Après tout t'as mis des couplets, faut bien avancer

D'accord, il y a des stratégies pour se laisser désirer mais là, le mec abuse. Il a un sacré retard. Il aurait jamais dû payer une salle pour deux. Le mec lui a juste fait faux bond. Seul dans la pièce, le brun bien apprêté fait les cent pas avant de s'asseoir, furieux. Puis il se rassied en ayant comme idée de lui dire qu'il est arrivé, qu'il attend dans la salle.
Mais il ne connaît déjà plus le numéro.

À la porte, il n'y a aucun numéro indiqué. Pratique. Imprudent, Cassian laisse son long manteau mais prend tout de même son téléphone, se rendant directement à la réception pour interroger l'accueil. Personne hormis un garçon qui attend patiemment dans un fauteuil. Par politesse, l'américain le salue d'un petit geste ; ses grands gestes réservés au personnel qui peine à venir, traînant le pas. Lassé, on lui répond qu'il a réservé la salle numéro cinq pour une heure. Au départ ça semblait peu de minutes mais maintenant c'est trop de temps.

Téléphone en main, il en informe également l'autre personne, au cas où elle se serait simplement égarée. Mais peu plausible. Il aurait limite dû inviter le gars de l'accueil à chanter parce qu'il sent déjà que sa soirée est foutue. Profond soupir.
Signe avant-coureur, il ne commande qu'un cocktail et non pas deux, histoire de se bourrer la gueule solo, histoire que la salle ne lui serve pas à rien. Il hésite à inviter deux-trois potes qui n'habitent pas très loin mais iels n'auraient pas le temps de venir que la séance serait déjà terminée.

Mais en Cassian, il y a toujours ce maigre espoir en tout le monde qui le pousse à, de toute manière, rester seul pour le moment ; espérant qu'il attise assez l'attention pour que son rencard ait juste un contre-temps.

Ces jeunes… ils ne connaissent plus la ponctualité de nos jours…Luka est dépité. Certes, il est arrivé lui-même quelques minutes en retard. Mais cela n’a été que du ressort de cet incapable de chauffeur.

Son rendez-vous n’a pas pu arriver en un si court laps de temps. Notre rouquin consulte sa montre à gousset avec quelque peu de frustration dans ses prunelles couleur ciel. Avant de la ranger dans la poche de coeur de son costume blanc qu’il porte au dessus d’une chemise noir.

Il ne montre pas bien longtemps son mécontentement. Il faut bien saluer le brun qui lui a adressé un regard avant d’ensuite jouer avec son collier par habitude. Il ne restera qu’une minute de plus… Se dit-il avant de recevoir un message qu’il consulte non sans mal à entrer son code.

…Oh. Il se sent bête et se redresse directement, se dirigeant vers l’accueil pour qu’on lui indique la salle numéro 5. Il ferme les yeux une seconde, puis celle d’après il sourit en se recoiffant. Ce garçon a été bien familier lors de leurs échanges. Ses compliments et son air assuré lui avaient fait froncer les sourcils, la goutte de sueur sur la joue. Luka a encore du mal à se faire aux hommes cherchant à le séduire si ouvertement. Mais il faut dire que cette ouverture d’esprit des jeunes est bonne pour les affaires. C’est pour cela que Luka a accepté de le voir sans s’offusquer. L’alcool japonais venant du monde des vivants…on lui avait dit que quelqu’un cherchait à prendre contact avec lui. Quoi de mieux qu’user de ce visage adorablement doux pour négocier ?

Luka entre dans cette salle après avoir toqué deux coups pour annoncer sa venue. Un poli, notre rouquin, referme la porte après être rentré et s’approche du jeune homme. Il s’incline puis s’assoit face à lui en lui souriant.

“Bonsoir, excuse moi. J’avais pensé qu’on s'attendait devant l’accueil, et ne sachant pas à quoi tu ressemblais…”

Le lémure est fort pour jouer les idiot béats. Les gentils faciles à manipuler. Il sourit en se caressant l’arrière de la tête, les yeux clos. Il ne se rend toujours pas compte de l’énorme bourde qu’est la situation. Il pose son regard sur lui et croise les jambes, posant ses mains sur son genoux.

“Mais il est vrai que cela est plus discret ainsi. Tu es intelligent.”

Il lui sourit, ses yeux sont perçants. Il se croit irrésistible, en contrôle de la situation, et à deux doigts de conclure une affaire facile. Ce petit trafiquant ne sait pas ce qui l’attend. Un ou deux compliments hypocrites…Luka saurait encaisser.

Décontenancé par l'audace du rouquin, il n'est uniquement capable de l'entendre débiter des phrases insensées et l'observer prendre place dans le sofa pourpre. Il ne manquerait plus qu'il se serve dans son verre. Nerveusement, Cassian se met à sourire mais craque rapidement. Son rire est timide et teintée d'incompréhension.

« Et bien hm— Merci pour le compliment. Ça me semblait naturel, comme on a parlé d'intimité. »

Pour autant, le zombie continue la conversation comme si aucun problème n'existait alors qu'il y en a visiblement un. Alors il veut bien l'excuser. Mais ses excuses avant pour ce faux pas mais qui est ce type ? Oui, ok, c'est le gars qu'il a salué mais il ne pensait pas que son signe de la main serait compris comme une invitation.
Mais plus qu'une invitation, les conversations du dernier rendez-vous et téléphoniques semblent suivre leur cours. Il semblerait donc que ce mec soit bien celui qu'il attendait. Hébété, Cassian ne parle pas trop et se contente de se resservir de sa piña colada, ratant d'ailleurs la paille. Il risque bien de la finir en moins de deux tellement il se montre, cette fois-ci, silencieux.

Déconcentré par ses pensées, il suppose que Justin — son rencard — a bu quelques potions pour à ce point changer d'apparence. Lui-même y a recours donc il ne le blâmera pas mais... Franchement, il préférait le grand blond de la dernière fois. Cassian n'est certes, jamais lui-même physiquement, mais garde une constance pour ne pas perturber les gens qu'il fréquente. Ça ne semble pas le cas de Justin qui ne fait que le surprendre depuis le départ. Une fois c'est bien, trop c'est chiant.
Et ces yeux... C'est, oui, perturbant.
C'est gênant. À tel point que le brun a instauré très rapidement une distance entre eux, se réfugiant dans l'arrière du grand canapé, dans la pénombre.

C'est gênant de lui dire qu'il ne le trouve plus si beau.

« Hm. Je pense qu'on a un problème cela dit. Pourquoi tu es— Comme ça ? Je veux dire... T'as pas la tête que je pensais voir, là. »

Ayant pour habitude de réfléchir avant de parler, il a essayé de penser aux mots justes mais dans sa tête, ça sonnait moins violent que ça. Il commence à prononcer une excuse mais après tout, le mec le fait poireauter et change du tout au tout sans crier gare. Pourquoi devrait-il un seul instant être désolé ? Par politesse et pour continuer à être agréable avec, ce qui était, précédemment, une potentielle conquête, sans doute. Mais vu ce qu'il a devant lui, le zombie se constitue trop de scénarios. Des terribles.
Et si Justin était également un zombie ? Il n'ose l'imaginer.

A vrai dire, Luka sent après quelques dizaines de secondes que l’ambiance est étrange. Enfin, bien plus que devrait être celle d’une conversation professionnelle peu conventionnelle dans un karaoke. Ses deux prunelles parcourent le visage crispé du brun alors que le roux tient la carte des boissons en main. Le jeune homme ouvre la bouche et un silence s’installe. Avec lui, le doute, l’anxiétée tapie dans l’ombre de notre centenaire.

“On s’imagine rarement que j’ai un tel physique. Tu n’es pas le premier à me le dire.”, commence-t-il à répondre en fermant la carte.

Son ton est bien plus froid d’un coup, glaçant même. Son sourire ensoleillé est toujours là, pourtant. Le lémure prend en main son collier qu’il fait tourner entre ses doigts. Son regard fixe celui de l’autre homme. On l’a souvent complimenté pour son apparence. Mais dans ce milieu de gaillards machistes et toxiques dans leur masculinité…combien de fois avait-on pensé qu’il était faible ? Cela est pratique, dans certaines situations. Mais Luka, qui voulait en jouer un peu plus tôt, a pris la mouche. Il va montrer à ce petit bleuet qui est en position d’avoir des attentes.

“Ou alors tu pensais peut-être que j’enverrais un homme de main pour notre affaire ?”

Il décroise les jambes, lâchant son collier. Ses pupilles d’eau ont quelque chose de désagréable. Elles sont figées.

Alors que Justin se montrait plutôt timide lors du premier rendez-vous et qu'il était du ressort de Cassian de faire les premiers pas, les rôles semblent s'être inversés. Quand bien même semble-t-il être plus menu, l'autre homme semble comme détenir la situation entre ses mains alors qu'au fur et à mesure de la conversation, lui se crispe de gêne. Il n'est finalement plus sûr d'où il peut bien être.

D'autant plus que la conversation qu'ils entretiennent ne lui parle absolument. De quoi est-ce qu'il est en train de parler, là ? Ça n'a rien à voir avec un plan drague, ça. Une grimace constipe inlassablement son visage. Ce type a quelque chose de dérangeant, à autant jouer avec le pendentif, l'ayant plus entre les doigts qu'autour du cou, finalement.

« J'suis pas étonné si je suis le premier à le dire. T'étais blond, juste avant. Pourquoi je suis face à quelqu'un de roux qui mesure dix centimètres de moins, maintenant ? »

La parole est désobligeante, il en a conscience mais Cassian est un peu agacé de s'être fait avoir. Bon, de toute évidence, il l'aurait mangé à la même sauce sept semaines plus tard mais là n'est pas la question ; il l'aurait quitté avant. Il n'aime pas qu'on se fiche de lui donc rit au nez de la personne, avant. De la propre situation, le français pouffe en s'exclamant que tout ceci est ridicule, dans la même langue.

Franchement, il serait bien parti maintenant mais l'autre n'arrête pas de le fixer de ces prunelles si déconcertantes qu'il se sent si offensé. Oui, il est agacé et il faut bien le comprendre, tout de même.

« Comment ça m'envoyer un homme de main ? Je ne comprends rien à ce que tu me racontes, je pensais qu'on était clairs, toi et moi. Qu'on était venu ici pour baiser discret ! »

Il a dit le mot. Et instantanément il le regrette. Au fond de lui, il le sait. Ce n'est pas Justin. Mais au fond, il fallait peut-être le dire pour choquer ce gamin qui commence à un peu trop s'y croire. Les remarques de Cassian paraissent involontaires mais sont stratégiquement méchantes et tapent.
Même s'il reconnait que ce n'est pas l'homme qu'il recherche, c'est d'abord à l'autre de s'en rendre compte, de constater la boulette qu'il vient de faire.

T’étais blond. Blond ? …blond ? Luka hausse les sourcils, son visage exprime un peu de surprise. Il n’a jamais teint ses cheveux ni prit aucune potion. Et il n’a jamais rencontré cet homme. Cette soirée est censée être leur première entrevue. L’agrume sur pattes se redresse un peu alors que l’autre continue de parler. Il pourrait prendre très mal la remarque sur sa taille - au fond il s’en souviendra, mais il est trop pris de court. Le ton de ce gamin, la situation, cette conversation… Il n’est plus trop certain de l’avoir en main. Et ça, il déteste.

La suite lui fait entrouvrir la bouche de surprise. Sur le cul, il est complètement abasourdi. Et là tout semble flou. Lui qui était si certain de ce qui se passait et se passerait, qui détenait quelle place…il se retrouve con. Ses yeux se ferment alors qu’il sent des sueurs froides dégouliner dans son dos. Il est mal à l’aise. Qu’un homme le drague un peu en pensant pouvoir l’amadouer, c’était supportable pour les affaires. Qu’un jeunot pense pouvoir lui parler mal, c’était encaissable. Mais pas ça, ces mots-là l'avaient rebutés. Il fronça ses sourcils en passant une main sur ses mèches de devant pour les mettre en arrière.

Non seulement cette personne n’est pas le vendeur de boisson, mais en plus c’est un parfait inconnu, un bougre qui sort de nulle part. Luka a senti son corps frissonner en imaginant la chose avec l’autre. Se reprenant, il rouvre les yeux. C’est un civil, mais à quel point ? A quel degré avait-il compris de quoi Luka parlait ? A quelle sauce cuisiner une énergumène pareil.

Son sourire revient, mais tendu. Il va lui falloir un temps pour se remettre de sa boulette.

“Nous voilà déçus tous les deux, quel embarras.”

Il passe ses deux mains devant son nez pour retenir un souffle du nez, avant de croiser les doigts sous son menton.

“Qui es-tu ?”, son regard se fait plus bienveillant.

Déçu, le mot est faible. Cassian est même dégoûté. Clairement, il faut que ce mec arrête de lui parler parce que ça le fait grimacer de plus en plus qu'il risque d'attraper des rides. Il préfère qu'il se taise et juste se casser. Fin d'histoire.
Que l'autre soit déçu aussi, il s'en fiche. Tant pis pour lui. Tant mieux et bien fait, même ! Est-ce qu'il mérite encore du temps de Cassian ? La réponse est non.

« À quoi ça sert que je te dise qui je suis, hm ? Tu comptes sincèrement me rappeler parce que crois-moi, je ne vais pas te répondre. Ciao, mec. »

Reprenant le pardessus qu'il a laissé sur le porte-manteau, il se rhabille rapidement et part en vitesse avant qu'on ne le retienne. Clairement il ne l'écoutera pas chouiner, il n'a pas envie de se coltiner ce tocard plus longtemps. Il aurait beau hurler de revenir que Cassian ne l'écouterait pas. Or, il en est bien obligé parce qu'il se rend compte qu'il a oublié son sac. Grommelant dans sa barbe, il ne peut décidément pas lui laisser. Il est parti à la hâte mais ses potions sont trop importantes.

Déboulant à nouveau dans la salle, il ne lance pas un regard pour l'autre homme, cherche après ses affaires. Où est-ce qu'il l'a mis ? Dans sa quête, il est obligé de croiser le regard du faux Justin. Il croise les bras et soupire.

« T'aurais pas vu mon sac ? Je l'ai laissé dans le coin là-bas. Il m'a coûté un bras donc j'y tiens... »

Bien qu'il ne le veuille pas, il se met à épier fixement son vis-à-vis, méfiant désormais. Peut-être qu'il lui a volé mais s'il commence à le soupçonner, ça ne va rien arranger. Il va juste essayer d'être sympa, après avoir pété une durite. Ce n'est pas logique mais il va tenter de faire avec.

« Écoute. T'as peut-être pas fait exprès mais j'ai l'impression qu'on s'est foutu de ma gueule, comprends-moi. Je pensais être avec un autre mec, moi. Pourquoi t'as continué le jeu si tu savais que fallait pas me draguer ? C'est chaud quand même. »

Même si faire la discussion pour regagner son sac l'agace et qu'il l'estime obligatoire, au-delà de ça, il pense que c'est même obligatoire de comprendre. Pourquoi ce type a continué ? Ça le traverse vraiment. Profond soupir.

« Tu peux m'appeler Cody. »

Par contre, hors de question que Cassian réponde à ses questions. De toute façon, comme il vient de le faire ; pour se protéger de toute attaque ultérieure, le surnommé Cody mentira.

Luka reste silencieux alors que le brun quitte la pièce. Il ne le retient pas, il n’a même pas un mouvement pour le faire. Sa peau se tord entre ses deux sourcils un peu larges. Il a compris, c’est certain. Le roux n’a aucune idée d’à qui il a à faire. Il faut qu’il trouve un moyen de s’assurer qu’il va pas lui causer des embrouilles. Il a son numéro, pas besoin de le rattraper, il demandera aux autres. Aux jeunes du groupe.

Le roux pose le dos contre le dossier et relève ses yeux bleus au plafond. Il se demande comment cet homme a pu avoir son numéro. Pourquoi l’a-il contacté ? Pourquoi ce petit s’offusque comme si Luka était en tort ? Quel drôle de bougre.

Ce dernier revient d’ailleurs, juste après que notre croulant ait posé ses bras sur le dossier de la banquette pour se détendre. Il baisse le visage et devient spectateur de ce cirque. Luka le trouve vraiment étrange, ses yeux le dévisagent un instant alors que l’autre lui adresse de nouveau la parole. Le vieux croise de nouveau les jambes en parcourant la salle des yeux.

“Je n’ai rien vu de tel.”


Il se redresse cela dit, pour faire l’aimable cherchant avec lui. Il se demande si ce n’était pas une excuse pour revenir par curiosité. Les jeunes… La petite tête orange reste dos à Cassian lorsqu’il reprend la parole. Il n’a pas vraiment de réponse qui pourrait satisfaire le brun. Et lui même a bien des questions. Il se tourne vers lui, après quelques secondes. Passant une main dans sa nuque, faisant l'embarrassé.

“Je crains, Cody, que le vieux spectre que je suis n’ai pas bien compris l’erreur.”, Il joue sur son âge, pour éviter d’autres boulettes.

Il s’approche de l’autre se voulant plus accueillant pour que l’autre calme ses ardeurs. Un ruisseau tranquille, ce gringalet.

“Ton comportement et tes paroles étaient en accord avec la personne dont j’attendais les messages. Je n’enregistre aucun numéro, je ne comprend rien à ces machins. Y'a trop d'options."

Il lui tend la main en souriant. Ses yeux son fermés et il fait un petit rire gêné, jouant l’idiot. En fait, Luka le teste un peu. Il a été honnête, en omettant des détails. Il veut voir ses réactions, et comment agir en conséquence.

“Appelle moi Swann.”, il range ses mains dans ses poches. “Laisse-moi t’aider à chercher, pour le malentendu.”


Qu'est-ce qu'il faut pas faire....

Bordel le vieux, il a rien pigé. À quel moment a-t-il un téléphone si c'est pour aussi mal s'en servir ? Franchement, Cassian n'a pas le courage pour supporter un croûton pareil. Il se pince l'arête du nez pour épargner l'ambiance déjà bien néfaste des injures qu'il pourrait balancer inutilement. De même, il contient sa colère. De ce qu'il comprend, il n'a pas à l'être. Alors tout au plus, son visage reste uniquement placidement lassé, plutôt que bouillonnant. Ça l'agace de devoir expliquer ce qu'il venait faire ici mais il l'a déjà dit. Il n'a clairement pas envie de se faire juger donc il pèse ses mots.

« J'ai vu un garçon hier. Ça a bien marché, en tout cas je le pensais, et je voulais lui envoyer un SMS mais il m'a visiblement donné un mauvais numéro. Il a pas dû kiffer, lui, visiblement. Et je suis tombé sur... »

Un instant, il regarde le garçon ou plutôt l'homme plus vieux que lui, à priori. Il hésite à lui demander son âge, à repasser au vouvoiement. Question de politesse, ou pas.
À le voir, il n'a pas l'air si mesquin mais quand même, faut être sacrément con pour ne pas voir que Cassian flirtait. Quel genre de quiproquo pouvait-il y avoir pour qu'il se plante à ce point ?

« Vous dîtes que vous m'avez pas fait marcher alors ? Vous vous attendiez à voir qui alors, surtout en tête-à-tête au karaoké ? »

Inoffensif, certes, tout le long, Swann ne s'est pas montré hostile. Pour autant, il lui a quand même parlé d'homme de main et c'est louche. Patient, les bras croisés, Cassian ne relève pas ce détail et se le garde sous le coude. Plus si pressé, il est toujours là et ne prend plus la porte. De toute façon, normalement, c'était prévu qu'il passe du temps ici donc il n'a nulle part où aller. Il étudie le visage du vieux gringalet mais n'y voit rien.

« Vous auriez pas un peu de lumière pour qu'on y voit plus clair ? Attendez, donnez-moi votre téléphone, je vais vous montrer comment on met la lampe torche. »

Ouais, s'il est vieux que ça, c'est sûr que le type ne sait pas se servir de toutes les options, comme il dit. Faut bien lui montrer tous les boutons, à papy.

Luka observe l’autre se dérider…ou du moins essayer. Il laisse tomber sa main que le brun n’a pas prise. Il le trouve vraiment malpoli. Encore une fois, qu’est-ce qu’il faut pas faire… Ce jeune homme n’a clairement rien à voir avec la personne qu’il doit rencontrer. Il est si insolent, si impatient, si impertinent…il mérite quelques claques.

Cela dit, Luka écoute son histoire. Cette dernière lui fait hausser les sourcils alors que tout s’éclaire. Il n’a pas pensé à cette possibilité. Ayant naïvement crû qu’on ne pouvait lui envoyer de message sans connaître son numéro. Le plus si jeune homme pose ses longs doigts sur ses lèvres dans un mouvement de surprise. Il se sent très con.

Forcément, Cody pose la question qu’il ne faut pas. Le vieux Coldwell garde cette posture un instant, se haïssant intérieurement. Heureusement, lors du départ précipité de l’autre, il a pensé à un début d’excuse. Il faut qu’il continue sur cette voie. Il ferme les yeux, avant de les poser sur lui en amenant sa main à son cou pour jouer avec son collier.

“Je suis à la recherche d’un objet qui m’appartenait de mon vivant. Un de mes employés m’avait parlé d’un homme qui pourrait le chercher pour moi…”, il fronça les sourcils. “Et qui me contacterait pour le rendez-vous.”

Il rit de gêne, lâchant son collier, sortant son téléphone pour le tendre au brun (non sans plusieurs tentatives avant de le déverrouiller).

“Je pensais que tes avances étaient de la lèche pour que je te paye plus.”, ça par contre c’était vrai.

Au moins le jeune homme s’est enfin mis à le vouvoyer. Luka préfère largement cela, il se sent plus détendu. Il feint un peu moins son sourire. Mais il est encore très mal à l’aise de la situation au fond. Il repense à leur échange écrit… les sous entendus semblent d’un coup un peu trop…trop. Le rouquin observe Cody trifouiller son cellulaire. C’est un vieux modèle, de deux ou trois ans. Il est comme neuf, vraiment : il n’a changé aucun fond d’écran, aucun numéro n’est personnalisé. Au fond, la seule chose qui donne un peu de personnalité à ce petit écran, c’est le nombre incalculable de photos prises sans faire exprès. Des photos floues, de poche, de gros plans sur le nez de Luka, de doigts… Il voit d’ailleurs l’écran sur l’appareil photo ouvert par mégarde, quand il prend le téléphone.