Peek a Boo ! •• V.4.2
Peek aBoo !
Forum RPG paranormal • v.4.2 • Rp libre
Tout commence après la mort : découvrez un au-delà chatoyant où les rires remplacent la douleur.

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dans le Monde des Morts


Peek a Boo ! est un forum rpg dont la v4 a ouvert en février 2023. C'est un forum city paranormal où les personnages sont décédés ; après une vie pas très chouette, iels se sont vu offrir une nouvelle chance et évoluent désormais dans le Tokyo extravagant de l'au-delà.

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Yvan, son ex-compagnonpour Abraham Zakarian

起死回生

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#1
Terminé08.06.19 19:02
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Une sortie fort attendue

Juin 2019 - Bordeaux, France

Retourner dans le monde des vivants, retrouver la vie « normale », voir pour soi-même quels changements avaient eu lieu. Nombreux étaient les spectres qui en rêvaient, mais le retour à la vie n'était possible que pour un petit groupe d'entre eux - et encore: seulement sous certaines conditions. Chiara, elle, faisait partie de ce petit groupe d'heureux élus, et elle avait donc assisté aux premières loges aux changements de la société au cours des cinq derniers siècles. Et quels changements! Au lieu de garder jalousement pour elle ces informations, elle avait fait ce que bon nombre de voyageurs dans des contrées lointaines faisaient: elle avait publié ses observations pour faire découvrir à d'autres ce qu'elle avait vu. Et, non contente de décrire, il lui arrivait aussi de ramener avec elle l'une ou l'autre chose plus concrète que des mots, comme elle s'apprêtait à le faire lors de cette sortie.

Mais commençons par le commencement. Cela faisait maintenant un moment qu'elle s'était retrouvée en assez mauvaise posture face à une ennemie de longue date de sa colocataire, Frédérica. L'incident, bien que bref, s'était fini avec deux chimères blessées (Frédérica et une jeune femme que Chiara venait de rencontrer, mais qui semblait connaître l'Anglaise) et une fuite vers la résidence secondaire de la nécrochimère. Ce fiasco mis à part, la rencontre entre l'Italienne et la plus jeune des chimères avait eu un but bien précis: une quête d'informations à propos des proches de cette dernière. Et la Florentine, fidèle à son éternel sens de la famille, avait accepté de se renseigner lors de sa prochaine sortie. Ce qui tombait bien, c'était qu'elle devait de toute façon passer dans ce coin-là à la même période. Un festival du cinéma avait en effet lieu à Contis, à une soixantaine de kilomètres de l'adresse que lui avait donnée la chimère, et la vampire avait déjà prévu d'en enregistrer les films pour permettre leur projection dans le monde des morts.

À la date attendue, ses crocs sortirent, signe infaillible qu'elle devait sortir se nourrir. Elle prévint les deux femmes qui vivaient pour le moment sous le même toit qu'elle, ainsi que les autres personnes susceptibles de la joindre pendant son absence. Elle serait seule pour cette sortie, ayant besoin de sang plus régulièrement qu'Enrique et les deux jeunes vampires dont ils s'occupaient. Elle avait choisi pour son passage dans le monde des vivants la Porte la plus proche possible de Contis: celle de Bordeaux. Certes, cela voulait dire un long voyage en avion avant de pouvoir étancher sa soif, mais au moins cela limitait ses déplacements dans le monde des vivants. Avec le programme chargé qui l'attendait, elle n'aurait pas de temps à perdre.

Son point d'arrivée précis chez les vivants était toujours aussi aléatoire, et cette fois-ci c'est au beau milieu d'un parc qu'elle atterrit. À cette heure tardive, il était désert, et son apparition soudaine eut pour unique spectateur un écureuil franchement surpris. Sans perdre de temps, elle se mit à la recherche de sa proie. Les Passeurs d'Aurore lui avaient donné le nom d'une femme de la quarantaine qui devait mourrir renversée par une voiture le lendemain. Peu de proches, un métier peu enthousiasmant et sous-payé, pas de passion connue... elle était la candidate idéale pour une seconde existence avec plus de saveur que l'actuelle.

C'est donc la conscience relativement tranquille (quoique toujours réticente à l'idée d'une fois de plus commettre un meurtre) que la vampire suivit les indications qu'on lui avait données. Elle n'eut pas trop de mal à trouver la maison de sa future victime. À côté de l'habitation principale se trouvait un garage dont la porte fermait mal, probablement cassée un jour et laissée en l'état faute d'argent à dépenser pour la réparer. Ombre parmi les ombres de la nuit, Chiara se faufila à l'intérieur du garage pour attendre la maîtresse des lieux. Prévoyante, elle avait opté pour une tenue sombre: un élégant pantalon noir et un manteau ample de la même couleur. Seule sa chemise blanche apportait une touche plus claire, mais elle était pour le moment cachée par le manteau. Il était rare de la voir vêtue de manière aussi moderne, mais elle ne pouvait pas vraiment se déplacer dans le monde des vivants dans ses tenues habituelles.

Le plus dur dans toute cette affaire fut l'attente. Arrivée au coeur de la nuit, l'Italienne dut attendre cinq bonnes heures avant d'entendre du mouvement dans la maison. Elle sortit du demi-assoupissement auquel elle s'était laissée aller. Ses instincts de chasseurs se réveillèrent en même temps qu'elle, envoyant une dose d'adrénaline parcourir ses veines. Sa quête de sang était telle une addiction: elle avait beau la haïr, l'appel du précieux nectar n'en était pas moins irrésistible et excitant, et une part d'elle attendait avec impatience ce qui suivrait.

Il y avait  une porte qui menait directement de la maison au garage, et c'est par là que la propriétaire des lieux fit son apparition. La porte extérieure du garage étant fermée, la scène qui suivrait n'aurait pas de témoins. Jadis, Chiara aurait tenté de rassurer sa victime, se serait même excusée... mais il y avait maintenant bien longtemps qu'elle savait que c'était peine perdue. Laissant son instinct prendre le dessus, elle se glissa derrière la femme, lui attrapa le poignet de sa main gauche et la bâillonna de sa main droite. Ensuite, sans hésitation, elle planta ses crocs dans sa veine jugulaire pour enfin soulager sa soif. Sa proie n'avait aucune chance face à la détermination d'un vampire en chasse, a fortiori un vampire avec une longue expérience sur laquelle s'appuyer, et bientôt un corps exsangue gisait sur le sol du garage. Aidée par l'heure matinale, Chiara quitta les lieux sans attirer l'attention du moindre témoin.

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#2
Terminé16.06.19 19:24
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Une sortie fort attendue

Juin 2019 - Contis, France


La matinée était déjà bien avancée quand Chiara arriva à Contis, sa deuxième destination pour cette sortie. Pas moyen de trouver une connection directe avec les transports en commun, et elle avait donc dû se résoudre à faire un sacré détour et passer par des correspondances à n'en plus finir. Enfin, elle éait arrivée, c'était l'essentiel.

Une fois sortie du bus, elle n'eut aucun mal à trouver son but, le cinéma de la ville. Cela faisait suffisamment longtemps qu'elle s'y rendait une fois par an, que ce soit dans le monde des vivants ou dans celui des morts. Habillée élégamment, sans pour autant attirer l'attention, ses longs cheveux relevés en un chignon sobre, on aurait aisément pu la prendre pour un femme en voyage d'affaires quelconque. Impression renforcée par le sac à main qui pendait à son épaule et qui aurait très bien pu contenir une liasse de documents plus indigestes les uns que les autres. Ce n'était même pas si loin de la réalité, puisque son passage par cette ville lui permettrait de gagner une coquette somme d'ossements. Seulement, à la place des documents, son sac contenait une petite caméra et quelques batteries de rechange.

Les préparatifs pour le festival battaient leur plein quand la vampire atteint le cinéma. Et qui disait festival international, disait plein de nouvelles têtes, ce qui l'arrangeait bien. Elle n'eut aucun mal à entrer: il lui suffit de présenter un joli badge la décrivant comme une conseillère comm'. Faux et usage de faux? Non, car le document était parfaitement réel... seulement il avait été fourni par le pendant du cinéma côté mort.

Une fois à l'intérieur, Chiara se dirigea sans hésiter vers la salle où auraient lieu les projections de long-métrages. L'avantage des événements de moindre importance que, par exemple, les Oscars ou le Festival de Cannes, était que la sécurité était elle aussi bieeen moins conséquente. Personne ne demanda à l'Italienne ce qu'elle faisait là et elle n'eut aucun mal à installer sa caméra. Il ne lui restait plus qu'à l'allumer et déclencher l'enregistrement au bon moment, et dans quatre jours elle pourrait ramener les longs-métrages dans le monde des morts. Quant au découpage des films, c'était l'équipe du cinéma dans le monde des morts qui s'en occuperait.

Sa soif de sang apaisée, sa tâche pour la journée accomplie, l'Italienne pouvait flâner en attendant l'ouverture du festival, qui aurait seulement lieu le lendemain. Elle commença par se trouver une chambre pour les quelques jours qu'elle passerait sur place. Elle avait prévu ce séjour et était donc passée par le bureau de change avant de traverser la Porte histoire de pouvoir se payer un toit. Elle venait déjà de passer une nuit dans des conditions assez peu idéales, ça suffisait amplement. Elle passa ensuite le reste de l'après-midi à se promener dans la ville, sans but précis si ce n'est celui de profiter de cette brève période de répit par rapport au chaos continu du monde des morts. Fatiguée par sa trop courte nuit et par le contrecoup de sa soif de sang à peine soulagée, elle rentra assez tôt à l'hôtel où elle logeait.

* * *


Bien que le petit-déjeuner ne soit habituellement pas un repas bien élaboré pour Chiara (une tasse de café, éventuellement un petite quelque chose à manger et c'était plié), ses passages dans le monde des vivants étaient l'occasion de profiter d'une denrée rare chez les spectres: des oeufs. À la coque, pour être précis. Sa condition de parasite assoiffé de sang avait tout de même cet avantage-là pour le régime alimentaire.

Un peu avant l'ouverture du festival, elle entra dans le cinéma, toujours munie de son badge. Elle s'installa dans la salle de projection des long-métrages et déclencha à distance l'enregistrement quelques instants avant que le premier film commence. Un petit ménage qu'elle répéterait pendant les quatre jours à venir, sans oublier de changer la batterie de la caméra une fois par jour. Elle bénissait l'absence d'autres caméras (de sécurité, elles), sans quoi son petit manège aurait sans doute paru bien suspect. Quatre jours plus tard, elle avait trois batteries vides, mais une carte mémoire bien remplie et prête à être remise à son contact dans le monde des morts.

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#3
Terminé21.06.19 22:00
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Une sortie fort attendue

Juin 2019 - Capbreton, France

Sa tâche à Contis accomplie, Chiara n'avait plus qu'une mission avant de traverser la Porte dans le sens retour. Enfin, plutôt une promesse à honorer. Comme elle le faisait de temps en temps, elle s'était engagée à donner à une spectre récemment décédée des nouvelles de ses proches encore en vie. Elle espérait pouvoir rapporter de bonnes nouvelles. Elle n'avait qu'une très vague idée de ce qu'avait bien pu vivre Lyriana, mais elle soupçonnait que ça n'avait pas dû être plaisant et que les incidents de la soirée où elles s'étaient rencontrées n'avaient pas arrangé les choses.

Pour le trajet entre Contis et sa nouvelle destination, pas de transports en commun cette fois. Elle avait trouvé un loueur de vélos électriques, et le trajet longeant la côte était à la fois plus court et plus agréable que de passer par l'intérieur des terres. L'allée-retour lui prendrait la journée, mais elle pouvait se le permettre: elle ne repartait pour Bordeaux que le lendemain matin. Et puis, ça lui donnait presque l'impression de prendre des vacances à la campagne.

Grâce aux indications que lui avait données la chimère, l'Italienne n'eut aucun mal à trouver la maison du grand-père de Lyriana. Comme annoncé, les mots  « Bella Vita » ornaient la façade du bâtiment. Histoire de ne pas inquiéter le maître des lieux (ou d'éventuels voisins curieux), elle ne s'arrêta pas directement, mais attendit de trouver un endroit où elle pourrait laisser son vélo et continuer à pied. À la voir flâner dans les rues, on aurait pu la prendre pour une des nombreux touristes qui fréquentaient la ville chaque année. Elle se rapprocha de la maison et entra dans un des nombreux commerces alentours. Tout en faisant mine d'observer les babioles prévues pour les touristes, elle surveillait sa cible du coin de l'oeil.

Bientôt, son oeil fut attiré par une affiche suspendue près du comptoir de la boutique. Y figurait une femme d'âge mur qui rappelait vaguement quelqu'un à Chiara. Elle n'avait pas les cornes de la jeune chimère, forcément, ni les yeux rouges ou les cheveux blancs, mais l'air de famille était indéniable. Et si elle avait eu le moindre doute, le nom de la femme était inscrit sous la photo: Clarisse Beauclair. Ainsi, la vampire avait un début de réponse à ses questions, et la nouvelle était tout sauf rassurante: la mère de Lyriana était portée disparue. Le gérant de la boutique s'était approché entre-temps, ayant probablement remarqué où se portait le regard de sa cliente potentielle.

« Savez-vous qui est cette dame? »

Le français était une langue que Chiara avait bien maîtrisé jadis, mais elle s'était fort rouillé depuis, et son vocabulaire avait pris un sacré coup de vieux. Enfin, pour une rapide conversation, ça devrait suffir.

« Clarisse Beauclair? C'est la fille d'Anne et Simon, ils habitent en face, dans la maison avec l'inscription italienne. Ah ils avaient pas mérité ça! Des saints, tous les deux. »

Perdre leur petite-fille et leur fille, de manière aussi rapprochée de surcroit, devait en effet être une épreuve difficile pour n'importe quels (grand-)parents. Mais une simple touriste n'était pas censée savoir ça, et la vampire opta donc pour une formulation plus générale.

« Cela doit être une épreuve de voir sa fille disparaître ainsi. »

Maintenant qu'il était lancé, le commerçant ne comptait pas s'arrêter en si bonne voie. Apparemment, elle était tombée sur la commère du village.

« Ah mais même avant elle était une épreuve, la Clarisse! Enfin, fallait pas s'étonner, hein, son mari c'tun drôle d'oiseau aussi. Pis il y a leur fille qu'est morte il y a pas longtemps. Paraît que c'était un suicide. Avec des parents pareils, pas étonnant, hein. Ah ça leur a fait un coup à Anne et Simon. C'est qu'ils aimaient leur p'tite-fille, ça se voyait quand elle venait chez eux. »

Elle qui était au départ venue aux renseignements avec un but bien précis et simple se retrouva bientôt avec une montagne d'informations plus ou moins connectées entre elles. Des faits tels que la mort de Lyriana et la disparition de sa mère se voyaient mêlées à des théories plus ou moins abracadabrantesques, allant de la vendetta corse à une sombre affaire de réseau criminel et de corruption des plus hautes sphères du pouvoir. Elle aurait un sacré tri à faire, mais au moins elle avait de la matière. Elle finit par acheter une babiole et à prendre congé du commerçant bavard. Bien lui en prit: à peine avait-elle franchi  la porte de la boutique, qu'un homme d'un certain âge sortit de la maison qu'elle surveillait. Simon Beauclair, sans doute. Tant mieux: avec un peu de chance elle pourrait commencer à réduire les pistes. Et vérifier comment lui allait, au passage.

« Monsieur Beauclair? Auriez-vous un moment à m'accorder? »

Difficile à dire si c'était l'âge ou le chagrin qui accablait le plus l'homme face à elle. Il se tenait droit, mais il avait les traits tirés et les yeux cernés de quelqu'un que le sommeil fuit depuis longtemps.

« Bien sûr, comment puis-je vous aider? »

Aimable et serviable, malgré le poids qui pesait sur ses épaules.

« À vrai dire, c'est moi qui aimerais vous aider si c'est en mon pouvoir. J'ai vu l'avis de recherche pour votre fille et il se trouve que je fais partie d'une organisation d'aide aux proches de personnes disparues. Nous n'avons pas les moyens des institutions nationales et internationales, mais nous tentons de contribuer aux recherches à notre échelle. Auriez-vous le temps de m'éclairer à propos des circonstances de la disparition de votre fille? »

Sur le visage fatigué de son interlocteur, une brève lueur d'espoir apparut.

« Evidemment! On a déjà fait appel aux institutions officielles, vous savez. Et personne n'a l'air de faire quoi que ce soit. Entrez donc. »

Elle s'en voulait presque de lui donner un espoir probablement vain. Après tout, ce n'était pas en quelques jours par mois qu'elle résoudrait cette affaire. Enfin, on ne savait jamais. Elle croyait aux miracles, après tout. Elle entra dans la maison et fut guidée vers un salon déjà occupé par une femme, qui devait être Anne Beauclair. L'air aussi épuisée que son mari, elle était assise au bord d'un antique canapé, comme pour rester le plus proche possible du téléphone posé sur la table à côté.

« Je vous présente ma femme, Anne Beauclair. Anne, voici... »

C'est à ce moment-là qu'il parût réaliser que la personne qu'il venait de faire entrer chez lui ne s'était pas encore présentée. Chiara compléta donc sa phrase en déclinant le nom qu'elle avait adopté pour cette sortie:

« Cecilia Fiore. Enchantée, Madame Beauclair, bien que j'eus préféré vous rencontrer dans des circonstances différentes. »

Le sourire de son hôtesse n'atteint pas ses yeux fatigués, mais elle se montra néanmoins accueillante.

« Donc vous êtes au courant pour Clarisse? »

Chiara hocha la tête en s'asseyant dans le fauteuil qu'on lui avait désigné.

« J'ai vu les affiches dans le village. Je fais partie d'une organisation d'aide aux personnes disparues et un de nos buts est d'aider les recherches, à notre échelle. Pourriez-vous m'en dire plus au sujet des circonstances de la disparition de votre fille? »

Ses deux interlocuteurs échangèrent un bref regard, et c'est l'homme qui prit la parole pour répondre à sa question:

« Elle devait nous rendre visite il y a quatre mois. Son mari est... enfin, ce n'est pas un personnage recommandable. Elle a bien atterri à Biarritz, comme prévu, mais depuis... plus de nouvelles. Nous avons essayé de l'appeler, nous avons signalé sa disparition aux autorités françaises et américaines, puisque c'est là-bas qu'elle vit, mais aucun retour de leur part. Un voisin a aussi lancé un avis de recherche sur les réseaux sociaux, mais rien de ce côté-là non plus. C'est à croire que l'enquête piétine, pour peu qu'il y en ait même une! »

Son agitation avait augmenté au fur et à mesure de ses explications, pour atteindre un ton entre la colère et le désespoir dans sa dernière exclamation. Sa femme n'ajouta rien, mais se contenta de lui serrer brièvement la main pour lui transmettre un message connu d'eux seuls.

« Je suis navrée. »

Des mots vide, creux, elle ne le savait que trop bien. Mais elle ne pouvait pas leur offrir plus. Si ce n'est, peut-être, une mince lueur d'espoir. Après tout, elle était plus libre de ses mouvements que quiconque dans ce monde et elle n'était pas sujette aux nombreuses contraintes qui rhytmaient la vie des vivants.

« À quand sa disparition remonte-t-elle? »

Toujours cette question, qu'elle posait aussi aux spectres qui voulaient retrouver un proche. Une piste fraîche était infiniment plus facile à suivre que si elle devait tenter de retrouver des traces vieilles de plusieurs années.

« Environ quatre mois. »

Pas idéal, mais elle avait déjà fait franchement pire. Et puis, c'est en Europe que la disparue avait été aperçue pour la dernière fois, sur le continent où la Florentine avait le réseau de relations le plus développé. Elle avait des chances de réussir. Maigres, mais existantes.

« Elle ne vous a pas contactés lors de son arrivée à Biarritz... Y a-t-il quelqu'un d'autre avec qui elle aurait pu communiquer? Un proche, une connaissance, un collègue...? »

À peine la question avait-elle franchi les lèvres de Chiara qu'elle remarqua à quel point elle était douloureuse pour le couple assis en face d'elle. Leurs visages se décomposèrent et l'homme se raidit, comme s'il ressentait une douleur physique. Son épouse prit une brève inspiration, comme si elle avait été sur le point de parler, mais était incapable de prononcer les mots nécessaires. C'est finalement son mari qui répondit, les yeux secs mais sa voix emplie de chagrin.

« Non, ça fait des années qu'elle a coupé les ponts avec presque tout le monde. Ses amis, ses collègues... On a eu de la chance qu'elle ne fasse pas pareil avec nous, et encore: c'était seulement de loin en loin qu'on avait de ses nouvelles. C'est la faute de son mari, vous voyez... »

Et c'est comme si une digue se brisa, laissant un torrent de remords, de peine et de deuil s'écouler par la brèche. Tout commençait par un mariage à la mauvaise personne: un homme peu recommandable, infidèle, absentéiste et en toute apparence porteur de tous les maux qu'on pouvait attribuer à un être humain. Une relation malheureuse qui avait créé une spirale infernale, transformant une jeune femme ambitieuse et énergique en une personne aigrie, cynique, au point d'en devenir cruelle pour ses proches. L'impuissance des parents qui voyaient cette évolution. Leurs tentatives maladroites, insuffisantes de protéger leur petite-fille des brimades de sa mère et de l'indifférence de son père. Leur échec: un suicide. La volonté de se rapprocher de leur fille, de l'épauler dans son deuil, de la libérer du poids que son maudit mariage faisait peser sur ses épaules. Leur espoir quand elle avait annoncé qu'elle viendrait leur rendre visite. Sa disparition, un nouvel échec. Par deux fois ils avaient failli aux deux êtres qui leur étaient le plus cher au monde. Ils auraient pu... Ils auraient dû...

Pendant tout le temps que dura le soudain épanchement, Chiara ne dit pas un mot, se contentant de hocher la tête de temps à autre, de laisser le silence tomber quand l'homme devait se reprendre. Que pouvait-elle faire pour le moment, si ce n'est être une oreille attentive pour ce couple endeuillé? Pas grand-chose. Ce n'est que quand un silence plus définitif retomba qu'elle prit la parole à son tour, et seulement après un moment. Sa voix était basse, douce... et infiniment plus âgée que son corps.

« Vous avez fait tout ce qui était en votre pouvoir, tout ce qui était humainement possible. Vous avez épaulé votre fille et votre petite-fille du mieux que vous le pouviez, vous les avez soutenues et réconfortées quand vous le pouviez. Il est compréhensible que vous ayez voulu les protéger... mais vous ne pouvez pas les protéger contre le monde entier ou contre elles-mêmes. C'est impossible, à moins de les enfermer, de les forcer à exister hors du monde et hors du temps, ce qui est bien sûr impossible. Vous êtes responsables de vos choix uniquement, pas des leurs. N'alourdissez pas votre deuil en y ajoutant le poids de la culpabilité. »

Sans doute étaient-ils surpris par ses paroles. Après tout, à leurs yeux elle n'était guère plus âgée que leur petite-fille prématurément décédée. Mais elle sentait qu'il était de son devoir, non, qu'il était simplement humain, de faire ce qu'elle pouvait pour alléger leur peine, même de manière infime.

Combien de temps resta-t-elle dans ce salon à côté du téléphone désespérément silencieux? Plusieurs heures, certainement. Assez pour que le soleil ait commencé à décliner quand elle quitta la maison. La collecte d'information avait bien vite laissé la place à un autre type d'échange non moins essentiel: celui qui offrait une présence humaine, une personne à l'écoute. Sur le chemin du retour vers Contis et même une fois qu'elle eut regagné sa chambre d'hôtel, elle avait la gorge serrée et les épaules écrasées sous le poids des années qui n'avait jamais été aussi lourd. Elle ne dormit pas de la nuit.
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#4
Terminé22.06.19 18:51
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Une sortie fort attendue

Juin 2019 - Contis, France (monde des morts)

Le sommeil qui avait fait défaut à Chiara pendant sa dernière nuit dans le monde des vivants finit par la rattraper dans le car qui la ramenait à Bordeaux. Elle évita de justesse de louper son arrêt et franchit la Porte de retour dans un état de semi-conscience. Elle appela un taxi qui la ramena à Contis, mais de ce côté-ci de la mort. Elle avait réservé une chambre dans le même hôtel et y avait déposé ses bagages une semaine plus tôt. Une douche et un changement de tenue plus tard, elle se sentait déjà un peu mieux. Il faut dire que porter les mêmes vêtements à peu de choses près pendant une semaine, elle aimait moyen. Même s'il n'était encore que le milieu de l'après-midi, elle se laissa tomber dans le lit, éreintée. Elle s'endormit presque aussitôt et ne se réveilla que le lendemain matin.

Le lendemain, vêtue d'une de ses habituelles robes sorties du fond des âges (ça faisait du bien de se débarrasser des vêtements modernes), elle se rendit au cinéma. Elle passa d'abord par l'administration pour rendre son badge, puis se rendit dans le bureau du responsable de la projection pour lui donner la carte mémoire contenant les précieux films. Ledit responsable, ravi, lui remit les ossements promis et lui confirma qu'elle était invitée à l'ouverture du festival le lendemain après-midi. Chose qu'elle savait déjà, puisqu'elle avait reçu l'invitation il y a plusieurs semaines.

Une fois à nouveau libre, elle retourna à l'hôtel où elle sortit un carnet de sa valise. C'était un des (nombreux) carnets dans lesquels elle notait un premier jet de ses compte-rendus de voyages, mais cette fois c'est un autre type de compte-rendu qu'elle y nota. Sur plusieurs pages, elle nota tout ce qu'elle avait appris à propos de Clarisse Beauclair, aussi bien de la part de ses parents que de celle du commerçant bavard en face de chez eux. Heureusement, sa mémoire était excellente. Elle nota tout ce dont elle se souvenait dans les moindres détails, n'éliminant encore aucune piste, même les plus abracadabrantesques. Elle ferait le tri plus tard.

* * *


Malgré l'état de fatigue et de lassitude générale de la vampire, elle parvint tout de même à apprécier le coup d'envoi du festival de Contis - version morts. Elle faisait partie des invités d'honneur de l'événement, étant celle qui avait rendu possible la projection des longs-métrages. Et qui dit invitée d'honneur, dit invitation au repas après les premières projections et discours en tous genres. Une chance qu'elle soit depuis longtemps habituée aux mondanités. Et puis, côté mort, tout était de toute façon un peu plus détendu que de l'autre côté. Moins de faux-semblants et de coups en traître. Il y avait même une soirée dansante après le repas, avec des genres tellement variés que même elle y trouvait son compte. Elle ne s'y éternisa pas, mais elle y resta assez longtemps pour discuter avec quelques personnes qui suivaient son blog et élargir son réseau de connaissances. Des relations, ça servait toujours bien, tôt ou tard. Elle rentra ensuite à l'hôtel pour une dernière nuit en France. Le lendemain, elle reprenait l'avion pour Tokyo. Elle ne savait pas encore comment annoncer à Lyriana que sa mère avait disparu, mais peut-être que la chimère pourrait l'aider à éclaircir certaines zones d'ombre?
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