Une intrue || PV : Terri

Ah. L'écho de sa sentence après un long silence brisé seulement par ses reniflements. Terri se pétrifie. Elle a déjà entendu ça. Ah, la déception non dite mais qui plane au-dessus de sa tête comme un vautour. L'oiseau n'a pas le temps de s'attaquer à ses entrailles, la culpabilité la ronge déjà de l'intérieur. Ah, elle aurait dû si attendre, elle aurait dû faire mieux, elle n'aurait jamais dû mettre les pieds ici. Ah, on la regarde crouler dans son propre abyme et on lui tourne le dos quand elle n'a plus rien à offrir. Et elle creuse, creuse, creuse son trou pour se soustraire à leur regard et les épargner de son pathétisme.

Mais la suite, elle ne la voit pas venir.

Pourquoi ? Pourquoi et la promesse de ne pas l'engueuler ou la punir. Terri relève doucement sa tête inondées de larmes. Louis lui semble sincère. Que se passe-t-il ? On lui donne une chance, juste comme ça, de s'expliquer, de plaider son innocence ? Une main tremblante vient essuyer l'eau sous ses yeux tandis qu'elle reprend son souffle. La parole vient, plus facilement qu'elle ne l'aurait cru.

« J'avais pas vu… que c'était que pour les vampires. »

L'erreur est si bête. C'est humiliant, mais c'est la réalité. Et étrangement, c'est moins effrayant admettre sa  faute que de continuer à sombrer dans le puit de sa honte silencieuse. D'autant plus que Louis n'a pas la tête de quelqu'un qui déclencherait une guerre civile. Non, c'est un chic type. Vraiment gentil. Tellement gentil que Terri ne sait plus comment se placer. Elle resserre un peu ses bras autour de ses jambes.

« Je pensais que c'était qu'une réunion pour les morts récents. Je suis désolée ! Je voulais pas du tout déranger. »

Miracle, elle n'éclate pas à nouveau en sanglots. Elle a seulement une tête de porg qui prie pour être épargné.

Est-ce l'œil de la tempête ou le pire est-il derrière elle ? Terri surveille Louis, à la recherche d'un signe de l'orage à venir. Rien ne vient. En fait, la suite est absolument anti-climatique, en rien comme les scénarios catastrophiques qui tournaient en sourdine dans sa tête. Si ce n'est que ça, pas de quoi en faire un plat, semble-t-il. Et d'un coup Terri se sent mal d'avoir réagi de la sorte, d'avoir pleuré et de s'être réfugiée dans un corridor. Mais cette honte est moins intolérable que la précédente, alors elle la range dans un coin de son cœur et renifle ses larmes.

Comme un professeur, il nuance sa faute. C'est une leçon douce et à laquelle elle souscrit pleinement. Oui, oui, oui, elle n'avait rien à faire ici vu la spécificité du groupe ça va de soit ! Elle hoche la tête énergétiquement, signalant qu'ils sont dans le même camp. Pas d'ambiguïté, pas encore, Terri ne pourrait le tolérer. Ses réflexes de lèche-bottes continuent à lui sauver la vie.

Les signes sont clairs, mais ils pourraient être trompeurs. Terri ne fait jamais confiance au sentiment de sécurité qui s'installe juste après une crise pareille – il faut attendre, voir, entendre, confirmer… Elle essuie le coin de ses yeux en demandant :

« Alors… je n'aurai pas d'ennuis ? »

Elle déglutit difficilement avant d'ajouter avec empressement :

« Je promets ça ne se répètera plus jamais ! »

Alors. La situation est résolue. Juste comme ça. Uh. C’est presque trop beau pour être vrai. Terri essuie les dernières traces de larmes sur ses joues, sous ses yeux. Ah, c’est qu’elle a vraiment pleuré. Que c’est embarrassant. Elle s’en mordrait les joues de honte, mais une autre émotion prend vite le dessus quand Louis lui attribuer un « derniers conseil » : la peur. Ah, le message est clair, pas besoin de l’épeler en toutes lettres : elle est surveillée, on lui a donné une chance cette fois et ce sera bien la dernière. Après, pas de pitié ! Peu importe ce que ça signifie. Sa gorge se serre douloureusement en acquiesçant de la tête.

Le vampire se lève. Terri devine qu’elle devrait faire de même. Elle dénoue ses genoux et se déplie sans grande peine, inconsciente de la difficulté que cela représente pour son vis-à-vis. C’est alors que les portes s’ouvrent. Les vampires sortent. Oh zut ! Elle avait presque oublié que l’endroit était rempli de vampires. Avant qu’elle ne puisse s’empourprer et prendre la poudre d’escampette de manière pas du tout subtile, Louis joue la comédie pour elle. Ni une ni deux elle hoche la tête en le regardant – sans oser croiser ses yeux.

« Oui, merci beaucoup ! »

Elle incline encore une fois la tête en salut et prend elle aussi la direction de la porte, la tête rentrée entre les épaules, évitant de regarder quiconque passerait à côté d’elle ou pire voudrait lui adresser la parole. Elle ne sait pas de quoi elle a l’air, mais il est clair qu’il vaut mieux passer pour snob ou mortellement timide que pour une humaine. La plaie. On ne la reprendra pas deux fois dans le même piège, et elle lira cinq fois les affiches avant de se présenter à quelque part, elle le jure sur… sur la promesse faite à Louis.