Nine life for a cat [Pandore & Céleste]

Aujourd’hui est une journée typique pour la chimère. Après avoir préparé le petit déjeuner à Gulliver, elle s’empresse d’avaler le sien, de boire un grand verre de citronnade fraîche avant de s’en aller pour le reste de la journée. Vêtu de sa salopette préférée, les cheveux noués en queue de cheval comme à son habitude, elle a dû laisser derrière elle son écharpe préférée; le temps ne lui permet pas de la porter, à moins de vouloir faire un malaise. Pandore doit bien concéder quelque chose au Japon, l’approche de l’été est la pire des saisons dans le pays du soleil levant. Si l’hiver ne paraît pas insurmontable, voire agréable pour elle, son contraire prend l’apparence du feu des Enfers, donnant presque envie à la chimère de ne pas travailler. Luttant contre, elle se souvient de son rêve et avance à grande enjambée en direction du Sanctuaire.
Bouteille attachée à la ceinture grâce à une petite invention de sa part, elle trouve sa place à l'opposé de son carnet. Pandore s'affaire à droite et à gauche, apportant à manger et à boire à tout le monde, soignant ceux qui en ont besoin jusqu’à ce qu’on vienne la chercher. Non pas que les êtres humains ne l'intéressent pas, la zombie a juste oublié qu’aujourd’hui quelqu’un avait pris rendez-vous, ce qui est plutôt rare. Non loin d’elle, la jeune berger australien s’amuse à courir à droite et à gauche en attendant sa prochaine tâche. Pour éviter d’être dérangée, elle l’envoie jouer avec les autres pensionnaires canins. Au même moment, une voix s’élève dans son dos. Pandore pivote son corps pour faire face à l’étrangère, l’observant de haut en bas de son regard rosé.

“Bienvenue au Sanctuaire. Vous êtes au bon endroit pour une adoption. Avant toute chose, avez-vous déjà eu un animal par le passé ? Savez-vous de quoi ils ont besoin ?”

Adopter un animal, ce n’est pas un jeu et la zombie est prête à sanctionner toute personne qui prend cela pour un jeu.

Avec des années de vie, la chimère a appris à ne pas juger un livre à sa couverture. Elle sait parfaitement qu’un enfant peut se cacher derrière une apparence d’adulte avec une simple potion, mais il est aussi rare pour eux d’être libre sans un aidant. La personne en face d’elle, une jeune femme blonde dont la carrure semble un peu plus développé que les autres femmes qu’elle a l’habitude de fréquenter. Pandore est loin d’avoir la déduction de Sherlock Holmes, mais loin des préjugés, elle pense que cette femme adulte a un peu de vécu et surtout, elle travaille. Dans un haussement de sourcil, et surtout sans un mot, elle écoute sa réponse digne d’un roman à l’eau de rose. Encore une personne naïve, pauvre âme ignorante mais surtout, ses pauvres animaux qui se voient subir la bêtise des humains. D’un mouvement maîtrisé, la chimère se saisit de sa bouteille pour se rafraîchir un peu, la chaleur commence à lui faire des misères.

“Ne vous avisez plus jamais de sortir ce genre de réponse devant moi si vous tenez à pouvoir rentrer encore en ses lieux.”

Elle range sa bouteille et relève son regard vers son interlocutrice dont la taille excède bien la sienne, mais Pandore n’en est clairement pas intimidée, au contraire. Elle retire ses gants pour dévoiler des mains endurcies à force de travailler, et les met dans une de ses poches.

“Si un animal n’avait besoin que de cela pour vivre alors il ne serait pas aussi nombreux au Sanctuaire.”

Elle soupire avant de crier “Astra”, d’une voix douce mais ferme. La chienne s’empresse de revenir à ses côtés et d’un geste de la main, elle lui indique de s’asseoir près d’elle.

“Vous avez dit être là pour un chat mais je pense que je peux tout de même vous expliquer avec ma chienne. Je vous présente Astra, une jeune berger australien, elle a beaucoup de caractère et d’énergie. Un animal n’est pas seulement là pour vous tenir compagnie quand vous le désirez, ce sont des êtres vivants comme vous et moi, ils ont besoin d’attention en permanence. Loin d’être doté de la parole quand ils ont mal ou sont malades, ils ne le vous le diront pas directement, ils chercheront à vous le faire comprendre mais si vous n’êtes pas là, cela ne sert à rien. Possédez-vous un emploi ? Quand êtes-vous chez vous ? Êtes-vous prête à sacrifier de votre temps pour vous occupez de cette pauvre âme ?”

La dissuasion est le meilleure moyen de faire fuir les plus idiots, Pandore n’a pas besoin de confier une pauvre âme à une personne incapable de s’occuper d’elle-même.

Inconsciemment, les sourcils de la chimère se fronce à sa réponse. Encore une personne naïve, elle doit certainement penser : “Les chats sont indépendants donc ça va si je m’absente plusieurs jours”. De plus, l’information sur “les vivants” laissent à penser que cette femme est une vampire. Dans un mouvement de main, Pandore invite Astra à repartir pour s'amuser avec les autres chiens, cela ne sert à rien de la garder à ses côtés pour expliquer une chose aussi basique. Elle met un temps sans réponse, silence, on entend simplement les occupants boucher, jouer ou juste s’exprimer. Puis une idée naît dans son esprit.

“Suivez moi.”

La zombie doit avouer qu’elle s’étonne un peu que l’étrangère l’écoute autant sans sourciller par rapport à sa taille ou encore au fait, qu’elle ressemble plus à une enfant qu’à une petite adulte, même si elle essaie de se convaincre que ce n’est pas le cas. Peu important, tant que cela se passe bien, il n’y a pas besoin de faire de vague.
Après quelques minutes de marche, elles arrivent au niveau du garde manger, elle lui montre les nombreux ingrédients et les nombreux conteneurs à l’intérieur : graine, foin, légume, fruit, viande et autres.

“Je ne suis pas une experte en matière de vampire, mais il me semble que vos sorties dans le monde des vivants vous sert principalement à vous nourrir. Après vous êtes la seule race qui nécessite une nourriture différente …”

Lentement, elle tourne la tête pour l’observer d’un regard perçant.

“Vous vous absentez pendant plusieurs jours pour vous nourrir ou autre chose, que sais-je. Comment allez-vous nourrir votre chat ? Il n’a pas de main, ni de pied, juste des pattes, incapable de se servir lui-même[ N’est-ce pas injuste de votre part ?”

Une pointe d'irritation se fait sentir, la chimère n’est pas heureuse de devoir négocier avec une telle personne, une personne qui se vante d’aller dans le monde des vivants pour se nourrir mais en échange, elle laisse mourir de faim une âme qui mérite bien plus que cette vie.

Ô Pandore a vécu pendant des siècles, un long moment pendant l’ignorance de cette souffrance, le regret l’habite quand elle y repense. Et en face d’elle, une femme ignorante, bien plus qu’elle, désire adopter un petit chat sous peine, certainement, qu’ils sont mignons et indépendant. Dans un froncement de sourcil, la chimère lui indique que sa réponse ne lui plaît pas, mais clairement pas. “C’est certainement injuste, oui.” Le sous-entendu derrière cette phrase en dit long sur sa manière de penser, sans compter son “ceci est également ma profession”, quelque chose cloche dans cette affirmation. D’un léger mouvement de tête, la vieille chimère relève le menton et s’approche de son interlocutrice. Celle-ci enchaîne avec des propos typiques de personne incapable de s’occuper correctement d’un animal. Bien-sûr, tout le monde a le droit de profiter de vacances de temps en temps, même si maintenant, on peut même emmener nos compagnons en voyage. Mais, la question n’était pas là, on parle d’un travail dans le monde des vivants.
À quelques centimètres de la blonde, Pandore cesse son avancée et continue de la fixer d’un air plus menaçant que précédemment. Elle tend sa main, comme si elle attendait quelque chose de sa part et s’explique aussitôt.

“Pour adopter, vous êtes obligés de me donner un papier qui prouve votre activité et si je vois quelque chose d’étrange, je me réserve le droit d’en parler à la Boolice, voir de m’en charger moi-même si vous tentez de résister.”

Le mensonge, c’est mal et Pandore déteste ceux qui mentent sauf que dans ce cas précis, elle sentait une affaire louche autour de cette personne et il n’était pas question de lui confier un de ses petits pour lui faire subir une vie horrible. La zombie frisonne, son propre mensonge l'horripile …

Cette histoire devient de plus en plus étrange. Par le passé, Pandore a déjà eu affaire avec la Boolice, rarement en de bon terme au vu des actions de la Deathpéa. Pourtant, elle se souvient bien que les Bops interviennent surtout dans le monde des morts, les vampires étant les seuls capables de voyager dans le monde des vivants. Bien-sûr, son interlocutrice se révèle être une suceuse de sang mais quelque chose cloche. La mémoire de la vieille chimère lui fait encore défaut, certains détails importants ont été oubliés depuis des années et il lui sera difficile de les retrouver à ce moment précis. Elle se doit d’être plus maligne que cela, elle ne peut pas se permettre de communiquer avec le chef de la Boolice, pas en tant que membre de la Deathpéa. Un soupir lui échappe, elle ne peut pas en faire plus et il lui sera difficile d’empêcher cette adoption. D’un mouvement de main, la zombie refuse le numéro du chef et répond à ses propos.

“Il serait malvenu de votre part de me mentir sur votre métier, surtout si vous travaillez au sein de la Boolice, c’est facile à vérifier. Et il est toujours préférable de vérifier le métier d’une personne, le trafic d’animaux est fréquent dans le monde des morts.”

Ses iris fuient son interlocutrice, cette histoire ne lui plaît pas et elle doit concéder qu’elle n’a pas envie de lui laisser un de ses petits.

“Avant de vous laisser adopter, je vous ferais signer des papiers nécessaires dont un qui parle des besoins nécessaires à nos amis les bêtes. Et je vous demanderais de venir plusieurs fois au Sanctuaire pour vous familiariser avec les chats présents avant de choisir.”

Elle marque un temps de pause, ses doigts se posent sous son menton, elle semble réfléchir à quelque chose.

“Sachez que si nous apprenons quoique ce soit à votre sujet, nous pouvons refuser l’adoption et même après celle-ci, un organisme peut intervenir sous peine de maltraitance animale.”

Sans indiquer son appartenance à ce fameux organisme, Pandore relève son regard pour observer sa réaction. Bien-sûr, ce long discours lui sert à tester un peu plus la volonté de son interlocutrice, et si celle-ci est prête alors elle lui donnera une chance. La chimère oublie facilement, mais pour les choses importantes, elle est tenace.