Ain't no hallow on my head ft. Sheryl

Le reflet dans le miroir renvoie l’image d’une jeune fille à l’air légèrement fatigué ; rien qui ne soit incorrigible avec un très léger trait d’anticernes, pour le principe, mais c’est à se demander comment elle a bien pu les avoir, ces poches sous les yeux. Elle n’a même pas vraiment l’impression d’avoir fait grand-chose d’autre que de trainer dehors ou dormir, depuis qu’elle est arrivée.
Sur ses joues, de petites claques pour se réveiller définitivement, comme si la douche qu’elle venait de prendre n’avait pas suffit, puis elle libère la salle de bain. À peine occupée pour une dizaine de minutes, douche expresse prise avant de sortir, elle en ressort tout de même changée. Coiffée, habillée proprement, elle a presque hésité à sortir sa nouvelle jupe avant de se dire que ce serait complètement stupide, et qu’un jean suffit amplement à complémenter le chemisier avec lequel elle est morte.
Sa garde-robe n’est pas bien plus étendue que ça, il faut dire.

Trois minutes plus tard, et la voilà qui est légèrement en retard. Mais est-ce que Sheryl est du genre à faire particulièrement attention à la ponctualité ? Ce serait très étonnant, et Mélina compte bien sur une réponse négative pour ne pas avoir à se presser en trottinant dans les couloirs. Elle a déjà fait bien assez d’efforts en mettant de l’anticerne et un fin trait de liner sur ses yeux, il ne faudrait pas qu’on lui en demande plus.
Surtout pour une sortie normale entre potes.
Posée devant la porte de l’appartement de Spock, Mélina sort alors son téléphone, le regarde, hésite… Elle se souvient bien des problèmes qu’elles ont pour communiquer – qu’elle a avec tout le monde, pour être honnête. Et revoir leur discussion… n’aide pas. Mise en lumière de leurs différences linguistiques et des failles du traducteur, elle sort de sa poche ce biscuit emballé dans un mouchoir, qu’elle a chipé dans une boutique.
Chipé, larciné, volé, chourré, peu importe le mot. Ce biscuit, il était gratuit à partir du moment où il est tombé entre ses mains, mais Mélina n’a toujours aucune idée de s’il fonctionne comme convenu ou non. Après tout, les produits gratuits… Enfin, celui-ci n’est peut-être pas exactement gratuit au sens conventionnel du terme.

Elle finit donc par couper court aux hésitations, enfourne le cookie en une seule fois dans sa bouche pour le mâcher, confuse, tout en essayant de voir s’il fonctionne…
Déglutition.
Sourire.
Comment est-ce que ça fonctionne, au juste ?
Comment peut-elle avoir, si simplement, l’entièreté de la grammaire anglaise sur le bout de la langue comme des doigts ? Et surtout, pourquoi personne a encore inventé de biscuit qui fasse ça pour toujours ? Elle trouve ça stupide, maintenant qu’elle comprend que plusieurs personnes ici sont capables d’un genre de magie super bizarre, mais elle n’a pas vraiment le temps de s’interroger sur la question. Très vite, ses doigts se mettent à pianoter sur son clavier.

[Hey there girl, your ride’s here and waiting to pick you up. Two-way ticket to the nearest potion bar in town, take it or leave it.]
[No like seriously I’d like it if you could come like right now, the night’s young and all yknow.]
Langue tirée d’amusement, elle ne pensait pas qu’écrire fluidement dans une langue étrangère serait aussi drôle. Elle est tellement plus libre dans sa communication, Sheryl a intérêt à se bouger le cul pour l’entendre parler parfaitement aussi.
Mélina n’est pas certaine de supporter si son biscuit finissait par ne plus faire effet sans avoir pu se la péter un instant.
Elle serre déjà les poings rien qu’à y penser, prête à frapper dans la porte, énervée par ses propres pensées et sa certitude que rien ne va aller comme il faut.