Un poing c'est tout. [FEAT Jyosako Daito]

-Je suis désolé, mais ... Je ne me contrôle pas, je sais pas comment les cacher ..

Je ne pouvais toujours pas rouvrir les yeux, mais son changement de ton eut pour effet de ne pas me faire paniquer encore plus que ça l'aurait sûrement été s'il s'était mis à gueuler ; acte que j'aurais compris car se faire agresser par un bout de pull en coton par une espèce d'hystérique n'est pas des choses les plus plaisantes. Enfin pour gens normaux, après pour les autres tarés je n'en sais fichtre rien.
Je tressautai légèrement quand je sentis une main se poser sur mon poignet avec délicatesse mais, ayant l'impression que ce n'était pas dans le but de me faire du mal ou du tort, je laissai faire. De toute façon j'étais totalement paralysée, donc bon. Mes doigts avaient du mal à lâcher le tissu, durs comme des morceaux de béton armé, et encore froids de panique. Toutefois, comme par magie, ils parvinrent petit à petit à relâcher la pression et se détendirent un peu sous l'effet de la tiédeur de la main de l'autre, et le tee-shirt tomba à terre, reprenant sa place dont je l'avais dérangé pendant ma crise d'angoisse. J'entrouvris légèrement un œil puis l'autre, le souffle encore court et ras.

-N'ayez pas peur, si j'aurais voulu vous faire du mal, je l'aurais fait depuis longtemps rassurez-vous .. , murmura la voix du vampire.

Ces paroles.... oui.... étrangement,... elles m'apaisèrent. Mon cœur calma progressivement son rythme effréné où l'avait jeté la peur, et ma respiration suivit peu à peu son exemple. J'ouvris des yeux surpris. La vision des canines qui s'était imprimée le temps de mon pétage de plombs était partie et le fait que mon partenaire de bagarre me tourne le dos m'évite de refaire une éventuelle crise en les revoyant. Je l'observai passivement s'éloigner un peu de mon regard encore légèrement stupéfait. Puis, je sursautai et me secouai la tête, reprenant enfin totalement mes moyens.
Impulsivement, ou plutôt, naturellement, je fis un pas en avant, et je lançai calmement :

-The name's Yzevi. Nice to meet you even with all this mess

J'avais ressenti le besoin de me présenter, même brièvement comme ici, et ça me suffisait. J'avais envie de le remercier pour toute son aide mais étrangement les mots ne parvenaient pas à franchir la frontière de ma bouche comme s'ils étaient de trop. C'était peut-être le cas ; peut-être que ça ne l'était pas. Je décidai d'attendre une petite minute pour voir s'il comptait à son tour déclamer son nom. Qu'il le fasse ou pas, je comptais bien rentrer à l'Agence juste après, j'en avais après tout assez fait pour la journée entre cette énième promenade, la baston et ma crise de panique. En plus la nuit tombe, ça risque de devenir peut-être plus risqué de traîner dans les rues.
Tiens ça me fait penser qu'il faudra peut-être que j'aille acheter des œufs et de la farine pour faire des crêpes, ça pourrait faire plaisir à mes colocataires. J'espère juste qu'il n'y a pas des intolérants au gluten gn.

Je ne me rendis pas compte sur l'instant que j'avais switché du français à l'anglais, mais je tiltai seulement quelques secondes après. Toutefois, le jeune homme aux cheveux d'ébène se retourna, le sourire aux lèvres, il lança à son tour :

-Et moi Jyosako.

Jyosako ? J'essayerai de retenir. Bon, ça ne devrait pas être trop compliqué car en général j'ai une plutôt bonne mémoire. … En général. Mais j'oublie rarement les faces des gens.
Haussant les épaules, il m'adressa même un salut militaire qui me fit sourire à mon tour et m'arracha même un petit rire. Finalement, il était peut-être gentil sous ses airs de loup furieux. Enfin, il l'était sûrement, sinon il ne m'aurait pas aidée.... enfin je pense ? Je ne sais pas, je ne le connais pas assez pour pouvoir l'affirmer avec certitude.
Même s'il était de dos, reprenant son propre chemin, je lui adressai un petit signe de la main en réponse à son salut, un signe d'au-revoir, et fis de même, direction Gagarine. Il me suffisait de prendre mon chemin inverse de toute façon ? Boh, de toute façon à chaque fois je finis toujours par atterrir là où je veux ; j'espère juste que ça ne sera pas trop tard. J'aimerais ne pas avoir d'ennui du genre tomber sur d'autres savants complètement chtarbés qui sont même prêts à se faire tabasser pour leurs expériences déjantées. Je me fis la réflexion que c'était pas si mal de finir la journée des rencontres sur un au-revoir avec cet homme. Drôle de journée quand même.
Je devais l'avouer, j'avais fait de sacrées rencontres depuis que j'étais ici. Et étonnamment, le fait d'avoir mis quelques coups lors de la baston m'avait assez défoulée pour que toutes les pensées qui m'assaillaient depuis son arrivée me foutent la paix rien que pour cette instant de solitude qui n'avait rien de pesant, ou plutôt qui avait tout de reposant. Aaah, peut-être que je devrais me battre plus souvent. Non. Bien sûr. Ceci est une blague hein. Je suis pacifiste, je ne tiens pas à aller faire la tournée des coups et à recevoir une même tournée. Mais l'idée de trouver un moyen pour me défouler de temps en temps, autre que de marcher à longueur de journée, est pas mal, faudra que je la garde. Sauf si je l'oublie dans tous mes flots intérieurs.
Remettant les mains dans les poches, je pris de nouveau le pont, le traversant dans l'autre sens, profitant aussi des dernières lueurs du crépuscule pour goûter plus loin à la douceur des bras de la nuit qui peu à peu s'ouvraient dans les cieux colorés...