Elle le connaissait par cœur et pourtant si peu, ils se connaissaient, elle aurait pu reconnaître sa silhouette n'importe où, dans le noir complet elle aurait su le retrouver, elle savait son odeur, ses habitudes sa taille, sa morphologie, son visage, ses mimiques, ses manières, ses habitudes, ce qu'il mangeait, comment il dormait, sa façon de bouger. Elle connaissait tout de lui sans tout savoir Elle savait qu'une partie de lui lui restait interdite tout comme une partie d'elle lui restait inconnue, du moins le pensait-elle. Mais elle savait également une chose, dans tout ce qu'il ne lui avait jamais dit il y avait une énorme souffrance, il y avait quelque chose qu'elle ne pourrait jamais guérir totalement, quelque chose sur laquelle elle n'avait aucune emprise. Mais tout comme elle n'était pas prête à lui révéler ses fractures et ses blessures de vivante elle était parfaitement consciente que malgré ses souffrances elle n'égaleraient jamais sa perte, ce qu'il avait perdu, ce qu'il avait vécu, ce dont il était mort. Et pourtant, pourtant, dieu savait ce qu'elle avait souffert de sa vie, de sa mort, de ses manques et de ses espoirs perdus, mais en Toulouze sommeillait quelque chose de bien pire, quelque chose auquel elle n'avait pas accès. Elle le laisserait venir, ça viendrait, ils en parleraient un jour, mais dans les cauchemars du grand zombie, dans les habitudes de son amour, dans sa façon de dormir au sol, de se comporter elle décernait cette immense fragilité qu'elle couvait comme une poule couve ses œufs.
Elle aimait tout en lui, même son caractère, même ses exigences et ses caprices. Elle aimait celui qu'il était, n'avait aucun doute qu'elle aurait aimé celui qu'il avait été et qu'elle aimerait celui qu'il sera. Elle doutait plus d'elle même parfois, parfois elle avait si peur qu'il parte et qu'il la laisse, mais il était toujours là. Elle le regardait descendre la brique de lait et tremper sa tartine dans le pot de confiture, elle essuyait le reste qu'il s'était collé sur la joue alors qu'elle même s'en foutait partout. Elle savourait ces moments comme volés au temps lui même, ce moment où il posait la tête sur ses cuisses, où elle caressait ses cheveux en le dévorant des yeux, elle le trouvait beau, même avachi tel un matin de dimanche, avec la flemme et a fatigue accumulée. Elle attaquait déjà le pain frais qu'elle dévorait comme un gremmlins alors qu'il se reposait sur elle, le calme revenu. La nécromancienne versait déjà du café dans un mug quand il écarquilla les yeux tandis qu'elle savourait sa tartine, s'étalant toujours plus de pâte à tartiner sur le visage comme une enfant fière de sa farce. Sauf que ce n'était pas une farce, elle avait réellement acheté la fameuse série et elle se délectait de sa réaction. Elle avait une autre surprise pour lui mais elle attendrait.
« Oui, l'intégralité Älskling, vraiment. »
Il clignait des paupières rapidement, elle riait doucement, heureuse. Ce n'était pas si évident de lui faire plaisir, il fallait le connaître, mais elle le connaissait et elle savait que les journées et les soirées canapé à regarder la série allaient commencer, si tant est qu'ils soient assez attentifs une fois la nuit tombée. Elle le vit cependant froncer les sourcils, elle savait ce qui allait venir et ça ne loupait pas.
« Tu n'es jamais satisfait... »
Il lui faisait déjà sa moue à laquelle elle ne résistait jamais, ce n'était absolument pas juste mais ça marchait à chaque fois, et elle n'avait pas réellement besoin de travailler, elle avait largement de quoi faire tout en sachant que Cassian s'occupait d'une partie de son business maintenant. Il pouvait la manipuler si facilement, c'était dingue.
« Si tu continues je ne te dis pas quelle est ton autre surprise... »
Elle jouait avec lui bien évidemment, elle allait annuler tous ses rendez-vous prévus et prendre deux bonnes semaines de tranquillité pour regarder la série avec lui et profiter de son temps libre, mais elle voulait le faire marcher un peu. Elle voulait qu'il s'interroge et ne la prenne pas totalement pour acquise, même si c'était déjà le cas. Mais sa moue l'avait déjà conquise.
« J'ai dit soirée ? Je ne suis plus sûre. »
Elle continuait à boire son café et à faire l'innocente comme si de rien était, il n'était pas le seul à savoir faire durer le suspense, et encore moins à savoir faire marcher l'autre, même si au fond il savait qu'il pouvait tout obtenir d'elle s'il le demandait et que c'était possible, Toulouze avait décidément un pouvoir certain sur Teodora.