Sköll - The only One
Aujourd’hui devait être une journée comme toutes les autres. Tu es allé en cours, cours qui prendront bientôt fin. Il faut admettre que tu as très hâte d’obtenir ta licence pour tes potions, te permettant (tu le pourras déjà, mais bon. C’est ton choix et tu ne peux que te blâmer pour cela) de les vendre au prix courant, puis d’offrir une plus vaste sélection. En plus de vendre tes pousses, ça te fait un petit revenu sympathique qui t’est très utile. Et maintenant que Kyo commence à payer pour ses potions, ça t’aidera grandement. Bientôt, la confection de potion de soin sera à ta portée, n’ayant plus à en acheter. Voilà une autre économie non négligeable pour toi, puisque'il t’en faut une pour chaque grande utilisation de ton pouvoir. Bref, tout est positif, mais la vie — ou la mort — suit son chemin habituel. Ce soir, c’est prévu que ton frère passe chez toi et que vous vous baladiez en ville, ensemble. Il faut admettre que tu le négliges quelque peu, le voyant moins souvent. À ton sens, c’est normal, bien que tu comprennes très bien les sentiments que ça peut lui faire ressentir. Te mettre à sa place n’est pas difficile. Il faudrait que tu le présentes officiellement à Leone, aussi... Toutefois, tu retardes ce moment, le redoutant. Et s’il préférait Rik à toi? Cette question t’attire un soupir. Il vaut mieux ne pas y songer plus longuement. Chaque chose en son temps.
Donc, de retour chez toi tu te prépares pour la sortie avec ton jumeau. Vous allez sûrement choisir un restaurant en passant devant. Vous le faisiez parfois lors de voyages communs, belle façon de découvrir la gastronomie d’un pays ou d’une ville. Par contre, vous êtes aussi tombés sur de très mauvais endroits en procédant ainsi. Serez-vous plus prudents ce soir? Vu le goût du risque qui peut — souvent — vous animer, ça serait étonnant. Tu optes pour des vêtements décontractés, qui sont assez chic pour certains établissements plus haut de gamme. Clés, portefeuille et portable en poche, tes mains bataillent pour tenter de mettre un peu d’ordre dans tes cheveux quand on frappe à la porte de ta chambre. À peine le temps d’ouvrir la bouche que l’intrus se permet d’entrer. Ça devient une habitude... « Rik tu pourrais attendre que je te dise d’entrer... » Tu lui parles sans même te retourner. Les chances qu’il s’agisse d’une autre personne sont très minces. « T’as qu’à verrouiller. » Soupir. Il a un double de la clé et n’hésite pas à s’en servir. Ça serait inutile. Il aime bien empiéter sur ton espace personnel et sur ton intimité. Ça a toujours été ainsi.
Bref, quelques minutes et vous voici sortis. Le premier sujet de conversation est de demander à l’autre le déroulement de sa journée, si tout s’est bien passé. Ce n’est pas qu’une forme de politesse, vous vous intéressez réellement à la vie de l’autre dans tous ses aspects, même les plus futiles. C’est un des nombreux facteurs qui contribue à votre si bonne entente et à votre lien fort. Le bavardage de base passe relativement vite. Vous vous envoyez des SMS presque tous les jours, alors des nouvelles il n’y en a pas beaucoup quand vous vous voyez. Donc, Rik ne tarde pas à revenir à la charge avec un sujet particulièrement embêtant pour toi. Et il le sait très bien, sans en connaître la raison. C’est ce qu’il aimerait bien découvrir. « Alors Riz, tu me le présentes quand? » Tes yeux roulent dans leur orbite. Tu en as marre de cette question, bien que tu comprennes que plus tu attends et plus elle devient légitime. « J’attends que vous ayez des dispos en commun. C’pas facile avec toi. » C’est faux. Il y a eu des occasions et il y en aura forcément d’autres. C’est d’ailleurs des plus étonnant qu’ils ne se soient jamais croisés, ne serait-ce quand Rik fait des intrusions dans ta chambre sans prévenir. « Ne rejette pas ça sur mon dos. Pourquoi tu retardes volontairement? » Ouais, il n’est pas idiot et il te connaît très bien. Tu le sais. Tout comme tu savais que cette déduction allait survenir un jour ou l’autre. Néanmoins, il est hors de question de partager ta réelle crainte. « Je vais essayer d’organiser ça bientôt. » Un sourire, bien qu’à l’intérieur, ce sont des émotions d’angoisse qui se manifestent. « T’as intérêt! »
Il rit, mais son rire cesse brusquement alors que son regard est rivé droit devant. Intrigué, tu regardes au même endroit puis la surprise est immense. « Est-ce que... c’est... » Rikchasz ne parvient pas à terminer sa question. Et tu ne parviens pas à répondre non plus, puisque tu déduis parfaitement ce qu’il allait demander. C’est impossible. Tes lèvres s’entrouvrent, ton souffle s’en échappe, mais ta voix reste bloquée. Il te faut fermer les yeux quelques instants, puis les ouvrir pour constater que l’animal, le chien pour être plus exact, est toujours présent, là devant toi. « S-Sköll? » Tu le reconnaîtrais entre mille bergers allemands à poil long. C’est forcément lui. Ça se confirme quand le chien réagit en secouant la queue. Ton frère et toi avez le même réflexe de poser votre main sur votre bouche. Pour une raison qui t’échappe, ton chien baisse la tête, comme en signe de soumission ou de honte, bien qu’il continue de secouer la queue. « Pourquoi il est comme ça? » Une question que tu souffles à Rik, ne comprenant pas. « Je l’ignore. C’est toi le dernier à l’avoir vu. » En plus d’avoir vu le film de ta mort... Il faudrait peut-être le visionner de nouveau pour comprendre le comportement de Sköll. « Tu crois qu’il peut s’en vouloir de ne pas t’avoir sauvé la vie? » Ton regard revient brusquement vers ton jumeau. Oui, en regardant la vidéo encore, ça sera plus simple de savoir s’il a raison. « Si c’est ça », dis-tu d’une faible voix. Tu poses ton genou droit par terre. C’est plus facile de te relever avec ta bonne jambe, soit la gauche. « Approche Sköll, je t’ai tant cherché mon chien... »
L’émotion grimpe, les larmes te montent aux yeux. Elles symbolisent toute la joie que tu ressens qu’il soit là, qu’il soit à ta portée. Après plus d’un an et demi à te demander si un jour, tu le retrouverais... Tu tends les bras, puis le berger s’approche lentement. Il semble renifler à distance, comme pour s’assurer de ton odeur, s’assurer qu’il s’approche de la bonne personne. « C’est moi Sköll. » Ce ne sont pas les retrouvailles que tu imaginais, mais ce sont les retrouvailles que tu attendais désespérément. Finalement, le chien court jusqu’à toi, envoyant ses deux pattes avant sur tes épaules et te léchant vigoureusement le visage. Tes doigts se perdre dans son pelage, tes bras le serrent quelque peu contre toi. C’est irréel, c’est un mélange puissant de sentiments. C’est un bonheur pur, un bonheur auquel tu commençais doucement à renoncer. Les minutes défilent jusqu’à ce que tu sentes la main de Rik sur ta tête. Levant les yeux vers lui, il se penche et vient t’offrir un câlin improvisé, incluant Sköll qui se met à le lécher aussi. Il l’a reconnu. Il vous a reconnu... après tout ce temps.
Quand tu te relèves, ton frère fait de même. Il avait des mouchoirs dans ses poches alors il t’en file un, tu peux t’essuyer le visage. Cela fait, Rik le reprend pour aller le jeter dans une poubelle pas très loin. « On rentre? » Sköll connaît ces mots, tu le sais. Alors tu t’attendais à une réaction positive, à ce qu’il agite la queue et te suive avec enthousiasme. Ce n’est pas ce qui se passe. Un petit jappement lui échappe et il tourne sur lui-même. Il se comporte comme s’il voulait que tu le suives. D’un geste de la main, tu incites ton frère à faire de même. Le berger vous guide jusqu’à un buisson, un buisson d’où s’élèvent des bruits. Un chaton en sort en voyant Sköll. Boule de poils d'environ cinq mois, rousse et blanche. Trop adorable. La surprise revient animer tes traits. « Alors c’est ce que tu faisais, tu prenais soin d’un chaton? » Nouveau jappement. Tu le sais, il ne voudra pas partir en laissant ce petit à cet endroit. Te voici donc l’heureux propriétaire d’un chat en plus de retrouver ton chien. Tu ne t’attendais pas à cela. Mais... ce n’est pas grave. « Je peux le prendre avec moi ? » Nouvel étonnement tandis que ta tête bouge dans la direction de Rik. « Ils ne se perdront pas de vue et j’ai toujours voulu avoir un chat. » Il arbore un large sourire, espérant que sa proposition soit acceptée. Pour ta part, tu n’y vois pas d’inconvénient. Il prend le chat et l’installe confortablement dans ses bras, contre ses pectoraux. Sköll n’y réagit pas négativement, alors la solution semble adoptée!
« Je suis tellement content Rik, ça n’a aucun sens. » Ton frère se contente de te sourire. Il est lui aussi très heureux pour toi. Tes mains se saisissent de ton portable dans ta poche, venant pianoter un rapide SMS pour Leone. Tu lui dis que tu as une très bonne nouvelle à lui annoncer, lui demandant de t’appeler dès qu’il le pourra. Impossible de ne pas partager ta joie avec lui. « Le restau va attendre un autre jour. » Mais au fond, ce n’est pas grave. Vous pouvez encore passer votre soirée ensemble. C’est juste qu’il y aura des boules de poils pour la partager avec vous.
21.08.19 5:42