ne me lâche pas la main ft. warren

« Hop là ! »

Le pied solidement ancré dans un gros caillou, la jambe légèrement pliée, tu prends appuie sur cette dernière pour te passer la main dans les cheveux en regardant au loin avant d’enfoncer de nouveau ta casquette sur la tête. Il fait bon mais pas trop chaud et tant mieux sinon t’aurais fini trempé·e de la tête aux pieds ou presque. C’est clairement plus demandant que tes séances de sport habituelles mais en même temps tu t’attendais à un peu plus de challenge. Bah, ça fait du bien aussi de se détendre de temps en temps. Un regard vers ton compagnon de fortune, ta bestie, ta bff comme les jeunes disent et te voilà tout sourire.

Cette idée de rando est clairement le résultat de vos deux esprits impulsifs, d’une envie de juste marcher. Partir comme ça -et ça s’est décidé le matin même sans plus de concertation qu’un hochement de tête entendu entre vous. La destination semblait évidente : le mont Fuji. Ni trop inaccessible ni trop simple, une belle vue, un beau temps. Tu l’aurais suivi n’importe où même au fond des égouts surtout que ça aurait pas été ta première fois -étrangement. Mais c’est quand même plus sympa de sentir le vent te caresser le visage et souffler dans les quelques mèches qui ne tiennent pas dans ta queue de cheval que de respirer la bonne odeur d’eau croupie qui passe sous la ville. Vous avez bien avancé même si clairement le plus gros du chemin reste à faire et vous parlez, inarrêtables, intenables. Tu lui parles de ton boulot, des potins et tu sais qu’iels t’écoutent avidement. Ça te fait marrer et plus d’une fois ton rire perce et percute la surface rugueuse des cailloux qui traînent par-ci par-là.

Plusieurs fois aussi tu te stoppe, fixant l’horizon et prenant le temps de prendre une photo, sortir ton carnet et gribouiller à une vitesse qui égale celle de Foulques lorsqu’iel doit écrire le dernier ragot en vogue qui passe par ses oreilles. Et tu l’admires pour ça ; tout comme tu l’admires pour son énergie, sa bonne humeur. Ça te semble si facile et naturel de passer du temps avec elle et tu trouves que vous formez un bon duo. Un peu chaotique, certes, mais au moins aucune chance de s’emmerder. Alors que tu lui fais signe que t’en a fini avec ton croquis, tu pointes ses chaussures et les lacets qui pendouillent contre le temps. Tu te marres les bras croisés contre ton temps et t’attends patiemment qu’iel finisse. A sa question tu hausses les épaules ; c’est vrai ça depuis le temps que vous vous êtes retrouvé·e·s ? Tu hoches la tête, reprenant le rythme à ses côtés quand

« Aïe »

Un regard vers le coupable : un beau châtaigner qui devait en avoir marre de vous entendre. Ou qui vit juste sa vie d’arbre, c’est l’un ou l’autre

« Reste immobile, ouais, pour pas subir de conséquences.

Il a de la chance de pas finir découpé en petit bois ou en chevalet celui-là »

Tu souris de toutes tes dents, content de ta connerie

« On essaie de nous saboter, Warren.

C’est clair, ça sent le complot ! Méfiez vous les arbres on sait se défendre aussi … Tiens fais voir si t’as une bosse ou pas »

Après une inspection rapide tu lèves tes deux pouces, signe que la caboche de Loulou devrait tenir encore plusieurs siècles sans problème. Tant que la faune locale vous laisse tranquille, le reste de la randonnée devrait se faire sans soucis. T’inspires un coup, profitant de l’odeur légèrement plus boisé qui entoure ce bout de sentier. Un léger soupir de satisfaction et vous voilà de nouveau en mouvement

« Tiens, tu devrais boire un coup d’eau avant de finir séché·e comme une prune. Au faite tu parlais des promenades en France … »

Tu marques une pause

« … Ça te manque pas toi, des fois ? »