiques entraînantes s'enchaînent, tu savoures les basses qui chatouillent tes entrailles, une bonne excuse pour ne pas se forcer à discuter. Quelques sourires lancés de çà et là suffisent amplement pour l’instant.

Certes, le small talk, tu le maîtrises et ça te dérange pas le moins du monde : tu trouves ça tellement attendrissant de mettre le doigt sur le sujet qui ferait vibrer ton interlocuteur, de ramasser les pièces du puzzle distribuées unes à unes, comme des indices aboutissants à finalement peindre un portrait de la personne en face de toi.
Mais là, t’as juste envie de danser.

C’est dans ce genre de moments que t’es reconnaissante qu’on ait décidé de pêcher ton âme pour finir ici.
Les astres avaient vu juste, ton autre vie avait été coupée court trop vite, trop brutalement. Ici, on ne t'avait donné qu’une seule mission : t’amuser. C’est tout ce que tu souhaites.

… Entre autres.



La voix mielleuse de ton partenaire te fait reporter ton attention sur lui, te permettant au passage de remarquer à quel point ses pas de danse ont fini par vous rapprocher.

Et, en plus, il se permet d’en faire des caisses. Les taquineries sur tes yeux baladeurs, le clin d'œil qui part, tout ça suivis d’une petite pirouette parfaitement contrôlée… T’as un sacré concurrent en face de toi.
Heureusement, t’en as vu d’autres.


Tes mains viennent nonchalamment se glisser autour de sa nuque et tu plantes ton regard dans le sien, tandis qu’on lit facilement sur tes lèvres le rictus que tu essayes de réfréner- sans succès.


Tu marques la fin de ta phrase en plissant un peu les yeux, comme un enquêteur qui voudrait mettre la pression à l’individu douteux qu’il interroge.
Au moins, vos intentions sont claires, c’est bon à savoir. C’est léger, pas très sérieux, et une fois de plus, c’est tout ce que tu souhaites.

… Entre autres.


Vous profitez quelques instants de plus du dancefloor, mais tu finis par défaire tes bras de ses épaules pour venir chercher ton paquet de cigarettes dans ton sac à main. Le sourire aux lèvres, tu le secoues brièvement sous le nez de Rory avant de reprendre la parole :


Dans tous les cas, il a pas trop le choix : l’appel de la nicotine est plus fort que celui des beaux garçons.

Tu décides de faire un détour par le bar pour commander deux Cuba libre, jetant un petit coup d'œil par-dessus ton épaule histoire de t’assurer qu’il t’ait bien suivi. Reste à voir s’il acceptera de braver le froid et les nuages de fumée pour rester à tes côtés.

Au pire, vous avez un petit moment pour discuter le temps d’être servis.


Ça y est, tu t’es décidée : c’est l’heure de peindre son portrait.

deuxième chance

ft. @Rory L. Gallagher  

Cette conclusion te fait entrouvrir les lèvres, et l’air ahuri qui habille désormais tes traits laisse rapidement place à un gros pouffement de rire moins gracieux que ceux qui l’ont précédé, tant il t’est venu abruptement.
Vos minauderies étaient déjà claires comme de l’eau de roche, mais celle-là, tu l’avais pas vu venir.

Rory est à l’aise, c’est le moins qu’on puisse dire. Plus que toi, même. Ça t’en teint carrément les joues, et t’essaye de mettre ça sur le compte de l’effort physique mélangé à l’éthanol, parce que ça t’arrange bien.
T’as préféré changer de sujet pour pas bégayer : tu connais pas le spécimen depuis bien longtemps, mais t’es déjà persuadée qu’il aurait saisi l’occasion pour te bassiner là-dessus.

Aucune chance que tu lui laisses cette opportunité.


Finalement, la pause cigarette tombe au parfait moment alors que vous rejoignez le petit coin d’extérieur dédié aux fumeurs. Tu t’assois machinalement sur l’une des dalles de pierre qui pavent le sol du modeste havre de paix, là où l’air frais revigore et où les basses assourdissantes passent en arrière-plan sonore.

Un peu de calme, ça fait du bien, aussi.

Adossée au mur, tu viens prudemment poser ton verre à côté de toi pour allumer ta clope, pliant stratégiquement tes lèvres à chaque fois que la fumée s’exhale de tes poumons pour éviter que ton partenaire ne se la prenne en pleine poire.

Et, même lorsque tu détournes la tête, ton regard reste concentré dans sa direction, comme pour t’aider à intégrer sa réponse.


Tu apprends que le beau roux a débarqué ici relativement récemment, et ça te donne un petit coup de vieux. C’est bête de se comparer sur le sujet, t’en es consciente, mais tu peux pas t’en empêcher : t’as déjà fait la connaissance de spectres errant dans l’au-delà depuis des centaines d’années, et pourtant, ta récente célébration de la cinquantaine post-mortem t’avais semblé douce-amère.
Heureusement que tu traînes aussi avec des papys, ça finirait presque par te vexer, à force.

Savoir que son système immunitaire est sorti victorieux de la lutte des égouts te fais porter le filtre de ta roulée aux lèvres en te laissant les mains libres pour l’applaudir comme une idiote le temps d’une énième taffe. T’as beau faire gaffe avec les potions, elles ont quand même réussi à te mettre dans un sale état plus d’une fois. La chance du débutant, sûrement.




C’est ton tour de rester évasive. Après tout, s’il connaît Châtelet, il sera clairement pas étonné de savoir le nombre de tracas causés par la nature de l’appartement, à toi comme à tes colocataires.


Il te retourne la question, brise le contact visuel un instant pour profiter de la vue, t’en profite pour siroter un peu ton verre avant de répondre.


Tu reprends un sourire amusé en suivant son regard un instant, pensive. Certes, ton bar n’est pas formellement interdit aux hommes, mais tu préfères tout de même éviter de les y inviter.

De toute façon, pour ce qui est de boire un coup avec ton entourage, tu préfères éviter d’organiser ça sur ton lieu de travail… T’as beau pas être la personne la plus professionnelle au monde, loin de là, t’as pas forcément envie que ta patronne te voit en train de rouler sous la table non plus.


Égarée dans tes songes, tu perds un peu le fil de la conversation, mais t’y prête pas vraiment attention. T’as pas envie de le noyer sous les questions futiles non plus, et, une fois de plus, ce moment de flottement est loin d’être désagréable.

Et puis, t’as un peu envie de le laisser gérer, aussi. Parce qu’il a beau se la jouer sûr de lui, tu veux voir jusqu’où ça va, si c’est qu’une façade.
Alors, sans trop réfléchir, tu jettes ton mégot dans le cendrier le plus proche en une pichenette trop bien huilée pour ne pas avoir été pratiquée des centaines de fois auparavant, et tu te rapproches de lui, un peu.


Frileuse comme t’es, la fraîcheur de ce début de soirée commence à devenir de trop, faute à ta maudite flemme qui vous a empêché un détour par le vestiaire pour récupérer vos manteaux.
L’air de rien, tu finis presque blottie contre lui, te contentant de jeter quelques coups d’œil épars dans sa direction pour t’assurer de ne pas le mettre mal à l’aise.

T’as envie de lui demander s’il veut rentrer, mais les mots restent bloqués au fond de ta gorge.
Comme par crainte qu’il dise oui trop tôt.

deuxième chance

ft. @Rory L. Gallagher  

Le rouquin laisse déjà planer le sous-entendu d’une seconde rencontre à ton domicile, voire une autre encore à la fin de ton service. Un peu précoce, mais c’est pas pour te déplaire : en général, t’es pas trop rentre-dedans non plus, préférant depuis quelques temps le flirt léger qui mènera peut-être sur quelque chose… Un jour.


T’es habituée à faire le premier pas, à gratter des rendez-vous à droite à gauche quand tu sens que l’occasion s’y prête. T’aimes voir tes futures conquêtes buter sur leurs mots, sentir leurs doigts tressaillir lorsque tu viens y entremêler les tiens, leurs cœurs s’emballer quand tu les étreins. Avec Rory, vous sautez les étapes, c’est rare. Ça change, mais ça te plaît bien aussi.

Et, encore, t’es pas prête pour ce qu’il va suivre.


Parce qu’il finit par briser le silence, et pas pour ne rien dire.



C’est ce que tu veux ?
… Oui, en vrai.

Tu te dis que ça serait bien de reprendre un verre avant.
Ou peut-être pas, en fait.

T’es pas sûre.
Pas sûre de toi.
Ça change.

Du coup, tu hausses les épaules avec un petit sourire enjôleur, pour éviter de buter sur tes mots.
Quand il te prend la main, tu tressailles un peu. T’as froid, c’est normal.
Et quand il te sourit, là, à côté des vestiaires, tu sens ton cœur s’emballer. La faute aux cocktails que tu t’enfiles un peu trop vite, sûrement.


… Ok, tu perds peut-être un peu le contrôle, tout compte fait.
Merde.
Ça, ça te plaît moins, tout d’un coup.
Faut que tu fasses un truc.
N’importe quoi pour pas “perdre”. Pas revenir la Rin niaise, la Rin timide, la Rin fleur bleue.
T’as déjà donné, t’es passée à autre chose.
Caitlyn, c’était y’a plus de trente ans.
Plus jamais ça.


Alors tu profites qu’il soit dos au mur pour venir l’y plaquer, un peu plus brusquement que tu voulais.
Tu délies ta main de la sienne pour venir la passer dans ses cheveux.
Tu te hisses sur la pointe des pieds pour venir l’embrasser, et disons simplement que tu fais pas les choses à moitié.
Loin d'être assez ivre pour lui fourrer disgracieusement la langue dans le gosier, non, mais assez déterminée pour lui faire comprendre très clairement ce que tu veux.


Et puis, l’air de rien, tu te recules pour récupérer ton manteau aux vestiaires avant de lâcher par dessus ton épaule :



L’honneur est sauf.
Ouf.