Inclination
Ça a tourné, encore et encore dans ta tête. Inlassablement jusqu’à t’empêcher de dormir, t’as dû finir ta nuit dans la matinée et te préparer en vitesse. Pas question d’hésiter sur la tenue ce matin alors tu l’avais déjà préparée la veille au soir. T’avais voulu demander son avis à Avalon, Alarick t’a dit qu’il n’avait pas de téléphone et tu en étais bien triste. Ceci dit ton petit frère ne t’avait pas demandé pourquoi tu voulais le téléphone d’Avalon, c’est tant mieux parce que tu n’as pas tellement envie de lui en parler, là tout de suite. Beaucoup de pression, après tout il faut que tu sois à son niveau. T’as l’impression de pas être à son niveau. Tu repenses à tes messages, tu relis en boucle la partie où tu parles de prendre sa main. Tu te demandes si c’est le genre de choses qui se disent. Pourtant t’as envie de prendre sa main.
T’attrapes les clés dans le vide poche, tu fuis de l’appartement aussi vite que tu peux. Tu te mords les doigts de pas avoir fait un brin de ménage, de pas avoir rangé les papiers de l’association qui ont l’habitude d’occuper une part terrifiante de l’espace au sol, qui sait, peut être qu’elle pourrait te proposer de rentrer chez toi ce soir. Ça te dérangerait pas. Même si tu te doutes que ça n’arrivera pas immédiatement. L’angoisse qui te tort le ventre autant que l’envie de la rencontrer. Captivée par ses yeux et jusqu’à ses branchies même. Tu reregardes chaque photo qu’elle a mise sur Tunder minutieusement. Tu remarques par la même occasion qu’il n’y en a pas deux où ses cheveux sont identiques. Tu penses à tes cheveux auxquels tu apportes un soin tout particulier à maintenir le châtain, peut être que ton rose chimère t’irait bien au final, comme à elle. Ou une autre couleur comme ça. Le trajet dans le métro est atroce, au milieu de trop de monde pour que ce soit agréable. Accrochée tant bien que mal à une de ces poignées pour ne pas perdre l’équilibre et secouée autant par le train lui-même que par les gens autour de toi. Pourtant la perspective de ton après-midi atténue tout ça, tu te sens comme sur un petit nuage. Un nuage tout contracté mais un petit nuage quand même.
Tu arrives bien trop tôt, bien plus tôt que tu ne l’aurais voulu. Il est 13h30 et t’es déjà sur le parvis devant l’entrée. Tu regardes ton téléphone à la recherche d’un message. Tu fermes l’application et tu lances un jeu à la place pour passer le temps. Et par magie quand tu relèves la tête, elle apparait au loin. Tu la reconnais surtout à ses branchies. Tu la laisses s’approcher tranquillement en balançant ton poids d’une jambe à l’autre. Ce serait mentir que de dire que tu es complètement relaxée maintenant, au moins tu te dis que tout ça est bien réel et que ce n’est pas un rêve.
“Hey, salut. C’est Jules. T’es super belle”
Et tu dis sans ça sourciller - en tout cas c’est ce que tu voudrais parce que t’as le rouge aux joues. Elle est super belle. Tu commences à t’avancer vers l’entrée tout doucement, en ayant la démarche la moins naturelle du monde. T’es pas relaxée du tout au final, mais un grand sourire décore ton visage.
“On y va ? J’ai acheté les billets sur internet y’a quelque jour on peut directement passer les tourniquets”